Le 15 mars dernier s’est
déroulé le premier tour des élections
municipales en France dans le contexte de crise sanitaire jamais vu
depuis très longtemps. Le gouvernement a pris cette
responsabilité de maintien de l’élection contre
l’avis majoritaire de la communauté scientifique.
Emmanuel
Macron, pris dans une énième contradiction, a annoncé
ce maintien des élections lors de son intervention télévisée
solennelle du jeudi 12 mars à 20h, tout en appelant les
personnes âgées et les personnes les plus fragiles à
rester chez eux…. : « C’est
pourquoi, je demande ce soir à toutes les personnes âgées
de plus de 70 ans, à celles et ceux qui souffrent de maladies
chroniques ou de troubles respiratoires, aux personnes en situation
de handicap, de rester autant que possible à leur domicile.
Elles pourront, bien sûr, sortir de chez elles pour faire leurs
courses, pour s’aérer, mais elles doivent limiter leurs
contacts au maximum ».
Le
Président Macron appelait la population en général
à limiter ses déplacements, préparant les
esprits au confinement de la population dès la semaine
suivante, à l’image de ce qui venait d’être
mis en place en Italie depuis le 8 mars. Macron annonçait
aussi ce soir-là la fermeture de toutes les écoles,
collèges, lycées, universités de France à
partir du lundi 16 mars, lendemain du 1er tour.
A
partir de cette intervention télévisée choc, la
place prise par le coronavirus dans les préoccupations de la
population, place déjà importante depuis 10 à 15
jours, est devenue écrasante ! Effet redoublé par
une intervention anxiogène du Premier Ministre Edouard
Philippe samedi 14 mars au soir, la veille même de l’élection,
dans laquelle celui-ci annonce « une
accélération de la diffusion du virus et dans certains
territoires une augmentation très importante des personnes en
réanimation »
et annonce « la
fermeture à compter de ce soir minuit de tous les lieux
recevant du public non indispensables à la vie du pays [….] et
de tous les commerces à l’exception des commerces
essentiels ».
Comment
dans un tel contexte, sous l’effet-choc de telles déclarations,
qui plus est sur un rythme accéléré, le 1er tour
des élections municipales pouvait-il se dérouler
normalement et démocratiquement ? L’insistance même
de Macron comme de E. Philippe sur le fait que le vote pouvait se
dérouler quand même « en
respectant strictement les consignes de distanciation et de
priorisation des personnes âgées et des personnes
fragiles »
montrait qu’il y avait un problème, et la multiplication
des reportages expliquant qu’il y aurait dans les bureaux de
vote du gel hydroalcoolique (tiens, eux en avaient…) et
qu’on pouvait venir avec son bulletin déjà
préparé chez soi pour éviter de toucher les
piles…. tout cela montrait bien que, non, cette élection
n’avait rien d’ordinaire, et de fait, ne pouvait
qu’inquiéter légitimement.
Dès lors la peur a
fait déserter les urnes : le très fort taux
d’abstention, inhabituel pour une élection municipale,
est là pour le confirmer. 55,25% du corps électoral ne
s’est pas déplacé. Une abstention plus forte
qu’aux élections européennes ! C’est
dire la situation dans laquelle se trouve notre pays car les
élections municipales font partie, avec l’élection
présidentielle, des élections au plus fort taux de
mobilisation chez les électeurs. En 2014, le taux
d’abstention était de 36,45%, nous sommes
quasiment 20 points au-dessus !
On se souvient
qu'Emmanuel Macron s'ingérait en contestant la
réélection de Nicolas Maduro au Venezuela du fait d’une
abstention de …46%. La question de l’abstention
justifiait alors à ses yeux la tenue d’un
nouveau scrutin. Autres lieux, autres mœurs… Des maires,
par ailleurs Ministres du gouvernement Macron, ont ainsi été
réélus avec des chiffres de participation très
faibles : 75% d’abstention par exemple à Tourcoing,
ville de Gérald Darmanin son ministre du budget, où
celui-ci est élu dès le premier tour… mais avec
15% des inscrits.
Cela
dévoile le véritable visage de la démocratie
bourgeoise qui assoit sa légitimité sur des artifices
formels. Le premier tour du scrutin s’est déroulé
en toute « légalité », nous
dit-on. L’exclusion, de facto, d’une partie du corps
électoral n’est pourtant pas sans rappeler le suffrage
censitaire du 19ème siècle
puisque ce sont aussi les personnes les plus éloignées
du vote, les plus précaires socialement qui ne se sont pas
déplacées. Elles ne perçoivent dans le vote en
régime capitaliste rien de plus qu’une
auto-reproduction d’une caste bourgeoise et ne sont donc pas
prêtes à risquer leur santé pour ça !
Ainsi, dans les grandes villes avec des quartiers populaires, cette
barrière de classe est visible dans la répartition des
résultats de l’abstention entre quartiers. Les quartiers
populaires ont des taux de participation qui touchent parfois à
peine les 20%.
C'est à se
demander si le maintien du vote n'était pas une stratégie
dont le but était de faire passer au premier tour les
ministres de son gouvernement et d'éviter le vote sanction
massif visant les listes LREM même camouflées?
Dans toute la France, des
recours ont été déposé par des candidats
qui dénoncent le contexte de l’épidémie
qui a tenu éloigné des urnes nombre d’électeurs,
faussant la sincérité du scrutin.
Des
électeurs se mobilisent également avec une pétition
nationale « A cause du
coronavirus, je n’ai pas pu choisir mon maire ».
Par ailleurs, au vu du
nombre de présidents de bureaux de vote, d’assesseurs
malades du Covid 19 et hospitalisés et, pour
certains, décédés depuis ce tragique
15 mars, des citoyens engagés dans la tenue des bureaux
de vote portent plainte pour « mise en danger de la
vie d’autrui ».
Le maintien de ce vote
apparaît bien comme une mise en danger des populations que
l'écrasante majorité du peuple citoyen a rejeté
en refusant de se rendre aux urnes.
Nous
demandons donc que Macron, qui donne des leçons de
« démocratie » au monde,
applique sa propre « jurisprudence
Maduro » : le
premier tour des élections municipales est une réelle
forfaiture démocratique, il doit être annulé !
Il faut recommencer l’ensemble des élections, sur tout
le territoire, y compris donc dans les villes où un gagnant
est déjà sorti de ce scrutin frelaté !
La pandémie a
dévoilé le vrai visage du système capitaliste.
Préparons d'ores et déjà la rentrée des
luttes contre ce système meurtrier.
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