Les
communistes ont toujours été très attentifs à
la question syndicale et à l'articulation entre organisations
de la classe exploitée, luttes syndicales et perspectives
politiques. A cet égard, le dernier congrès de la CGT,
première organisation syndicale de notre pays par son histoire
et son poids effectif dans la lutte des classes, est riche
d’enseignements dans une période de vifs affrontements
de classe. Il a en particulier montré un décalage
important entre une grande partie des bases combatives et la
direction confédérale.
Ce
décalage ne date pas d'aujourd'hui, il suffit de rappeler pour
s'en convaincre la déclaration de B. Thibault en plein conflit
de 2003 (« La CGT n'a pas vocation à bloquer le pays »)
ou la mise en minorité de la direction confédérale
par le CCN à propos du référendum de 2005 sur la
constitution européenne.
Il
a pris des formes exacerbées sur la dernière période,
en lien avec le mouvement des Gilets Jaunes, vu par la direction
confédérale comme un mouvement à ignorer voire
dont il faut se méfier tandis que de nombreuses bases
tissaient naturellement des liens, allant jusqu'à des appels
départementaux à des manifestations communes et un
appel national porté par des Fédérations et des
Unions Départementales pour le 27 avril.
Malheureusement,
le congrès n'a pas permis de débattre réellement
de ces questions et encore moins d'avoir une réponse de la
direction sortante à la question : « Face à
l’attaque globale, riposte générale ? ». De
façon générale les restrictions apportées
au débat ont même provoqué des mouvements
d'humeur de la salle qui à plusieurs moments scandait : « Le
débat, le débat ! ».
Le
vote sur le document de congrès donne néanmoins de
précieuses indications : avec 45 % des délégués
n'approuvant pas le bilan de la direction confédérale,
c'est bien l'image d'une CGT coupée en deux sur la conception
de développement des luttes, des alliances, sur le
syndicalisme de classe et ses relations internationales.
L'opposition
entre syndicalisme réformiste et syndicalisme révolutionnaire.
s'est exprimée surtout sur la question du
syndicalisme international. Sur cette question, la salle a surpris
une tribune vite dépassée, en levant un tabou posé
depuis 1995, celui du nécessaire dialogue de la CGT avec la
FSM, confédération internationale présentée
à la veille du congrès par Philippe MARTINEZ comme
n’ayant pas un « fonctionnement démocratique
» et pour lequel Bernard Thibault, ex-secrétaire
général de la CGT, était sorti de son silence
pour défendre mordicus l'affiliation de la CGT à la CES
comme un horizon indépassable à ne pas remettre en
cause. Pour faire échec à cette volonté des
congressistes – exprimée par 300 amendements
sur le sujet de la FSM - de travailler avec cette
internationale syndicale clairement anti-impérialiste et
anticapitaliste, la tribune a fait voter le congrès deux fois
au prétexte que les congressistes « n’avaient pas
compris l’amendement proposé ». Rien n’y a
fait, le 2ème vote a confirmé le 1er en l’amplifiant
encore. Donc à l’issue du vote, la CGT est mandatée
pour « rechercher constamment l’échange et l’unité
» avec aussi la FSM…
Ce
que nombre de délégués ont exprimé à
travers le vote de cet amendement mais aussi à d’autres
moments dans les débats, c'est leur volonté de voir la
CGT revenir à des positions de classe et renoncer aux
compromissions du « syndicalisme rassemblé » avec
la CFDT devenu président de la CES. Une CES appelant il y a
peu à « sauver le capitalisme de lui-même »
et remerciant il y a quelques jours Jean-Claude Juncker pour avoir «
sauvé l'Europe sociale ».
A
l’issue de cette semaine qui a donc vu s’affronter comme
souvent dans son histoire deux courants de pensée, le courant
que l’on peut qualifier de révolutionnaire (qui ne
plaide ni pour le dialogue social, ni pour l’unité des
appareils au détriment de l’intérêt des
travailleurs, qui a dénoncé la position anti-unitaire
de la direction face aux gilets jaunes et qui ne peut être
cantonné à une seule fédération ou union
départementale, mais les traverse toutes) sort renforcé.
Même
si le document d'orientation fait encore référence à
l'illusion de la possibilité d'une « sécurité
sociale professionnelle » (SSP) et d'un « nouveau
statut du travail salarié » (NSTS) sous le capitalisme,
ce congrès est une étape importante dans la lutte pour
que la CGT revienne à la lutte des classes.
Pour
celles et ceux qui pensent comme les communistes, qu’il faut
changer totalement de système parce que le capitalisme n’est
ni aménageable, ni améliorable, c’est une bonne
nouvelle.
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