Après
l'incroyable Brexit, l'impensable est arrivé : "Trump,
raciste, islamomophobe et mysogine", "Trump, milliardaire,
populiste et démagogue", "Trump, pro-russe, agent de
Poutine", etc. , celui que les médias coalisés
n'ont cessé de disqualifier bruyamment a finalement remporté
la présidence du pays défini par essence par les mêmes
médias comme "la plus grande démocratie au monde".
L'élite médiatique, "intellectuelle",
"experte", moralisatrice, sondagière a été
magistralement démentie par les résultats sortis des
urnes aux USA. Par un virage à 180 degrés, les mêmes
nous assènent maintenant un discours à l'opposé
de l'hystérie anti-Trump qu'ils avaient professé
auparavant, pendant les primaires d’abord, puis durant
l'élection elle même. Après Obama, L'alternance
bien huilée entre "Républicains" et
"Démocrates" a été de nouveau écorchée
par l'arrivée de Trump.
Bien
entendu, les travailleurs et les peuples, assommés par tant
d'inepties médiatiques et intellectuelles sur "l'american
way of life" le présentant comme l'alpha et l'omega de la
civilisation bourgeoise devant laquelle l’humanité
entière devrait se prosterner, modèle que l’humanité
entière est sommée d’adopter, ont voté
contre la dictature de la "pensée unique". Les
citoyens travailleurs expriment de plus en plus dans les urnes leur
révolte contre la souffrance qui leur est infligée par
"la démocratie" de classe, le désordre du
mode de vie étatsunien, les gadgets propagés par les
télé-réalité (dont Trump est un produit),
les orgies hollywoodiennes obscènes, l'individualisme forcené,
l'immoralité de la loi de la jungle, les guerres criminelles
de l'Oncle Sam. Ces "produits de consommation" toxiques
sont la marque de fabrique de la barbarie inhumaine du capitalisme,
libéré temporairement de l'antidote qu'a été,
au vingtième siècle, l'existence du socialisme réel.
Confrontés
quotidiennement à la mal vie, les travailleurs et les peuples
commencent à ouvrir les yeux sur les fastes, les privilèges
et les mensonges de la bourgeoisie malgré les sermons des
médias, des professeurs et autres experts grassement payés
par les milliardaires actionnaires dont la soif de profits est sans
limite. La bourgeoisie tente, encore et encore, de vendre en vain des
illusions et de couvrir ses forfaits prédateurs d'un vernis
idéologique qui, à chaque coup de grisou de la crise
générale, s'écorche toujours plus,
dévoilant aux yeux des travailleurs et des peuples la nature
sauvage du système d'exploitation de l'homme par l'homme.
Les
Reagan, Bush, Clinton, Obama et maintenant Trump se révèlent
peu à peu comme des étapes successives dans ce
processus douloureux de prise de conscience que le mal réside
dans le capitalisme lui même. Mais à ce stade, la
croyance qu'il faut un "sauveur suprême" est loin
d'être épuisée. C'est ainsi que Trump apparaît
encore pour beaucoup d'électeurs étatsuniens, tout
comme ce fut le cas pour Obama, comme un "sauveur". En
effet, Obama, puis Trump sont les produits de l'état de
conscience dans un processus évolutif des électeurs
étatsuniens qui subissent la duperie monumentale qu'est le jeu
sordide de la "démocratie" bourgeoise bipartiste
faisant alterner au pouvoir "Républicains" et
"Démocrates", changeant les hommes au pouvoir mais
ne changeant rien dans la vie des gens. Pour paraphraser nos
"cousins" anarchistes, c’est le "piège à
cons" qui continue à aggraver le sort des travailleurs et
des peuples au fur et à mesure que s'approfondit la crise
structurelle et systémique du mode de production capitaliste
arrivé à son stade suprême, l'impérialisme.
Les
principales causes du vote Obama puis Trump
a)
La paupérisation des travailleurs
Il n'y a
rien de "plus grand, de plus prospère, de plus
démocratique, de plus civilisé et de plus beau"
que le capitalisme des USA. Voilà ce qu'a imposé
"l'american way of life" comme "modèle" à
suivre. C'est le produit commercial que n'ont cessé et ne
cessent de nous vendre les médias et toute la soi-disante
"élite pensante, cultivée, instruite" dans
les pays impérialistes et dans les néo-colonies. Sur ce
mensonge a été édifié le culte quasi
divin de la "réussite individuelle" présentée
comme le fondement du "bonheur des travailleurs et des peuples".
Mais quelles réalités se cachent donc sous le tapis de
ces pubs propagées quasi religieusement, partout dans les
sermons médiatiques, universitaires et des réseaux dits
sociaux sur internet ?
Alors
que la crise économique, celle de subprimes, a déferlé
en 2008 sur le monde à partir des USA tout comme celle de
1929, les médias aux ordres continuent de nous bassiner les
oreilles avec la croissance US de 2,4% pour l'année 2015. Il
est vrai que les pays de l'UE, dépassant difficilement 1,5% de
croissance, ont l'oeil rivé sur le "grand frère"
US défini par essence comme "modèle de référence".
Ce tapage bruyant sur la "croissance" a une fonction
idéologique précise: imposer aux travailleurs et aux
peuples le mensonge que l'amélioration de leurs conditions de
vie dépend de celle-ci et donc qu'il leur faut prendre leur
mal en patience. Or pour l'ensemble de la période 1961-2015,
on enregistre en 54 ans aux USA une moyenne annuelle de 3,13%. C'est
en 1984 qu'on enregistre le plus haut niveau (7,26%) et c'est en 2009
qu'on enregistre le niveau le plus bas (-2,78 %)[1].
Ainsi, ce paradigme largement répandu se révèle
pour ce qu'il est : un mensonge manipulateur afin de paralyser et
d'affaiblir les luttes populaires contre la régression sociale
dévastarice régnant partout, conséquence
du régime capitaliste et de son offensive libérale.
Ce que
la grande presse des milliardaires cache aux peuples des USA et du
monde, c'est une réalité dramatique bien éloignée
des chimères de l'eldorado diffusées dans les émissions
de télévision, notamment de téléréalités.
En effet, sous le règne de Obama, la pauvreté a
atteint 90 millions d'habitants dans le "pays le plus prospère".
Ces "révélations" ont commencé à
voir le jour dans certaines enquêtes qui vont encore plus loin
en annonçant que 80% de la population du "plus civilisé"
des pays survivent dans la précarité, le chômage
déguisé en petits boulots fractionnés sur la
journée, et que 50 millions survivent ainsi sous le seuil de
pauvreté. Sur ces 90 millions de pauvres aux USA, plus de 46
millions font la queue devant les banques alimentaires dès 6h
du matin pour y recevoir de quoi ne pas mourir de faim.
C'est
cette réalité que Trump a exploité contre les
mensonges de l'establishement US :
"Eh
bien pour commencer, nous ne sommes pas à 5% de chômage.
Nous sommes probablement au-dessus de 20% si vous regardez les vrais
chiffres. C’est un chiffre qui a été arrangé,
statistiquement arrangé pour améliorer l’image
des politiciens – en particulier des présidents. Je
n’aurais pas les foules énormes que j’ai si ces
chiffres étaient réels. Les gens sont extrêmement
malheureux dans ce pays"
[2]().
En
fait les années 1960 et les années 70 ont été
la période où le niveau de la pauvreté aux
États-Unis était le plus bas. Depuis lors, le nombre de
pauvres croît au fil des cycles de récession qui se sont
succédé en 1980, en 1990, en 2000. En une décennie
le nombre de pauvres aux États-Unis a augmenté de plus
de 15 millions, passant de 31,6 millions en 2000 à 46,2
millions en 2010. Cette hausse importante est consécutive
à la crise économique et financière de 2008. La
proportion de pauvres n'a cessé de monter en flèche
pour atteindre 15% de la population active. L’augmentation du
taux de pauvreté s’est accélérée au
cours de ces dernières années passant de 11,3 %
en 2000, à 12,5 % en 2007 puis à 15,1 % en
2010.
La
crise économique qui perdure depuis 2008 s’est
enclenchée alors même que la pauvreté était
déjà située à un niveau élevé
au point que le nombre actuel de pauvres est le plus élevé
jamais recensé depuis que l’on mesure la pauvreté
aux États-Unis.
On peut
dire que "l'american way of life" tant vanté est
devenu un cauchemar social touchant toutes les communautés
étasuniennes et de plus en plus ce que d'aucuns appellent les
"classes moyennes" : "Les
Hispaniques et Asiatiques américains ont vu leur niveau de vie
baisser, passant respectivement de 25,8 % à 27,8 %
et de 11,8 % à 16,7 % de population vivant sous le
seuil de pauvreté. Les Afro-Américains d’un autre
côté, ont maintenant une vie un peu moins difficile (de
27,3 % à 25,8 %), notamment grâce aux
programmes d’assistance lancés par le gouvernement. Les
Blancs sont passés de 9,8 % à 10,7 % de
pauvres"
(dailygeekshow.com/etats-unis-pauvrete-population).
Ces chiffres éloquents sur la généralisation à
toute la Nation mutlinationale US de la pauvreté font dire à
Sheldon Danziger, économiste à l'université du
Michigan que « La
raison principale qui maintient la pauvreté à un seuil
si haut, vient du fait que les bénéfices d’une
économie qui croît ne sont plus partagés par tous
les travailleurs, comme c’était le cas dans le quart de
siècle qui a suivi la fin de la Seconde Guerre mondiale ».
Il conclut :
« Etant
données les circonstances économiques actuelles, la
pauvreté continuera de se propager à moins que le
gouvernement ne vienne en aide aux travailleurs les plus modestes »
(idem).
Et
pourtant, n'entend-on pas à longueur de journée, les
fayots bien payés chanter des louanges sur le capitalisme US
qui "réussit à faire baisser le chômage"
et tient sa position de "première économie
mondiale" ? Ces mensonges commencent même à agacer
certains au point qu'un éditorialiste étasunien n'a pu
s'empêcher de s'écrier : "Si
l’économie va mieux, alors pourquoi est-ce que la
pauvreté en Amérique continue à croître si
rapidement ?
Oui,
le marché boursier est au plus haut historiquement , mais le
nombre d’Américains vivant dans la pauvreté a
atteint un niveau jamais vu depuis les années 1960.
Oui,
les bénéfices des entreprises ont atteint des niveaux
records, mais le nombre d’Américains bénéficiant
de bons alimentaires également.
Oui,
les prix des logements ont commencé à se redresser un
peu (surtout dans les zones riches), mais il y a aussi plus d’un
million d’élèves des écoles publiques qui
sont sans abri, et ce pour la première fois dans
l’histoire américaine".
Et
sous
le titre "États-Unis
: Les 21 chiffres édifiants de la pauvreté,
voilà comment un étasunien décrit la triste
réalité qu'est devenue "l'american way of life"
:
"Avec
chaque année qui passe, le niveau de souffrance économique
continue à monter, et nous n’avons même pas encore
atteint la prochaine vague majeure de l’effondrement
économique. (...)
Selon
le Bureau américain du recensement, environ une
personne sur six vit
maintenant dans la pauvreté. Le nombre d’Américains
vivant dans la pauvreté est maintenant à un niveau
jamais vu depuis les années 1960.
Lorsque
vous ajoutez le nombre d’Américains à faible
revenu, c’est encore plus inquiétant. Selon le
Bureau américain du recensement, plus
de 146 millions d’Américains sont
«pauvres» ou à «faible revenu».
(...)
Environ 57% de
tous les enfants aux Etats-Unis vivent actuellement dans des foyers
« pauvres » ou à «faible
revenu».
La
pauvreté est encore pire dans les centres-villes.
Actuellement, 29,2
% des
ménages afro-américains ayant des enfants souffrent
d’insécurité alimentaire.
Selon
un rapport publié récemment, 60
pour cent des
enfants de Detroit vivent dans la pauvreté.
Le
nombre d’enfants vivant avec 2,00 $ ou moins par jour aux
États-Unis atteint les 2,8
millions . Ce
nombre a augmenté de 130 pour cent depuis 1996.
Pour
la première fois, plus
d’un million d’élèves
des écoles publiques sont sans abri. Ce nombre a augmenté
de 57
% depuis
l’année scolaire 2006-2007.
Le
nombre de sans-abri dans la région de Washington DC (l’une
des régions les plus riches de tout le pays) a
augmenté de 23 % depuis
la dernière crise.
(...)
Il
y a eu une explosion du nombre de «travailleurs pauvres»
ces dernières années. Aujourd’hui,
environ un
salarié sur quatre perçoit
un salaire au niveau ou en dessous du seuil de pauvreté.
plus
de 100 millions d’Américains sont
inscrits à au moins un programme social géré par
le gouvernement fédéral. Et ce chiffre n’inclut
même pas la sécurité sociale ou
l’assurance-maladie.
Record
de tous les temps , 47,79
millions d’Américains reçoivent
des bons alimentaires. Lorsque Barack Obama a accédé
au pouvoir, ce nombre était d’environ 32
millions.(...)
Selon certains
calculs ,
le nombre d’Américains bénéficiant de bons
d’alimentation dépasse maintenant les populations
combinées de « Alaska, Arkansas, Connecticut,
Delaware, District de Columbia, Hawaii, Idaho, Iowa, Kansas, Maine,
Mississippi, Montana, Nebraska, Nevada , New Hampshire,
Nouveau-Mexique, Dakota du Nord, Oklahoma, Oregon, Rhode Island,
South Dakota, Utah, Vermont, Virginie-Occidentale, et Wyoming.
»
Dans
les années 70, environ
un Américain sur 50 recevait
des coupons alimentaires. Aujourd’hui, près d’un
Américain sur six en dépend. Encore plus choquant est
le fait que plus d’un
enfant sur quatre est
inscrit dans le programme de bons alimentaires.
Malheureusement,
tous ces problèmes sont le résultat de notre long
déclin économique. La vérité est que
nous sommes au milieu d’un déclin économique à
long terme, et que les choses vont devenir bien pire"[3].
Une
telle hécatombe sociale a produit hier le vote Obama et
aujourd'hui le vote Trump. En effet le travailleur "blanc"
avait voté Obama pour se débarrasser de Bush et
maintenant le travailleur "noir" ou "hispanique"
vote Trump, malgré son racisme, notamment anti-hispanique. En
l'absence d'un parti communiste uni et fort, la majorité des
travailleurs électeurs croient encore au "sauveur
suprême". Le capitalisme US en crise durable lamine sa
propre population et l'enfumage de "l'american way of life"
se dissipe pour laisser transparaitre, sous le vernis médiatique
et idéologique, l'hideuse dévastation sociale et
antidémocratique.
Il
est clair que cette double expérience électorale, qui
ne fera qu'empirer la situation sociale,
favorisera
le retour en force du combat de classe, en fécondant les
organisations de classe syndicale et politique qui permettront de
frayer la voie à l'avenir socialiste communiste des USA.
Même
si comparaison n'est pas toujours raison, il est intéressant
de signaler ce qui se passe sous le "socialisme de marché"
ou capitalisme d'état chinois: "Selon le Global Wealth
Report (Rapport sur la richesse mondiale, ndlr) réalisé
par le Crédit Suisse, il y a plus de personnes pauvres en
Amérique du Nord qu'en Chine. Selon les schémas
présentés par le Crédit Suisse, l'Amérique
du Nord compte 10% des personnes les plus pauvres de la planète
et 30% des personnes les plus riches. L'Europe, dont la population
est supérieure, a des indicateurs encore plus élevés
— 20% des plus pauvres et 35% des plus riches. En Chine, la
part des personnes les plus pauvres est proche de zéro, celle
des personnes les plus riches atteignant 7 ou 8% "(sputnik). A
méditer, n'est ce pas ? En effet on est là bien loin du
slogan de la pensée unique libérale imposé par
Thatcher puis Reagan : "there is no alternative".
b)
L'explosion des profits
Parallèlement
à cette tragédie sociale qui met fin aux illusions
entretenues d'un "paradis yankee", les dividendes
redistribués aux actionnaires des monopoles capitalistes du
Dow Jones font perdre la raison : 900 Milliards $ en 2014. Le
Figaro.fr avec l'AFP en font ainsi un résumé alléchant
pour les chasseurs de profits capitalistes : "L'année
2014 a été un bon crû pour les actionnaires des
entreprises cotées à la Bourse de New York: plus de 900
milliards de dollars leur ont été redistribués,
un record, selon une étude de S&P 500 publiée
lundi. Au total, les cinq cents entreprises cotées à
Wall Street et reprises dans cet indice ont redistribué 903,7
milliards de dollars (827 milliards d'euros) à leurs
actionnaires, contre 787,4 milliards de dollars en 2013, soit un bond
de 14,8% sur un an, détaille cette enquête. Elles
ont ainsi redistribué quasiment toute leur trésorerie,
qui s'élevait à 1.333,2 milliards de dollars au 31
décembre, selon cette enquête. Dans le détail,
les dividendes représentent 350,4 milliards de dollars de
l'enveloppe totale, soit un niveau plus élevé qu'avant
la crise, selon S&P Dow Jones qui gère cet indice. Les
rachats d'actions comptent pour 553,3 milliards de dollars, en hausse
de 16,3% sur un an. Outre les classiques dividendes, les entreprises
ont recours de plus en plus aux rachats de leurs propres actions pour
rémunérer leurs actionnaires. Le mécanisme
est simple: quand une société rachète ses
propres actions, elle les annule et augmente ainsi artificiellement
la valeur des titres restants pour le plus grand bénéfice
de leurs détenteurs. Par entreprise, c'est Apple (45 milliards
de dollars en rachats d'actions) qui a le plus rémunéré
ses actionnaires. Habitué des premières places, le
géant pétrolier Exxon Mobil arrive deuxième,
avec 13,18 milliards de dollars de rachats d'actions. Intel (10,79
milliards) complète le trio de tête"[4].
On
voit ici que la hausse de la pauvreté aux USA est
proportionnelle à la hausse de la plus value empochée
par les actionnaires, véritables propriétaires et donc
véritables patrons des entreprises monopolistes capitalistes.
L’obtention
d’un profit constitue le but et le moteur de tout détenteur
de capitaux, lequel donc n’investira que s’il espère
en tirer un taux suffisant rapporté à son
investissement : "Le
taux de profit est la force motrice de la production capitaliste, et
on n’y produit que ce qui peut être produit avec profit
[…]
le
taux de mise en valeur du capital total, le taux de profit, est bien
l’aiguillon de la production capitaliste (de même que la
mise en valeur du capital est son unique fin)…"[5]
.
Ce
que décrit Marx ici a été relativement contenu
jusqu'à un certain point à partir de 1917, et surtout
de 1945 jusque dans les années 1989/91. En effet, l'existence
de l'URSS et du camp socialiste était un véritable
épouvantail pour la bourgeoisie. Les luttes des travailleurs
aux USA et dans les pays de l'UE l’ont ainsi contraint à
concéder des hausses de salaires et des conditions améliorées
de travail et de vie, de peur de voir le socialisme réel
se propager. Cette période a pu ainsi durer jusqu'à
la défaite de l'URSS et du camp socialiste. C'est ainsi que le
"compromis social" imposé à la bourgeoisie
par le mouvement ouvrier a engendré la dite "société
de consommation" à crédit et la dite "classe
moyenne". Les peuples colonisés ont aussi obtenu, par
leurs luttes, des indépendances réelles pour certains
et nominales pour d'autres. Mais ces conquis sociaux et démocratiques
ont aussi été instrumentalisés par la
bourgeoisie pour faire croire que le prolétariat a disparu.
Des monographies statistiques ont émietté les
travailleurs en catégories pour les invisibiliser en tant que
classe sociale. Le discours des opportunistes social-démocratisés
s'y est adapaté pour ne parler que des "classes moyennes"
et de catégories socio-professionnelles de la soi-disante
"société post-industrielle".
L'élévation
relative du niveau de vie dans les pays impérialistes
consécutive aux luttes sociales et à la peur de la
"contagion" socialiste a été modélisée
et baptisée "l'american way of life" pour faire
rêver et désidéologiser les travailleurs et les
peuples. Le contre-modèle du socialisme réel a été
présenté comme "l'erreur, l'horreur absolue et un
accident de l'histoire".
L'existence
de deux camps - l'un capitaliste impérialiste et l'autre
socialiste – limitait objectivement l'internationalisation
sauvage du capital que l'on appelle aujourd'hui "mondialisation".
La sphère d'expansion du capital a été, dans un
premier temps, orientée vers les pays du Tiers Monde contre
l'indépendance réelle où l'impérialisme a
jeté toute sa force dans les guerres (Vietnam, Algérie,
etc), par les assassinats (Um Nyobé, Lumumba, les 500.000
communistes Indonésiens, Osendé Afana, Ben Barka,
Cabral, Sankara, etc), les coups d'état (Nkhrumah, Allende,
etc) et autres subversions et agressions multiformes contre les
peuples.
Et,
à partir des années 70, la crise générale
de l'impérialisme recommença à se manifester,
engendrant l'adoption massive par la bourgeoisie et ses partis,
d'abord de droite et puis sociaux-démocrates, du libéralisme
sur fond d'introduction relativement massive des nouvelles
technologies (robots, internet, etc).
Comme
nous le citions dans notre brochure sur l'élection d'Obama, il
y a plus de cent cinquante ans, vers 1858, dans une allocution pour
le jubilé du journal ouvrier The People’s Paper sur la
dialectique, Karl Marx faisait cette analyse qui trouve aujourd’hui
un écho singulier : « A
notre époque chaque chose semble grosse de son propre
contraire. Nous voyons les machines, qui possèdent la force
merveilleuse de réduire et de rendre plus fécond le
travail humain, en faire une chose rabougrie qu’elles consument
jusqu’à épuisement. Par un étrange
maléfice, les nouvelles sources de richesse se transforment en
autant de sources de misère. On dirait que les conquêtes
de la science doivent être payées du renoncement à
tout ce qui a du caractère. Même la pure lumière
de la science ne peut apparemment briller que sur le sombre fond de
l’ignorance ».
La contradiction de base de l’époque de l’impérialisme
est celle entre la socialisation mondialisée de la production
et l’appropriation privée mondialisée des
richesses produites par le travail. C’est sur ce fondement là
que se manifestent, sous des formes de plus en plus brutales, toutes
les autres contradictions de l’impérialisme :
capital / travail, impérialisme / peuples opprimés,
capitalisme / socialisme. C'est sur ces contradictions fondamentales
que l'impérialisme a tenté, en vain, de remettre le
couvercle par sa théorie de la « fin de
l'histoire ».
Toutefois
l'encerclement capitaliste du camp socialiste et la trahison
opportuniste des dirigeants révisionnistes
anti-Marxistes-Léninistes débouchèrent sur la
restauration du capitalisme en URSS et dans le camp socialiste à
l'exception des rescapés qui résistèrent à
la vague contre révolutionnaire que sont la Chine, la Corée
du Nord, le Vietnam et Cuba.
Ainsi
relativement contenu jusqu'ici, le terrain de chasse aux taux de
profits les plus élevés s'est de nouveau élargi
à toute la planète, c'est ce que nous appelons la
"re-mondialisation capitaliste".
Cette
"re-mondialisation" a tout de suite pris la forme visible
d'offensives militaires de l'impérialisme en Irak,
Yougoslavie, Afghanistan, Côte d'Ivoire, Libye, Mali, tout le
long du Sahel-Sahara, Syrie. Mais elle avait déjà pris,
sur le plan économique, la forme insidieuse des
délocalisations des productions industrielles vers la main
d'oeuvre sous payée de pays sous développés, des
externalisations ou des sous traitances intra ou extra firmes
multinationales. La restauration du capitalisme dans l'ex-camp
socialiste offrait du coup une main d'oeuvre techniquement hautement
formée mais sous payée, ce qui devait accentuer la mise
en concurrence entre prolétaires à travers le monde par
les patrons dans une logique de maximum de profit. La mondialisation
capitaliste, dont l'Union Européenne est une forme
supranationale spécifique au sous continent européen,
organise ainsi la "concurrence libre et non faussée"
pour les taux de profits les plus élevés dans le cadre
de la division du travail entre les 28 puis 27 Etats et Nations.
Précisons
toutefois que l'augmentation exponentielle des profits redistribués
n'est nullement opposable à la loi de la baisse tendiancielle
des taux de profit découverte par Marx. C'est ce que confirme
le résumé analytique d'un économiste canadien
qui a travaillé sur le taux de profit aux USA depuis 1945:
"D’abord,
le déclin séculaire dans le taux de profit d’EU
depuis 1945 est confirmé et en effet, sur la plupart des
mesures, la rentabilité est près des abaissements de
l’après-guerre. Deuxièmement,
la cause principale de la chute séculaire est clairement une
hausse de la composition organique de capital, donc l’explication
de Marx de la loi de la tendance à chuter du taux de profit
est aussi confirmée. Troisième,
la
rentabilité sur la plupart des mesures a atteint un niveau
maximal à la fin des années 1990 après le
redressement “néolibéral’. Depuis lors, le
taux d’EU de profit a été statique ou chutant. Et
quatrième,
depuis environ 2010-12, la rentabilité a commencé à
chuter de nouveau. Finalement,
la chute du taux de profit aux EU a maintenant laissé place à
une chute dans la masse de profits (...) Au
cours de la période entière, 1946-2015, le taux de
profit est tombé de 30 % (la mesure de coût historique),
tandis que la composition organique de capital est montée de
46 % et le taux d’exploitation est montés de 2 %"
[6].
En
fait la crise générale est le soubassement des
récessions cycliques annoncées par la baisse
tendancielle du taux de profit que Engels a résumé
ainsi : "…depuis
1825, date où éclata la première crise générale,
la totalité du monde industriel et commercial, la production
et l'échange de l'ensemble des peuples civilisés et de
leurs satellites plus ou moins barbares se détraquent environ
une fois tous les dix ans. Le commerce s'arrête, les marchés
sont encombrés, les produits sont là aussi en quantités
aussi massives qu'ils sont invendables, l'argent comptant devient
invisible, le crédit disparaît, les fabriques
s'arrêtent, les masses travailleuses manquent de moyens de
subsistance pour avoir produit trop de moyens de subsistance, les
faillites succèdent aux faillites, les ventes forcées
aux ventes forcées. L'engorgement dure des années,
forces productives et produits sont dilapidés et détruits
en masse jusqu'à ce que les masses de marchandises accumulées
s'écoulent enfin avec une dépréciation plus ou
moins forte, jusqu'à ce que production et échange
reprennent peu à peu leur marche. Progressivement, l'allure
s'accélère, passe au trot, le trot industriel se fait
galop et ce galop augmente à son tour jusqu'au ventre à
terre d'un steeple chase complet de l'industrie, du commerce, du
crédit et de la spéculation, pour finir, après
les sauts les plus périlleux, par se retrouver... dans le
fossé du krach. Et toujours la même répétition.
Voilà ce que nous n'avons pas vécu moins de cinq fois
déjà depuis 1825, et ce que nous vivons en cet instant
(1877) pour la sixième fois"
[7]
. En d'autres termes se succèdent les périodes de
relatives accalmies et de récessions qui charrient la
généralisation progressive du chômage, de la
misère, de la précarité à toutes les
couches du monde du travail et accentuent la course effrénée
au profit maximum des capitalistes.
Contre
l'ennemi Soviétique d'hier, les impérialistes US
avaient noué une alliance "anti-laïque et
anti-athée" avec le fanatisme religieux terroriste des
Emirs des pétrodollars Wahabites d'Arabie Saoudite, Salafistes
du Qatar et Takfiristes. Confrontés à la crise
systémique du capitalisme, les Bush et les Clinton ont profité
de la défaite du camp socialiste pour se lancer dans une
course guerrière pour préserver l'hégémonie
mondiale du capitalisme des USA en Irak, Afghanistan, Libye, Syrie
sur le contrôle
des
sources d'énergie que sont le pétrole et le gaz. En
fait l'OTAN a élargi ses bases pour encercler militairement la
Russie et la Chine. L'agression contre la Yougoslavie, son
démembrement et le réveil du Nazisme Ukrainien
participent de cet objectif géopolitique et géostratégique
US flanqué de l'UE.
Le
nouveau cycle des guerres coloniales s'est opéré
jusqu'ici avec les mêmes alliés fondamentalistes
religieux. Mais si l'hégémonie mondiale rapporte
beaucoup au capitalisme US, elle lui coûte aussi cher, même
très cher, et crée peu à peu à
l'intérieur du pays les conditions d'une révolte
populaire contre les fauteurs de misère et de guerres.
L'illusion que le libéralisme amène la "prospérité"
pour les patrons mais aussi pour les travailleurs s'estompe aussi,
d'autant plus que les "classes moyennes" se paupérisant
de
plus
en plus, cette soupape idéologique devient de moins en moins
crédible.
Obama
et Trump sont successivement apparus dans ces conditions comme les
"sauveurs" qui vont "s'occuper du pays" et
"désengager" les USA des bourbiers que les
politiques de guerre des Bush et Clinton ont enfanté. Sur ce
point il faut observer que les votes Obama et Trump émanent de
toutes les classes et couches sociales, principalement le monde du
travail sans distinction de ‘race’, d’origine, de
religion, de langue, qui, dans l’urne, ont manifesté
chacune leur mécontentement face à l’establishment
US.
L'histoire
des USA comme puissance dominante du monde capitaliste est jalonnée
d'une succession de politiques fondées sur la "doctrine
Monroe", préconisant un relatif isolationnisme et/ou sur
la "doctrine Wilson", impliquant
une
ingérence dans les affaires du monde. Bush et Clinton
représentent la "doctrine Wilson" et Obama et Trump
la "doctrine Monroe". Toutefois, il ne s'agit que de
postures tactiques qui ne changent en rien le fond stratégique
des objectifs de domination mondiale de l'impérialisme US
contre son déclin inévitable. Le fait que Trump se
démarque de "l'anti-poutinisme" et de la russophobie
de Obama/Clinton et des Hollande/Merkel est une approche tactique
consécutive à la débâcle en cours
consécutives aux
provocations
agressives, en Ukraine et en Syrie, de l'OTAN et de ses alliés
Nazis et autocrates monarchistes intégristes des
pétro-dollars. Trump, tout comme Fillon ou Marine Le Pen
cherchent aussi à rompre le front uni Russo-Chinois contre les
fauteurs de guerre US et UE coalisés dans l'OTAN.
Pour
bien comprendre les bouleversements en cours aux USA, ces brusques
coups de volant vers le repli sur soi puis vers l'ingérence
guerrière, il faut garder à l'esprit cet enseignement
magistral de K. Marx : "Les
hommes font leur propre histoire, mais ils ne la font pas de plein
gré, dans des circonstances librement choisies; celles-ci, ils
les trouvent au contraire toutes faites, données, héritage
du passé. La tradition de toutes les générations
mortes pèse comme un cauchemar sur le berceau des vivants. Et
au moment précis où ils semblent occupés à
se transformer eux mêmes et à bouleverser la réalité,
à créer l’absolument nouveau, c’est
justement à ces époques de crise révolutionnaire
qu’ils évoquent anxieusement et appellent à leur
rescousse les mânes des ancêtres, qu’ils empruntent
noms, mots d’ordre, costumes, afin de jouer la nouvelle pièce
historique sous cet antique et vénérable
travestissement et avec ce langage d’emprunt »
[8].
(En
effet Obama puis Trump jouent exactement aujourd'hui les rôles
que d'autres ont joué tout au long du 19ème siècle
dans le contexte du passage du système féodal au
système capitaliste : « C’est
ainsi que Luther prit le masque de l’apôtre Paul, que la
Révolution de 1789-1814 se déguisa alternativement en
République romaine et en Empire romain, et que la Révolution
de 1848 ne sut rien faire de mieux que de parodier tantôt 1789,
tantôt la tradition révolutionnaire de 1793-1795. Il en
est ainsi du débutant qui, ayant appris la langue nouvelle, la
retraduit toujours en sa langue maternelle, mais il n’aura
assimilé l’esprit de la langue apprise et ne pourra
créer librement dans celle-ci que le jour où il saura
s’y mouvoir sans nul ressouvenir et oubliera, en s’en
servant, sa langue d’origine. (…) Camille Desmoulins,
Danton, Robespierre, Saint-Just, Napoléon, les héros,
ainsi que les partis et les masses de l’ancienne Révolution
française, accomplirent sous le costume romain et avec des
phrases romaines la tâche de leur temps : l’émancipation
et la création de la société bourgeoise moderne.
(…) Et ses gladiateurs trouvèrent dans les austères
traditions classiques de la République romaine les idéaux
et les formes d’art, les illusions dont ils avaient besoin pour
se dissimuler à eux-mêmes le contenu étroitement
bourgeois de leurs luttes et maintenir leur passion à la
hauteur de la grande tragédie historique »[9].
Hier
il s'agissait des acteurs de la révolution anti-féodale
et anti-monarchiste pour « la création de la
société bourgeoise », aujourd'hui il s'agit
d'acteurs pour sauver l'impérialisme occidental de la
décadence.
L'impérialisme
US, dans son long et progressif déclin, ne fait-il pas tout
simplement que tantôt faire parodier Wilson (après la
première guerre mondiale) puis Truman (après la seconde
guerre mondiale antifasciste) par Bush et Clinton puis tantôt
faire parodier Monroe par Obama et Trump sur fond de tentative
illusoire d'enrayer la décadence du capitalisme, arrivé
à son stade suprême, dont les conséquences sont
tragiques, pour les peuples victimes de ses guerres, et pour les
étasuniens eux mêmes victimes des politiques libérales?
Bernie
Sanders catalyseur du réveil de la lutte des classes des
travailleurs
Bernie
Sanders a mené campagne lors des primaires du parti
"Démocrate" pour l'assurance-maladie universelle et
publique, une forte augmentation du salaire minimum, la gratuité
des universités contre les diktats libéraux de Wall
Street, des compagnies d'assurance, des fonds de pensions, des
industries des énergies fossiles, des traités
commerciaux comme CETA et TAFTA. Il s'est ouvertement prononcé
contre le racisme, la ségrégation, la xénophobie,
les meurtres racistes, les discriminations, les guerres
coloniales, l’économie de la guerre permanente, etc.
Bernie
Sanders s'est aussi positionné contre le colonialisme
fanatique israélien en répondant à une question
provocatrice d'Ezra Klein de Vox :
"Un
sioniste ? Qu’est-ce que cela veut dire ? Voulez-vous
définir le mot ? Est-ce que je pense qu’Israël
a le droit d’exister ? Oui. Est-ce que j’estime que
les États-Unis devraient jouer un rôle impartial dans
ses rapports avec la communauté palestinienne en Israël ?
Oui, absolument.
(…)
Nous nous battons pour un Etat palestinien où les gens
pourraient jouir dans ce pays d’un niveau de vie décent,
ce qui n’est certainement pas le cas en ce moment.
Je
pense que la plupart des observateurs internationaux diraient que les
attaques contre Gaza étaient aveugles et que beaucoup de gens
innocents ont été tués et ne devraient pas être
tués.
Israël a assassiné 10 000 innocents à Gaza en
2014".
Plusieurs
syndicats de travailleurs, dont le réseau syndical "labor
for Bernie", le National Nurses United, principal syndicat
d’infirmières et infirmiers avec 180 000 adhérents,
le Syndicat américain des postiers (APWU), qui en compte
200 000, et celui des Travailleurs de la communication (CWA,
700 000 membres) lui ont apporté leur soutien contre
les grandes centrales qui soutiennent traditionnellement le parti
"Démocrate". Pas donc étonnant parce que "le
spectacle d’un candidat à l’investiture du Parti
Démocrate qui s’arrête devant un piquet de grève
et prend la parole pour soutenir la lutte des grévistes, est
suffisamment rare pour qu’il ne passe pas inaperçu ,
même par les medias des Etats Unis. Ceci est donc arrivé
le lundi 11 avril à Times Square à New York. Le piquet
de grève était de 40.000 travailleurs du géant
des télécommunications Verizon, en lutte pour obtenir
la convention collective refusée obstinément par le
patronat, et le candidat était –évidemment-
Bernie Sanders. Coup de pub électoral ? De la démagogie
? Du « populisme » ? Rien de tout ca, tout simplement
cohésion et continuité d’une vie passée
aux cotés des travailleurs. D’ailleurs, la dernière
fois que Sanders avait fait exactement la même chose, c’était
il y a seulement quelques mois, en octobre passé, à un
autre piquet de grève, toujours a Manhattan"[10].
Même
si sa vision du "socialisme" évoque l’ancien
premier ministre suédois (1969-1976 puis 1982-1986)
Olof Palme, cet ancien militant de la Ligue des Jeunes
Socialistes (YPSL) et de la lutte pour les droits civiques, contre la
guerre du Vietnam, enregistre en 1979, pour le compte du label
Folkway Records, les discours de celui qui fut cinq fois candidat du
Parti socialiste d’Amérique à l’élection
présidentielle, Eugene V. Debs. Il donne ainsi une
seconde jeunesse à des déclarations telles que "Je
ne suis pas un soldat capitaliste, je suis un révolutionnaire
prolétarien" ou "Je suis opposé à
toutes les guerres à l’exception d’une seule".
Des professions de foi à contre-courant dans un pays qui se
prépare à embrasser la contre-révolution
reaganienne"[11].
Et M. Sanders décrit sa candidature comme une tentative
d'en finir avec la dispersion des forces de gauche étatsuniennes :
"Si
je me présente, c’est pour contribuer à former
une coalition qui peut l’emporter, qui peut transformer la
politique"
[12].
La
référence osée de Bernie Sanders à Eugène
Debs indique que sa candidature annonce tout simplement la reprise de
la lutte des classes aux USA. En effet Eugène Debs est un
bolchevik à propos duquel Lénine a écrit : "Je
me rappelle aussi les paroles d'Eugène Debs,
un des chefs les plus aimés du prolétariat américain,
qui écrivait dans l'Appel
à la Raison
(Appeal
to Reason)
-
à
la fin de 1915, je crois - dans son article "What
shall I fight for"
("Pour
quoi je me battrai"),
(j'ai cité cet article au début de 1916 dans une
réunion publique ouvrière tenue à Berne, en
Suisse), - que lui, Debs, se ferait fusiller plutôt que de
voter des crédits pour la guerre actuelle, criminelle et
réactionnaire ; que lui, Debs, ne connaissait qu'une seule
guerre sainte et légitime aux yeux des prolétaires : la
guerre contre les capitalistes, la guerre pour affranchir l'humanité
de l'esclavage salarié"
(Lettre
aux ouvriers américains, "Pravda" n° 178, 22
août 1918).
On
comprend qu'un tel candidat ait été vilipendé et
que l’on ait usé de la fraude pour imposer la libérale
et criminelle H. Clinton, laquelle va perdre justement les fameux
"Etats clefs" face à Trump après les avoir
perdu face à Sanders lors des primaires.
Et
une étape de plus sur le chemin de la révolution
socialiste-communiste aux USA
L'imaginaire
qui a été construit par la toute puissance de
"l'american way of life" est que la révolution
communiste est "impossible" aux USA. Même des
militants se réclamant du communisme s'y sont laissé
prendre. Trop souvent, on réduit les luttes sociales aux USA
aux luttes des minorités nationales, amérindiennes,
noires ou hispaniques en érigeant ainsi le racisme, la
ségrégation raciale comme une muraille de Chine
infranchissable entre les minorités nationales et la majorité
"white".
La
division raciale a été instrumentalisée par le
capitalisme US pour empêcher l'unité des travailleurs.
Les USA ont été historiquement le laboratoire le plus
abouti pour la mise en pratique du principe "diviser pour mieux
régner". A la base de cette stratgégie historique,
il y a le fait que le capitalisme US s'est bâti sur deux
piliers: l'exploitation de classe et l'oppression nationale
génocidaire des Amérindiens d’une part,
l'esclavage des Noirs et la ségrégation raciale des
Noirs, des hispaniques, des Asiatiques, etc. d’autre part.
Les
luttes justes pour les Droits civiques, pour l'égalité
des droits contre le racisme d'Etat US ont été
confinées dans une optique de démocratisation non
racialisée du système capitaliste et impérialiste.
C'est l'idéologie social-démocrate des "réformes
humanisantes" qui a prévalu et non celle de la révolution
anti-capitaliste, y compris même chez les plus radicaux des
mouvements anti-racistes aux USA. C'est pourquoi le mouvement des
Droits civiques a débouché, au mieux, sur l'émergence
d'une "classe moyenne", voire d'une bourgeoisie Noire et
Hispanique.
Le Parti
Communiste des USA a été miné, sous Forster et
Lovestone, par les effets de cette stratégie de la bourgeoisie
étatsunienne et s'est ainsi embourbé dans l'incapacité
de lier luttes sectorielles justes démocratiques des minorités
opprimées et luttes générales de l'ensemble du
mouvement ouvrier, uni pour renverser le capitalisme. Rappelons que
la "commission Noire" de l'Internationale Communiste a
produit des documents d'un intérêt majeur sur la
"question nationale noire aux USA et en Afrique du Sud" en
1928 qui restent de nos jours d’une grande actualité.
C'est la déviation opportuniste vis à vis de ces
documents qui a conduit à l'effacement progressif du rôle
dirigeant des communistes dans les luttes contre l'apartheid US, qui
a favorisé l'hégémonie des Garveyistes, puis de
Martin Luther King, des Black Panthers et même de Malcom X. On
sait ce qu’il est advenu: assassinats de Martin Luther King et
de Malcom X, emprisonements et exils forcés, etc , et, à
partir de là, intégration d'une "classe moyenne"
qui est devenue la face visible mais trompeuse de "l'american
way of life".
Il est
significatif que le Washington Post ait attaqué Bernie Sanders
lui reprochant de ne pas savoir "parler
des questions de race sans tout ramener à la classe et à
la pauvreté"
[13]. Le comité de
rédaction de ce journal des milliardaires pro - parti
"Démocrate" explique que "le
système – et par là nous entendons la structure
constitutionnelle d'équilibre des pouvoirs – implique
que les législateurs se contentent de changements graduels. M.
Obama a orchestré plusieurs réformes ambitieuses,
certes incomplètes, mais qui ont amélioré la vie
des gens pendant que les idéologues des deux camps se
gaussaient"
[14] . Accusant Sanders et
Trump de mener "une
bataille des extrêmes",
le journal conclut : "Le
progrès viendra de dirigeants qui ont des principes mais qui
sont prêts à bâtir des compromis, qui acceptent le
changement graduel, qui admettent ne pas avoir le monopole de la
sagesse"
[15].
Ces
sorties sur le "gradualisme" expriment en réalité
la peur de la bourgeoisie de la convergence des préoccupations
prioritaires qui se manifeste dans les urnes entre votes des
"Whites", des "Noirs" et des Hispaniques dans les
deux directions, celle de Trump et celle de Sanders. En effet les
votes, bien que différents, expriment une préoccupation
majeure principale: il nous faut du boulot, il nous faut avec nos
familles pouvoir se soigner, aller à l'école et se
loger décemment.
C'est la
base d'une jonction entre luttes sectorielles contre les
discriminations raciales, linguistiques, culturelles, religieuses et
luttes globales contre le système capitaliste. Voilà ce
qui inquiète les milieux bourgeois des USA.
L'élection
d'Obama est, sur le fond, l'expression des luttes sectorielles contre
l'oppression nationale dans le cadre de la recherche d'une
solution globale à la paupérisation globale et celle de
Trump exprime la "revanche des Whites" mais toujours dans
le cadre d'une recherche de solution à la paupérisation
globale.
C'est en
cela que la double expérience Obama et Trump est porteuse
d'une équation qui ne peut être résolue que par
la réovlution socialiste communiste parce que le déclin
de l'impérialisme a atteint un tel degré de
pourrissement et de putréfaction que le besoin du facteur
subjectif, c'est à dire le Parti Communiste, apparaît
comme une nécessité impérieuse, pratique et
concrète.
C'est donc à la
combinaison de la contradiction capital-travail et de la
contradiction entre le capitalisme et l'oppression des minorités
nationales aux USA que pensait certainement Fidel Castro quand il
déclarait : "On verra une révolution
victorieuse aux Etats-Unis avant une contre révolution
victorieuse à Cuba" (13
mars 1961, un mois avant l'agression US de la Baie des cochons).
Le déclin des
USA, impérialisme dominant surtout depuis 1945, est aussi un
facteur qui impulse la montée des contradictions
inter-impérialistes avec l'UE sous domination allemande. Cette
contradiction, insidieuse jusqu'ici, commence à se manifester
de plus en plus ouvertement avec l'élection de Trump.
Insidieuse parce que deux rapports du Pentagone donnaient des
indications sur « les
voies et moyens de dissuader toute nation ou groupe de nations de
concurrencer les USA»[16].
Et le sénateur US David L. Boren, président de la
commission chargée des questions de renseignement déclarait
assez prophétiquement :
« nous
avons eu des relations étranges et symbiotiques avec l'URSS
(...). Le déclin de l'Union Soviétique (...) pourrait
tout aussi bien entraîner le déclin des Etats-Unis (…).
Les pays européens, le Japon et d'autres pays ont volontiers
accepté la direction américaine au cours des décennies
passées. Pourquoi ? Parce qu'ils avaient besoin de nous (…).
Seront-ils désireux, dans ce nouveau contexte, d'accepter la
direction des Etats Unis comme c'était le cas il y a quelques
mois ? Je ne le pense pas » (idem).
Toutefois,
disons le tout net: si ce qu'annonce la candidature de Sanders ne se
réalise pas à moyen terme, la menace d'une guerre
mondiale plane sur nos têtes. En effet l'hégémonie
mondiale multiséculaire de l'impérialisme occidental ne
peut être préservé à terme qu'au prix de
la guerre contre la Russie bourgeoise et la Chine rescapée de
la défaite du camp socialiste. Il n'est point besoin de
développer outre mesure les conséquences pour
l'humanité d'une telle persepctive.
Alors,
en cette veille du 100ème anniversaire de la Révolution
d'Octobre 1917, au boulot camarades! L'avenir communiste inévitable
de l'humanité réside dans la capacité des
communistes dans chaque pays à mettre en pratique la devise
plus que jamais d'actualité: Prolétaires
de tous pays et peuples opprimés, unissez vous!
[1]
Université
de Sherbrooke
[2]
entretien
avec le Washington Post
[4]
Le
Figaro.fr avec AFP 23/03/ 2015
[5]
K.
Marx, Livre III du capital
[7]
F.
Engels,
Anti-dürhing
[8]
K.
Marx,
Le
18 Brumaire de Louis Bonaparte
[11]
Monde
Diplomatique janvier 2016
[13]
Monde
Diplomatique, décembre 2016
[16]
Monde
Diplomatique avril 1991
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