La dissolution de l’Internationale Communiste
Le
rapport de force actuelle dans le monde, caractérisé
par une victoire des forces capitalistes sur de nombreux terrains
d'affrontements de classe nationaux et internationaux, met à
l'ordre du jour la question du bilan du Mouvement Communiste
International.
Cette
préoccupation est à la fois légitime, nécessaire
et urgente. De la réponse apportée dépend en
effet notre capacité à reconstituer les partis dont le
prolétariat et les peuples opprimés ont besoin. Cette
question centrale et cruciale doit être abordée avec
sérieux, sans précipitation dans les conclusions et à
partir de la méthode d'analyse que constitue le matérialisme
dialectique.
1)
L’Etat des analyses sur la question
Outre
les propos haineux, revanchards et sans cohérence de la
bourgeoisie, quatre types d'analyses ont été exprimés
sur la question des défaites du camp socialiste au 20ème
siècle:
1)
Les analyses trotskistes basées sur l'affirmation d'un coup
d'Etat stalinien ayant eu pour résultat la prise du pouvoir
par la bureaucratie et la mise en place d'un « Etat
ouvrier dégénéré » dans les
années 20. La multiplicité des tendances trotskistes
donne par la suite une diversité sur la date du coup d'Etat et
sur les appellations du système qui en est issu. Certains
l'appellent « Etat ouvrier dégénéré »
ou encore « capitalisme d'Etat ».
2)
Les analyses maoïstes basées sur l'affirmation d'un coup
d'Etat khrouchtchévien, suite auquel le socialisme se
transforme en « capitalisme d'Etat » et en
« social-impérialisme ».
3)
Les analyses que nous appellerons semi-trotskistes considérant
que la tactique du Front Populaire défendue et mise en place
par le septième congrès de l'IC, est à l'origine
d'une capitulation du MCI devant l'impérialisme. Pour la
plupart des tenants de cette position, c'est « l'imposition »
par l'URSS au MCI d'une position visant à défendre
« ses propres intérêts internationaux »
qui a conduit à une politique droitière, là où
selon eux la tactique « classe contre classe »
des congrès antérieurs du MCI devait être
maintenue.
4)
Dernier type d'analyse plus récente enfin, considérant
que c'est la dissolution de la Troisième Internationale qui
est le signe de défaite du MCI. Là encore l'argument
« d’imposition » par l'URSS d'une
position « étroitement nationale » est
le plus souvent cité, la dissolution de l'IC étant le
prix payé par l'URSS et Staline à l'ouverture d'un
second front par les USA et les Anglais.
Pour
les raisons de l'analyse nous avons séparé ces quatre
types de position. Dans la réalité existe toute une
série d'argumentations articulant plusieurs d'entre elles,
voire les quatre.
Ainsi
certains peuvent considérer que la prise du pouvoir par la
« bureaucratie stalinienne » signifie l'abandon
de toute perspective de révolution internationale, conduisant
à une politique de défense des intérêts de
l'URSS au détriment du MCI, qui se caractérise
définitivement par la « tactique droitière »
du 7ème Congrès, avec comme aboutissement ultime la
dissolution de l'IC (articulation des analyses 1,3,4). Paradoxalement
le mouvement trotskiste défendant ces points de vue, considère
le passage de Khrouchtchev au pouvoir comme positif dans la mesure où
il dénonce le « stalinisme ». Pour
d'autres, rejetant les analyses trotskistes, c'est la tactique du
front populaire qui conduit à un repli, débouchant sur
la capitulation que serait la dissolution de l'IC (articulation des
analyses 3 et 4). D'autres articulations existent, mais il ne s'agit
pas ici de répondre à toutes les nuances, mais de
montrer les insuffisances de ce type de bilan, leur fausseté
et les dangers qu'il comporte. Nous avons rencontré en effet
des militants sincères, notamment au sein du PCF, attirés
par ces explications. Et même des organisations
marxistes-léninistes se laissent prendre par celles ci.
Ainsi
pour le Regroupement Communiste: « Après la
phase de repli du front populaire, marquée par un abandon que
l'on aurait pu penser transitoire de la lutte pour le pouvoir, la
dissolution de l'IC a été une étape cruciale
dans cette évolution. Dissoudre l'IC, c'était
s'inscrire dans la défaite » (Lettre de
Regroupement Communiste au Cercle Henri Barbusse). Le même type
de position est défendu par le PC Japonais (gauche) depuis
1983: « Dans les années 30 avec l'approche du
danger d'une deuxième guerre mondiale la tendance au
nationalisme commença à lever la tête au sein du
PCUS. Cela signifia la déviation par rapport à la
position de la révolution prolétarienne mondiale et
l’internationalisme, tout en plaçant la défense
de l'Union Soviétique par dessus tout et en lui subordonnant
les luttes révolutionnaires jusqu'à ce que finalement
il soit dissout » (in Bulletin International
N°68-70 de 1983). Sans amalgamer, force est de constater que cet
argumentaire était jusqu'ici le domaine réservé
des organisations trotskistes. Ainsi le groupuscule « Bolchevik »
considère que le « 7e Congrès de l'IC en
juillet 1935 a définitivement et officiellement rejeté
le léninisme et l'internationalisme en adoptant une ligne
opportuniste et social-chauvine d'unité avec la bourgeoisie
« démocratique », avec les
social-démocrates chauvins de la 2ème Internationale »
(la Nouvelle Internationale N°1-1977). Sans amalgamer, nous
tenons à souligner le danger de conclusions hâtives et
la nécessité d'une analyse scientifique. En effet, la
pression idéologique bourgeoise et impérialiste est
telle, et la déroute de nos forces est si grande, que le
subjectivisme risque d'entraîner dans des conclusions qui
rejoignent de très anciennes analyses de la bourgeoisie.
C'est
le subjectivisme qui fait rechercher dans un événement
marquant l'origine de la défaite en le coupant des processus
et des contextes qui l'éclairent et l'expliquent.
Ainsi
sur les uns, c'est l'arrivée de Khrouchtchev, de Staline pour
d’autres, le 7ème congrès pour certains, la
dissolution de l'IC sur les derniers. Une fois ce pas franchi,
d'autres, inévitables, s'en suivent dans la mesure où
la négation des processus et contextes consiste à
entrer dans le mode d'analyse bourgeois qui de fil en aiguille
conduit à la négation de la possibilité même
du socialisme. De l'analyse ciblant la dissolution de l'IC comme
origine de la défaite et comme soumission des intérêts
du MCI à ceux de l’URSS, on en arrive à
rechercher les phénomènes antérieurs pour en
conclure logiquement que le 7ème congrès de l'IC
correspondait aux intérêts de l'URSS et était
contraire à ceux du MCI; en définitive on rejoint la
thèse trotskiste d'une trahison par l'URSS et Staline de la
révolution mondiale par l'instauration du socialisme dans un
seul Pays.
2)
La lettre contre l’esprit de la science marxiste-léniniste
C'est
l'essence de l'éclectisme qui mène à
l'utilisation de certaines thèses et analyses communistes en
1’isolant de leur contexte. Quelques exemples: Du fait que la
lutte du prolétariat est éminemment internationaliste,
l'éclectisme en conclut au caractère réactionnaire
de toutes les luttes nationales et de toute question nationale. Il
s'appuiera pour cela sur la formule de K. Marx : « Les
prolétaires n’ont pas de Patrie, on ne peut leur ravir
ce qu’ils n'ont pas ». Et il oublie de resituer
cette affirmation dans la suite de l'analyse de Marx et Engels, qui
précisent: « Comme le prolétariat de
chaque pays doit en premier lieu conquérir le pouvoir
politique, s'ériger en classe dirigeante de la nation, devenir
lui même la nation, il est encore par là national,
quoique nullement au sens bourgeois du mot »
(manifeste du Parti Communiste). De même, analysant les travaux
du 7ème Congrès de l'IC, l'éclectisme retiendra
certains aspects et en éliminera d'autres.
Il
soulignera, par exemple, le passage de la tactique classe conte
classe à celle du front populaire en s'appuyant sur les propos
de Dimitrov: « Aujourd'hui dans une série de
pays capitalistes, les masses travailleuses ont à choisir
concrètement, pour l'instant présent, non entre la
dictature du prolétariat et la démocratie bourgeoise,
mais entre la démocratie bourgeoise et le fascisme »
(discours de clôture du 7ème Congrès). Il oublie
simplement, cet éclectisme, que Dimitrov resitue cette analyse
dans une réalité complexe et contradictoire, puisqu'il
continue en citant Lénine: « Ce serait une
erreur radicale de croire que la lutte pour la démocratie est
susceptible de détourner le prolétariat de la
révolution socialiste, ou de la masquer, de la voiler etc. Au
contraire, de même que le socialisme victorieux est impossible
sans réaliser la démocratie complète, de même
le prolétariat ne peut se préparer à vaincre la
bourgeoisie sans une lutte acharnée, conséquente
et révolutionnaire pour la démocratie »
(Lénine T22-cité par Dimitrov).
Dernier
exemple enfin, c'est celui de la dissolution de l'IC. L'analyse
éclectique s'arrêtera sur le lien évident entre
la dissolution et l'ouverture du second front, en oubliant tous les
autres aspects de cette décision, dont notamment le caractère
même de la guerre. Affirmer l'existence d'un lien n'est en
effet qu'un constat évident puisque Staline lui même dès
le 28 mai 1943 le dit explicitement: « Il me semble que
la dissolution de l'IC est parfaitement opportune, car précisément
maintenant, quand le fauve fasciste tend ses dernières
énergies, il est nécessaire d'organiser l'assaut commun
des pays épris de liberté afin d'en finir avec lui et
libérer les peuples de l'oppression fasciste »
(Réponse à l'agence Reuter-28/05/43). Isoler cet aspect
de la décision d'un contexte général marqué
par des négociations entre les nazis et les forces
Anglo-américaine afin d'obtenir un retournement d'alliance
d'une part et par un MCI confronté à des
situations multiples et diverses selon les pays - certains
étaient occupés d'autres étaient alliés
des nazis, d'autres encore étaient libérés ou en
voie de l'être par les Anglo-américains, certains partis
œuvraient dans des pays où la bourgeoisie avait fait des
choix différents pour ou contre les nazis (collaboration,
résistance, double jeu...) - d'autre part, c'est en fait se
condamner au subjectivisme et à une incapacité nette à
l'analyse concrète d'une situation concrète.
La
forme de l'organisation des communistes n'est pas une réalité
figée et immuable, mais évolue en fonction des besoins,
des tâches concrètes, de la situation concrète de
la lutte des classes et du rapport des forces auxquels sont
confrontés le prolétariat et son avant-garde. Ne pas
prendre en compte ces aspects, c'est se condamner à ne pas
comprendre pourquoi Marx et Engels participent à la création
de la première Internationale puis font tout pour la
dissoudre, pourquoi la deuxième Internationale débouche
sur une analyse chauvine et opportuniste, pourquoi Lénine
préconise une première forme d'organisation autour d'un
journal (l'Iskra), puis le parti avec droit de tendance, et
enfin le parti Bolchevik qui « s'épure de ses
éléments opportunistes ». Bref, quelle que
soit l'appréciation que l'on porte sur l'opportunité de
la dissolution de 1'IC, il est erroné, anti-scientifique et
non dialectique de voir dans un tel acte la cause de la
« dégénérescence et de la défaite »
du MCI. Ce sont des facteurs objectifs (l'impérialisme) et
subjectifs (le révisionnisme) qui dans chaque pays et dans
chaque parti, ont été déterminant dans
l'évolution opportuniste et révisionniste que nous
avons constaté dans le MCI. De même, il est erroné
d'attendre de la création d'une nouvelle Internationale la
résolution « miraculeuse » de toutes les
dérives et déviations qui ont conduit à la
défaite actuelle. Au contraire, c'est lorsque le processus de
lutte contre ces déviations aura progressé dans un
certain nombre de pays et d'organisations communistes, qu'une
nouvelle Internationale sera possible et réalisable.
3)
Le marxisme-léninisme et l’organisation des communistes
La
question de l'organisation a été posée au
prolétariat bien avant l'apparition du Marxisme. L'avènement
du capitalisme avec la contradiction fondamentale
bourgeoisie/prolétariat posait tout simplement cette
nécessité, car comme le dit Lénine, le
« prolétariat n'a d'autre arme dans sa lutte que
l'organisation ». La question des formes de
l'organisation du prolétariat dès lors s'est posée
en fonction du niveau de conscience politique des nécessités
du moment, des objectifs que la classe ouvrière se fixait et
le rapport des forces de classe. Ainsi Karl Marx analysant le
développement des sociétés secrètes comme
forme d'organisation du prolétariat les relie à
l'évolution de la situation objective: « L'échec
de la révolution de 1848-1849 avait fait perdre au parti
prolétarien, sur le continent, tout ce qu’il avait à
titre d'exception, c’est à dire les moyens légaux
de l'organisation de parti (...) Le parti prolétaire, après
1849 comme avant 1848, n 'avait à sa disposition qu’un
seul moyen: l'association secrète » (Marx,
Révélation sur le procès de Cologne).
Pour
K. Marx, ce n'était pas seulement la forme mais également
les objectifs de l'organisation qui dépendaient de « l'analyse
concrète d'une situation concrète »:
« Certaines de ces sociétés secrètes
poursuivaient directement le renversement du pouvoir existant. Cette
tactique était justifiée en France où le
prolétariat avait été vaincu par la bourgeoisie
et où la lutte contre le gouvernement du jour se confondait
directement avec la lutte contre la bourgeoisie. D'autres sociétés
secrètes se proposaient d'organiser le prolétariat en
parti, sans se soucier des gouvernements existants. Cette tactique
était nécessaire dans des pays comme l'Allemagne où
la bourgeoisie et le prolétariat étaient tous deux
assujettis à leurs gouvernements mi-féodaux »
(idem p.187).
a)
La
première Internationale
Pour
saisir les positions de K. Marx et F. Engels, il faut garder en tête
l'état du prolétariat de 1'époque et l'état
de ses organisations. Ecoutons K. Marx à propos de la minorité
de la Ligue des Communistes qui ne tenait pas compte de ces
éléments pour déterminer les formes et les
objectifs de l'organisation: « A la place de la
conception critique, la minorité met une conception dogmatique
et à la place de la conception matérialiste, une
conception idéaliste. Au lieu de la situation réelle,
c'est la simple volonté qui devient la force motrice de la
révolution. Nous, nous disons aux ouvriers : « Vous
avez à traverser 15, 20, 50 ans de guerres civiles et de
luttes internationales, non seulement pour changer la situation
existante, mais pour vous changer vous- mêmes et vous rendre
aptes au pouvoir politique ». Et vous, vous leur dites au
contraire : «Il nous faut immédiatement arriver au
pouvoir ou bien nous n'avons qu’à dormir sur nos deux
oreilles ». Tandis que nous, nous faisons tout
spécialement remarquer aux ouvriers allemands l'état
informe du prolétariat allemand, vous, vous flattez de la
façon la plus grossière le sentiment national et le
préjugé corporatif des artisans allemands, ce qui est
évidemment plus populaire. De même que les démocrates
ont fait du mot peuple (démos) une entité sacrée,
vous faites, vous, une entité sacrée du mot
prolétariat. Tout comme les démocrates, vous substituez
à l'évolution révolutionnaire la
phraséologie révolutionnaire » (idem
p.107).
Ce
propos de K. Marx à l'égard des « gauchistes »
allemands d'alors et à propos de la situation concrète
allemande était également valable à l'échelle
de l'Europe. Foisonnaient à cette époque toutes sortes
d'idéologies prétendant libérer le prolétariat:
Corporatisme, Coopératisme, anarchisme, socialisme utopique...
se traduisant dans une multitude d'organisations (Trade Unions,
Coopératives, sectes, associations secrètes...). C'est
donc à partir d'une telle réalité que Marx et
Engels défendent la Première Internationale dont la
fonction est de permettre la communication et la coopération
entre toutes les organisations ouvrières. L'objectif n'était
donc pas la création d'une organisation centralisée de
combat, mais de faire comprendre aux ouvriers l'identité de
leur intérêt de classe, de leur lutte, du caractère
commun de leurs conditions et de leur mission historique dans la
nouvelle société bourgeoise. L’article premier
des statuts de l'AIT déclare: « L'association est
établie pour créer un point central de communication et
de coopération entre les sociétés ouvrières
des différents pays aspirant au même but, savoir: le
concours mutuel, le progrès et le complet affranchissement de
la classe ouvrière ».
Cet
article premier est en retrait par rapport aux positions annoncées
par Marx dans le Manifeste du PC en 1848, mais c'est, là
aussi, le résultat d'une analyse de la situation: « Il
lui fallait un programme qui ne fermait pas la porte aux Trade Unions
anglaises, aux allemands, français, belges, italiens et
espagnols, ni aux Lassaliens allemands » (préface
à l'édition allemande du Manifeste en 1880).
Le
travail gigantesque de Marx et Engels a permis de clarifier la
situation, de rallier les meilleurs révolutionnaires, en
défaisant idéologiquement et politiquement les courants
hostiles et surtout les anarchistes bakouninistes. La première
Internationale devait acquérir ainsi une réelle
reconnaissance et autorité auprès de la classe ouvrière
européenne. Mais par suite de cette défaite
idéologique, les courants petit-bourgeois antimarxistes se
mirent à utiliser l'AIT pour affirmer et diffuser leurs vues
erronées en se parant de son prestige. Marx et Engels menèrent
alors le combat pour mettre en veilleuse l'AIT en transférant
son siège à New York: « Nous savions très
bien que la vessie devait éclater. Un ramassis de toute sorte
s’y collait. Les sectaires qu’elle contenait se faisaient
insolents et abusaient de l'Internationale dans l'espoir qu’on
leur permettait les pires sottises et bassesses. Nous ne le tolérâmes
pas (...) Si nous avions agi à la Haye dans un esprit de
conciliation, si nous avions empêché la scission de se
produire, quelles auraient été les conséquences?
Les sectaires, c'est à dire les bakouninistes, auraient eu un
an de plus pour commettre au nom de l'Internationale des sottises et
des infamies bien encore » (lettre d'Engels à
Bebel du 20/06/1873). K. Marx revient plus précisément
sur la question de l'organisation : « Selon mon opinion
sur les conditions européennes, il est absolument utile se
faire pour le moment passer l'organisation formelle de
l'Internationale à l'arrière plan »
(lettre à Sorge du 27/09/1873).
Mais
cette mise en veilleuse de l'AIT ne suffit pas pour en finir avec les
manœuvres des anarchistes. Alors Marx et Engels n'hésitent
plus à lutter pour sa dissolution: « La vieille
Internationale est complètement réglée et finie.
Et c’est une bonne chose. Elle appartenait à la période
du second empire où l'oppression qui régnait dans toute
l'Europe prescrivait au mouvement ouvrier qui venait de se réveiller,
unité et abstention de toute polémique intérieure
(...) pour susciter une nouvelle Internationale à la mode
ancienne, une alliance de tous les pays, il aurait fallu un
éclatement général du mouvement ouvrier, tel
qu’il avait régné de 1849 à 1864 (...) Je
crois que la prochaine Internationale sera nettement communiste et
arborera nos principes » (lettre à Sorge
d'Engels du 17/09/1874).
Remarquons
qu'Engels fait sans cesse référence aux facteurs
matériels et aux conditions concrètes. Il est encore
plus précis lorsqu'il répond sur la question de la
dissolution ou du maintien d'une organisation internationale:
« Lorsque les circonstances ne permettent plus à
une association d'agir efficacement, lorsqu’il s'agit d'abord
de maintenir simplement le lien d'union pour qu'à l'occasion
il puisse être utilisé encore, il se trouve toujours des
gens incapables de d'accommoder de cette situation, qui veulent
absolument jouer le rôle de busy body (mouche du coche)
en réclamant qu'on fasse quelque chose, lequel quelque chose
ne saurait être ensuite qu'une bêtise »
(idem). Bien entendu et comme on l'entend aujourd'hui en ce qui
concerne la Troisième Internationale, Marx et Engels ont été
qualifiés de « traîtres » et la
dissolution de l'AIT de « défaite »,
sans que cela ne change d'un iota leur position, qui résultait
encore une fois de « l'analyse concrète d'une
situation concrète »: « La suite des
événements a prouvé combien cette décision,
alors et depuis souvent critiquée, était juste. D'une
part on coupait court à toute tentative de se livrer au nom de
l'Internationale à des putschs inutiles. D'autre part la
continuation des rapports étroits entre les pays ouvriers
socialistes des différents pays prouva que la conscience de la
communauté d'intérêt et de la solidarité
du prolétariat de tous les pays, éveillée
par l'Internationale s'est imposée aussi sans l'existence
formelle d'une association Internationale dont les liens étaient
devenus pour le moment une chaîne » (K. Marx,
1877).
La
première Internationale, après avoir accompli l'immense
tâche de clarification idéologique et politique, après
avoir formulé les bases pour que se développent
d'authentiques partis prolétariens, était jugée
par ses fondateurs dépassée et devant être
dissoute.
b)
La
deuxième Internationale
La
deuxième Internationale regroupe un nombre important de partis
socialistes et ouvriers et effectivement comme l'avaient prévu
Marx et Engels, se revendique tous des thèses du Manifeste du
PC de 1848. Elle naquit à Paris en 1889 et porta une attention
particulière à la question de la guerre jusqu'au 1914.
Si l'unité idéologique et politique semble plus forte,
la forme organisationnelle reste, elle, sensiblement la même
que la première Internationale, en particulier sur la
réaffirmation du caractère indépendant de chaque
parti et le droit de ne pas appliquer les décisions
majoritaires votées par les congrès et rencontres
internationales. Là encore il faut relier cette organisation
au contexte d'expansion et d'essor formidable du capitalisme en passe
d'atteindre son stade suprême à la fin du 19ème
siècle et au début du 20ème siècle: « La
deuxième Internationale a fait un travail utile d'organisation
des masses prolétariennes pendant la longue « période
pacifique » du pire esclavage capitaliste au cours du
dernier tiers du 19ème siècle et au début du
20ème siècle » (Lénine, in
Premier Congrès de l'IC, 01/11/1919). Lorsqu'éclata la
première guerre impérialiste mondiale, la IIème
Internationale vola en éclat, chaque parti se mettant à
la remorque de sa bourgeoisie et appelant les ouvriers à se
tirer les uns sur les autres. La IIème Internationale est née
dix ans après la Commune héroïque lors de laquelle
l'anarchisme avait montré ses limites directionnelles. En
dépit de l'important travail d'organisation des masses
ouvrières avec la naissance et le développement de
grands partis nationaux, la IIe Internationale organisée sur
le primat du facteur national sur le facteur international, va se
révéler dépassée par le développement
du capitalisme en impérialisme. Or le facteur international
devenait essentiel entraînant la nécessité de
« rompre la chaîne impérialiste à son
maillon le plus faible » et exigeant une organisation
adéquate du prolétariat. En effet un cap qualitatif
était franchi tant dans le fonctionnement du capitalisme que
dans les besoins organisationnels du prolétariat sur le plan
international et national (voire les luttes entre bolcheviks et
mencheviks en Russie). C’est ce qui fait dire à Lénine
bien avant la révolution d'octobre et la création de la
IIIème Internationale : « La tâche de la
IIIème Internationale sera de préparer le prolétariat
à la lutte révolutionnaire contre les gouvernements
capitalistes, à la guerre civile contre la bourgeoisie de tous
les pays, en vue de la prise des pouvoirs publics et de la victoire
du socialisme » (le 01/11/1914). Ne nous attardons pas
trop longtemps sur cette Internationale qui est tombée en
faillite, corrompue par la « longue période
pacifique du parlementarisme bourgeois » et par
l'impérialisme, car sa fin honteuse fait qu'elle n'est pas
l'objet de regrets, ni de polémiques dans le MCI.
c)
La
troisième Internationale
Résultat
de l'analyse léniniste de l'impérialisme, la IIIème
Internationale revêt des objectifs et une forme
organisationnelle fort différents des deux précédentes.
Contrairement à elles, en effet elle pose immédiatement
le primat du facteur international sur le facteur national et le
principe qui en découle de « la subordination
des intérêts du mouvement dans chaque pays aux intérêts
communs de la révolution à l'échelle
internationale » (lettre d'invitation au premier
Congrès de l'IC).
Tous
les congrès de l'IC confirment ce principe : « Cette
discipline communiste internationale doit se traduire par la
subordination des intérêts généraux et
permanents et par la stricte application de toutes les décisions
des organes dirigeants de l'IC par tous les communistes »
(VIème congrès de l'IC).
Et
pourtant la forme organisationnelle de l'IC a évolué;
créée à initiative du PC(b)US, elle adopte les
principes léninistes sur le programme, la stratégie, la
tactique et l'organisation. En matière organisationnelle,
Lénine défendait le point de vue d'adopter des formes
d'organisation et des méthodes de travail suivant la situation
concrète. C'est donc à partir des conditions de la
lutte de classe caractérisée par l'offensive du
prolétariat révolutionnaire et des tâches
politiques qui en découlent que s'est élaborée
et s'est décidée la forme d'organisation de l'IC. Le
Xème congrès du PC(b)US qui se tint du 8 au 16 mars
1921, dirigé par Lénine lui -même, arrêta
les principes léninistes en la matière:
1)
« Le parti du marxisme révolutionnaire rejette
catégoriquement toute recherche d'une forme d'organisation du
parti et de méthodes de travail, absolues et valables pour
toutes les étapes du processus révolutionnaire. Au
contraire, la forme d'organisation et les méthodes de travail
sont entièrement fonction des particularités d'une
situation historique concrète et des tâches que cette
situation impose » (résolution sur
l’édification du parti - Xème congrès). Il
n'existe donc pas de forme organisationnelle éternelle et
indépendante des situations concrètes, elle n'est pas
une fin en soi, mais un moyen pour mener la lutte de classe et doit
donc évoluer en fonction des besoins de celle-ci. Plus précise
encore, la résolution explique qu'au contraire une forme
organisationnelle inadéquate est une entrave au développement
du mouvement révolutionnaire et à l'accomplissement de
la tâche du moment:
2)
« De ce point de vue l'on comprend qu’avec le
changement des conditions objectives du développement de la
révolution, toute forme d'organisation et les méthodes
de travail correspondantes peuvent, de facteur de développement
de l'organisation du parti, devenir une entrave pour ce
développement; et vice versa : une forme d'organisation
périmée peut redevenir indispensable, seule
rationnelle, avec la réapparition des conditions objectives
appropriées » (idem).
Ce
point 2 de la résolution est essentiel à l'étape
actuelle où les forces communistes connaissent une défaite
importante et où est reposée la question des formes
organisationnelles nouvelles, que ce soit au niveau
international ou au niveau national. La question de
l'adaptation des formes organisationnelles à l'état
réel du mouvement communiste aujourd'hui, aux besoins de la
lutte de classe et aux tâches qui en découlent est de
nos jours fondamentale. La résolution propose également
des critères pour déterminer le moment où une
forme d'organisation est dépassée et doit disparaître:
3)
« Les contradictions entre les nécessités
de la nouvelle situation en train de se créer d'une part et la
forme d'organisation établie, ainsi que les méthodes de
travail d'autre part, apparaissent généralement avant
que ne s'affirme définitivement le besoin de changer
l'orientation. Cette dernière ne doit être changée
qu’au moment où la tâche qui avait mis en avant le
type antérieur d'organisation et les méthodes de
travail appropriées est remplie dans l'ensemble, dans ses
grandes lignes, dans l'essentiel » (idem).
L'épuisement d'une forme organisationnelle particulière
est donc un processus au cours duquel émerge de nouveaux
besoins. L'ancienne forme répondant de moins en moins à
la nouvelle situation, cède la place à un certain
niveau de développement de ce processus à un changement
qualitatif qui survient ainsi comme le résultat d'une
accumulation quantitative, au delà de laquelle, la suppression
de l'ancienne forme devient nécessaire. Pour saisir si l'IC a
respecté cette méthode scientifique et ces principes en
matière d'organisation, voyons donc les principales étapes
de sa vie, leur contexte international et les tâches qui en ont
découlé.
Les
premières années : 1918-1921
La
révolution mondiale est posée comme question immédiate.
C'est la période qui va des premières initiatives en
vue de la création de l'IC au deuxième congrès
et qui est celle d'une vague révolutionnaire prolétarienne
sans précédent dans 1'histoire du mouvement ouvrier. La
révolution bolchevique victorieuse joue un rôle de
catalyseur des assauts partout en Europe du prolétariat et
suscite dans les colonies une vague importante de luttes de
libération nationale. Alors que le prolétariat et à
l'offensive, la scission du mouvement ouvrier se révèle
être la principale entrave à la révolution
mondiale.
Le
contexte et son analyse
Dès
1914, Lénine et les bolcheviks s'opposant à la trahison
social-démocrate et aux positions chauvines des principaux
dirigeants de la IIème Internationale, indiquaient la
nécessité d'un nouvel Etat-major commun de combat rendu
urgent par la vague révolutionnaire qui s'annonçait
rapidement. C'est donc dans une perspective de révolution
socialiste immédiate et européenne que se met en place
l'IC. Ces positions peuvent apparaître aujourd'hui idéalistes,
mais replacées dans le contexte d'alors de lutte
révolutionnaire insurrectionnelle et massive, elles ne sont
que les conclusions logiques d'une analyse scientifique des
contradictions du système impérialiste et du
soulèvement révolutionnaire des masses. L'ampleur de
l'offensive révolutionnaire d'alors a eu pour conséquence
la première crainte sérieuse et profonde de perte du
pouvoir par la bourgeoisie mondiale. C'est pourquoi sans doute sa
hargne haineuse à vouloir détruire le pouvoir des
soviets qui servait d'emblème et d'exemple vivant aux
prolétaires et peuples opprimés, l'a conduite à
une agression commune des belligérants impérialistes de
14-18 coalisés contre le jeune pouvoir populaire. Dans cette
période, c'est la destruction du pouvoir des soviets et la
répression des mouvements révolutionnaires à
l'échelle européenne qui sont les préoccupations
prioritaires de la bourgeoisie : « La bourgeoisie est
affolée de terreur devant le mouvement révolutionnaire
prolétarien qui grandit. Cela se comprend, parce que toute la
marche des événements depuis la fin de la guerre
impérialiste renforce inévitablement le mouvement
révolutionnaire du prolétariat et que la révolution
internationale mondiale dans tous les pays » (discours
de Lénine au premier Congrès de l'IC).
La
contradiction Bourgeoisie / Prolétariat, contradiction
centrale du mode de production capitaliste, s'articule désormais
étroitement au niveau international à la contradiction
entre pays socialiste et système capitaliste, avec pour effet
immédiat l'unité des belligérants impérialistes
pour agresser le pays des soviets sous la forme de l'intervention
armée, mais aussi une montée des luttes du prolétariat
pour la prise du pouvoir et pour soutenir le nouveau pouvoir ouvrier
et paysan en lutte contre la contre-révolution intérieure
et extérieure.
Toutefois
l'IC notait en même temps que « malgré
l'identité des lignes fondamentales de leurs politiques
impérialistes, une série de contradictions profondes se
manifestent au sein des grandes puissances qui dominent le monde. Ces
contradictions se concentrent surtout autour du programme de paix du
capital financier américain (le programme Wilson) »
(Thèse sur la situation internationale et la politique de
l'entente - premier congrès de l'IC). L'impérialisme
américain en ascension ne disposant ni de colonies, ni de la
domination maritime, est donc en contradiction avec les intérêts
de toutes les autres puissances impérialistes. Mais l'analyse
du premier congrès continue en soulignant que même par
delà cette contradiction, une autre est en développement:
« Tout en étant en contradiction avec les
intérêts de l'Amérique, les grandes puissances
ont des intérêts qui s’opposent réciproquement.
L'Angleterre craint le renforcement de la France sur le continent,
elle a en Asie mineure et en Afrique des intérêts qui
s’opposent à ceux de la France. Les intérêts
de l'Italie dans les Balkans et au Tyrol sont contraires aux intérêts
de la France. Le Japon dispute à l'Australie anglaise les îles
situées dans l 'océan Pacifique »
(idem).
A
propos de la contradiction entre le socialisme et le capitalisme,
1'IC observe : « En ce qui concerne la question Russe,
la combinaison anglo-américaine a des dispositions
tactiques, elle veut avoir les mains libres afin de pouvoir accomplir
le partage du monde, d'étouffer la révolution
Européenne et ensuite la révolution Russe »
(idem). L'IC montre aussi que du fait de « la période
pacifique de développement » qui a marqué la
fin du 19e siècle et le début du 20e siècle,
l'opportunisme a réalisé l'unité entre
bourgeoisie et prolétariat que la guerre impérialiste
et la révolution d'octobre vont briser: « Les
opportunistes qui, avant la guerre, invitaient les armées à
modérer leurs revendications sous prétexte de passer
lentement au socialisme, qui, pendant la guerre, l'ont obligé
à renoncer à la lutte de classe au nom de l'union
sacrée et de la défense nationale, exigent du
prolétariat un nouveau sacrifice, cette fois afin de triompher
des conséquences effroyables de la guerre. Si de tels prêches
pouvaient influencer les masses ouvrières, le développement
du capital se poursuivrait en sacrifiant de nombreuses générations
avec des formes nouvelles encore plus concentrées et plus
monstrueuses. Avec la perspective fatale d'une nouvelle guerre
mondiale, par bonheur pour l'humanité ce n’est plus
possible » (Manifeste de l'IC au prolétaires du
monde entier - premier congrès).
Dernière
contradiction, enfin, celle qui existe entre l'impérialisme et
les peuples opprimés: « La dernière
guerre, qui a été dans une large mesure une guerre de
conquêtes coloniales, fut en même temps une guerre faite
avec l'aide des colonies (…) Jamais encore le spectacle de la
malhonnêteté de l'Etat capitaliste dans les colonies
n'avait été aussi édifiant; jamais le problème
de l'esclavage colonial n'avait été posé avec
une pareille acuité. De là une série de révoltes
ou de mouvements révolutionnaires dans toutes les colonies »
(idem). Tel est donc le système de contradictions cerné
par le premier congrès de 1'IC. Tout converge donc vers une
révolution mondiale dont les facteurs objectifs ne cessent de
mûrir tant au plan mondial qu'au niveau de chacune des grandes
puissances impérialistes, et enfin au plan des colonies
elles-mêmes. La trahison de la 2ème Internationale
apparait d'autant plus grande qu'elle prive le prolétariat du
facteur subjectif décisif dans une révolution: LE PARTI
COMMUNISTE. C'est ce que reconstitue la 3ème Internationale,
dont l'organisation découle de cette analyse en se structurant
comme parti communiste mondial ayant pour objectif de diriger la
révolution en cours. Le 2ème congrès de l'IC
(juillet 1920) se déroule dans un contexte en évolution
rapide, mais où l'aspect de l'offensive révolutionnaire
reste encore dominant. Soulignons cependant les évolutions qui
annoncent des changements dans la perspective de la révolution
et des évolutions futures dans l'analyse: La révolution
soviétique hongroise est battue, la république ouvrière
de Bavière est défaite, la révolution allemande
commence à se diriger vers Weimar... Ces évolutions ne
changent toutefois pas le contexte et l'analyse, dans la mesure où
elles sont contrebalancées par des victoires du prolétariat
sur d'autres fronts: l'armée rouge est partout victorieuse des
blancs, de l'intervention étrangère et atteint les
portes de Varsovie, le prolétariat est en insurrection en
Allemagne, en Italie, en Espagne, dans les Balkans... Des soviets
apparaissent dans plusieurs pays impérialistes (Allemagne,
Italie, Grande Bretagne...).
L'organisation
du Parti Mondial
Si
la révolution mondiale à l'ordre du jour, si les
contradictions mondiales convergent vers la lutte pour le pouvoir
dans la plupart des pays impérialistes et dans une partie non
négligeable des colonies, l'organisation mondiale des
communistes devient non seulement possible mais absolument
nécessaire. Elle aura une forme organisationnelle la plus
centralisée possible et la discipline la plus ferme possible.
Les deux premiers congrès sont tout entier consacrés la
fois aux tâches découlant de la lutte pour le pouvoir et
aux formes que prendra le socialisme, tant sont grandes les
possibilités de victoire rapide de la révolution pour
le renversement de la bourgeoisie internationale et la création
de la république internationale des soviets, première
étape vers la suppression complète de la dictature de
la bourgeoisie.
« L'IC
considère la dictature du prolétariat comme l'unique
moyen disponible pour arracher l'humanité aux horreurs du
capitalisme et considère le pouvoir des soviets comme la forme
de dictature du prolétariat qu' impose l'histoire »
(statut de l'IC-2ème congrès).
De
cet objectif découle deux aspects: Le soutien inconditionnel
et pratique à la Russie Soviétique: « L'IC
soutient, intégralement et sans réserve les conquêtes
de la grande révolution prolétarienne en Russie, de la
première révolution socialiste victorieuse dans
l'histoire et invite les prolétaires du monde à marcher
dans la même voie ». « L’IC
s’engage à soutenir par tous les moyens qui seront en
son pouvoir toute république socialiste qui serait créée
en quelque lieu que se soit » (idem, 2ème
congrès). Le soutien aux pays socialistes est une des tâches
du prolétariat de chaque pays, dans la mesure où ses
intérêts ne peuvent être autres que ceux de la
révolution mondiale. Tout renforcement de ces pays socialistes
est une victoire de la révolution mondiale, et toute avancée
de celle - ci est une victoire des pays socialistes.
Le
caractère centralisé de l'IC: « L'IC
n'ignore pas que pour hâter la victoire, l'Association
internationale des travailleurs, qui combat pour l'abolition du
capitalisme et l'instauration du communisme, doit avoir une
organisation fortement centralisée » (idem-2ème
congrès).
L'IC
revêt à partir de là la structure suivante :
« L'IC est un parti mondial : article 3 - tous les pays
et organisations affiliés à l'IC portent le nom de
parti communiste de tel ou tel pays (section de l'IC) »
(idem -2e congrès). A sa tête se trouve le congrès
mondial: « (il) sanctionne les programmes des
différents pays qui adhèrent à l'IC. Il examine
et résout les questions essentielles de programme et de
tactique ayant trait à l'activité »
(idem, article 4). Entre deux congrès, un comité
exécutif est élu comme centre dirigeant : « (il)
dirige dans l'intervalle qui sépare les sessions des
congrès, tous les travaux de l'IC, publie, en quatre langues
au moins un organe central , publie les manifestes, qu'il juge
indispensables au nom de l'IC et donne à tous les partis et
organisations affiliées des instructions qui ont force de loi.
Le CE a le droit d'exiger des partis affiliés que soient
exclus tels groupes ou tels individus qui auraient enfreint la
discipline prolétarienne; il peut exiger l'exclusion des
partis qui auraient violé les décisions du congrès
mondial. En cas de nécessité, le CE organise, dans
différents pays, des bureaux auxiliaires techniques et autres
qui lui sont entièrement subordonnés »
(article 13). Les liens entre les sections se font sur la base du
centralisme démocratique avec interdiction de liens directs
entre sections pour toutes les questions importantes : « Il
est de règle que toutes les relations politiques présentant
une certaine importance entre les différents partis affiliés
à l'IC aient pour intermédiaire le CE de l'IC. En cas
de nécessité urgente, ces relations peuvent être
directes à la condition que le CE de l'IC en soit informé »
(article 13). Il s'agissait bien de constituer un PC mondial
centralisé et discipliné, comme l'exigeait la
révolution mondiale et les gigantesques batailles de classes
en cours, à ce moment là. Toutefois, ce parti et ses
sections se constituent à partir d'éléments qui
sont loin d'être tous communistes, avec le danger d'intégrer
en son sein des éléments opportunistes de droite ou de
gauche, de policiers ou autres éléments saboteurs.
L'élaboration
des 21 conditions d'admission à l'IC a pour objectif de
diminuer ces risques : « l'IC est menacée par
l'envahissement de groupes indécis et hésitants qui
n'ont pas encore pu rompre avec l'idéologie de la 2ème
Internationale. En outre certains pays importants dont la majorité
se place au point de vue communiste, conservent encore en leur sein
de nombreux éléments réformistes et
social-pacifistes qui n'attendent que l'occasion pour relever la tête
saboter activement la révolution prolétarienne, en
venant ainsi en aide à la bourgeoisie et à la 2ème
Internationale » (conditions d'admission des pays à
l'IC).
La
période de stabilisation relative du capitalisme : 1921-1928
C'est
la période qui couvre les 3e, 4e et 5e Congrès de l'IC.
Le 3e congrès se déroule dans un contexte où le
système de contradiction a évolué, faisant
passer la question de la révolution mondiale de question
immédiate à question de long ou moyen
terme. C'est une période de reflux relatif qui amène
l'IC à adapter son analyse à la situation et à
en déduire de nouvelles tactiques et formes d’organisation.
Le fait le plus notable est le constat d'une défaite subie par
une partie non négligeable de la vague révolutionnaire,
notamment dans les grands pays capitalistes : « Pendant
l'année qui s'est écoulée entre le 2e et le 3e
congrès de l'IC, une série de soulèvements et de
luttes de la classe ouvrière se terminent en partie par la
défaite (avance de l'armé rouge sur Varsovie en
août 1920, mouvement du prolétariat Italien en septembre
1920, soulèvement des ouvriers allemands en mai 1921) »
(Thèse sur la situation mondiale et la tâche de l'IC-
3ème Congrès). De cette défaite découle
un fléchissement de la lutte de classe qui fait dire à
l'IC « il est absolument incontestable que la lutte
révolutionnaire du prolétariat pour le pouvoir
manifeste à l'heure actuelle à l'échelle
mondiale un certain fléchissement, un certain ralentissement »
(ldem).
La
conclusion qu'en tire l'IC est que « la révolution
mondiale, c'est à dire la destruction du capitalisme, le
rassemblement des énergies révolutionnaires du
prolétariat et l'organisation du prolétariat en une
puissance agressive et victorieuse, exigera une période assez
longue de combats révolutionnaires » (Thèse
sur la tactique - 3e Congrès). Ou encore « la
révolution n'est pas un processus qui progresse en ligne
droite, c'est la dissolution lente du capitalisme, c'est la sape
révolutionnaire quotidienne, qui s'intensifie de temps à
autre et se maintient en crises aiguës » (idem).
Le
second élément de la situation est la défaite de
l'intervention étrangère et de la contre-révolution
intérieure: « Toutes les tentatives
d'interventions armées, qui ont coûté à
cette bourgeoisie des centaines et des centaines de millions de
francs se sont terminées par une complète faillite (…)
la diversité d'intérêts existant entre les
différents Etats impérialistes s'est exaspérée
et s'exaspère de jour en jour de façon plus profonde »
(Thèse sur la tactique du PC de Russie). Par ailleurs la
défaite des armées blanches, permet à la
nouvelle République des Soviets de se concentrer entièrement
à la tâche d'édification du socialisme. Et comme
l'Etat prolétarien n'est pas encore en mesure de fournir les
produits industrialisés à la paysannerie et que la
reconstruction est à faire, il est décidé de
permettre « le développement du capitalisme sous
le contrôle et la réglementation de l'état
prolétarien (c'est à dire le développement
du capitalisme « d'Etat » dans ce sens là
du mot) » (idem). La situation entraîne une
concurrence inter-impérialistes confronté à la
recherche de débouchés pour leurs économies en
crise : « L'impérialisme international s'est
trouvé hors d'état d'étouffer la Russie
soviétique, bien qu'il fut beaucoup plus fort qu'elle et a été
contraint pour le moment de la reconnaître ou de la presque
reconnaître et d'entrer en tractation commerciale avec elle »
(idem).
Dans
une telle situation la contradiction inter-impérialiste
redouble de vigueur « La situation générale
de l'économie mondiale, et avant tout, la ruine de l'Europe
détermine une longue période de lourdes difficultés
économiques, de secousses, de crises partielles et inégales,
etc. Les rapports internationaux, tels qu'ils s'établiront
comme résultat de la guerre et du traité de Versailles,
rendent la situation sans issue » (Tâche sur la
situation mondiale et la tâche de l'IC - 3e Congrès). Si
stabilisation du système capitaliste mondial il y a, celle ci
n'est donc que relative, de nouvelles crises s'annoncent et une
nouvelle guerre impérialiste est déjà en germe.
Nous soulignerons une nouvelle fois la date du 3ème Congrès
- 1921 - qui analyse l'évolution vers une guerre impérialiste:
« Il est absolument évident que plus le
mouvement révolutionnaire prolétarien mondial se
ralentit et plus les contradictions de la situation internationale,
économique et politique stimulent inévitablement la
bourgeoisie à tenter de nouveau de provoquer un dénouement
par les armes à l'échelle mondiale »
(idem). La période se caractérise aussi par le fait que
« le mouvement populaire révolutionnaire aux
Indes et dans les autres colonies est devenu maintenant partie
intégrante, de la révolution mondiale des travailleurs
dans la même mesure que le soulèvement du prolétariat
dans les pays capitalistes de l'ancien ou du nouveau monde »
(idem).
Ce
sont là les grandes lignes de l'analyse du troisième
Congrès qui a cerné la situation prévalant à
l'époque dans leur complexité. Le quatrième
congrès en 1922 confirme cette analyse en soulignant certaines
caractéristiques qui se sont amplifiées: Le
développement des luttes de libération nationale,
notamment en Chine, la décomposition du Traité de
Versailles, le passage de la classe ouvrière sur des positions
défensives, l'offensive économique de la Russie des
Soviets... une nouvelle caractéristique surgit avec le cas
Italien: « Le trait caractéristique du fascisme
Italien, du fascisme « classique » qui a
conquis pour un temps tout le pays, consiste en ce que les fascistes
non seulement constituent des organisations de combat strictement
contre-révolutionnaires et armées jusqu'aux dents, mais
encore essaient par une démagogie sociale de se créer
une base dans les masses (...) Le danger du fascisme existe
maintenant dans beaucoup de pays (...) Une des tâches les plus
imposantes des PC est d'organiser la résistance au fascisme
international, de se mettre à la tête de tout le
prolétariat dans la lutte contre les bandes fascistes et
d'appliquer énergiquement sur ce terrain aussi la tactique du
front unique; Les méthodes illégales sont ici
absolument indispensables » (Résolution sur la
tactique de l'IC - 4e Congrès). Voilà qui règle
son compte à l'argument de la bourgeoisie selon lequel les
communistes auraient sous-estimé la lutte contre le fascisme.
Dès
1922, l'IC appelle à lutter contre le fascisme par
l'application de la tactique du front unique. Le cinquième
congrès en 1924, confirme cette analyse: L'offensive du
prolétariat dans les pays impérialistes est partout
repoussée, la social-démocratie qui en porte la
principale responsabilité reste importante au sein des masses
ouvrières, le système capitaliste est rentré
dans une période de stabilisation relative, les mouvements
fascistes naissent et se développent un peu partout, les
luttes de libération nationale continuent de croître, le
mouvement communiste international augmente considérablement
et s'étend à d'autres pays, l'influence des déviations
de droite et de gauche dans plusieurs PC persiste, etc.
Conséquence
sur la tactique et l’organisation
La
révolution retrouve un cheminement long suite à la
crise aiguë née de la guerre et de l'offensive
prolétarienne. Du fait d'un certain nombre de facteurs
objectifs et subjectifs, le capitalisme retrouve une certaine
« stabilité » relative, précaire
et provisoire. Dans chaque pays une spécificité propre,
une complexité propre des structures sociales et situations
particulières fondent des possibilités particulières
de développement de la révolution et des tâches
des PC. L'erreur trotskiste et de la plupart des critiques de l'IC
réside dans la confusion entre les périodes de « crises
aiguës » de la situation mondiale et l'ensemble du
processus de la révolution mondiale. Le premier tournant n'est
pas le 7ème Congrès, mais le 3ème Congrès
de l'IC sous Lénine lui-même.
En
effet l'IC se penche sur les causes de la défaite de la
révolution et en souligne plusieurs : « 1) La
diversité des situations nationales, l'acuité
des antagonismes, la différence de structures sociales et des
obstacles à surmonter selon le pays, le degré élevé
d'organisation de la bourgeoisie dans les pays de haut niveau de
développement capitaliste d'Europe occidentale et d'Amérique
du nord, étaient des raisons suffisantes pour que la guerre
impérialiste mondiale n 'aboutisse pas immédiatement â
la victoire de la révolution mondiale » (Thèse
sur la tactique - 3ème Congrès ). L'IC qui a vu ses
sections et ses forces augmenter considérablement est
confrontée désormais à la difficulté de
diriger un MCI dont les tâches sont aussi diverses que
complexes: « Le Comité exécutif de l'IC
doit être organisé de telle sorte qu’il puisse
prendre position sur toutes les questions d'action du prolétariat.
Dépassant le cadre des appels généraux tels
qu'ils étaient lancés jusqu'à présent sur
telle ou telle question en discussion, le comité exécutif
doit de plus en plus chercher à trouver les voies et moyens
pour développer son initiative pratique quant à
l'action commune (...) L'internationale doit devenir une
internationale de fait, une internationale dirigeant les luttes
communes et quotidiennes du prolétariat révolutionnaire
de tous les pays » (Résolution sur
l'organisation de l'IC - 3ème Congrès). Ce n'est donc,
ni la déclaration de dissolution de l'IC, ni son 7ème
congrès qui posent le constat de la diversité des
situations et de la nécessité d'en tenir compte. Le 36
congrès estime d'ailleurs que cette diversité influe
également sur les formes organisationnelles: « Il
ne peut pas y avoir une forme d'organisation immuable et absolument
convenable pour les partis communistes. Les conditions de la lutte
prolétarienne se transforment sans cesse, et conformément
à ces transformations, les organisations d'avant-garde du
prolétariat doivent aussi chercher constamment les nouvelles
formes convenables. Les particularités historiques de chaque
pays déterminent aussi des formes spéciales
d'organisation pour les différents pays. Mais ces
différenciations ont une certaine limite »
(Thèse sur la structure, les méthodes et l'action des
PC - 3e congrès).
De
la même façon et plus précisément la
tactique et le programme des différentes sections doivent
s'ancrer dans les caractéristiques historiques et sociales
spécifiques: « L'IC et ses sections soutiennent
le mot d'ordre de l'unité du front prolétarien et
prennent en main l'initiative de sa réalisation. La tactique
des PC s'inspirera des conditions particulières de chaque
pays » (Thèse sur l'unité du front
prolétarien - 4ème congrès).
En
ce qui concerne le programme : « Dans le programme
général doivent être nettement énoncés
les types historiques fondamentaux entre lesquels se divisent les
revendications transitoires des sections nationales, conformément
aux différences essentielles de structures économiques
et politiques des divers pays » (Résolution sur
le programme - 4ème Congrès).
Sous-estimation
de la social-démocratie et sectarisme
Le
mot d'ordre « Allez aux masses » lancé
par le 6e congrès de l'IC et qui fut l'objet de débats
au 3e, 4e et 5e congrès, est le résultat du nouveau
contexte, du rapport des forces et de l'appréciation qui en
découlait sur la question de la révolution mondiale et
de la nécessité du Front Unique: « Les
masses voient que la classe ouvrière était scindée
en différents pays se combattant mutuellement alors que la
classe capitaliste engageait contre elle une offensive unique. Dans
cette situation, la solution qui s'imposait était d'initier
les forces dispersées du prolétariat pour les opposer à
l'attaque du capitalisme » (3e congrès). La
tactique du front unique se heurta au sectarisme gauchiste de
plusieurs sections (notamment en France et en Italie), dont l'analyse
volontariste sous-estimait l'implantation social-démocrate
dans la classe ouvrière. A l'inverse une tendance opportuniste
de droite interprétait le front unique comme une collaboration
avec les chefs de la social-démocratie. C'est exactement le
même débat et les mêmes tendances que l'on verra
au 7ème congrès, avec les mêmes accusations
gauchistes (Bordiga) dénonçant la tactique formulée
par Lénine du front unique « comme droitière
et de collaboration de classe ». Le 5e congrès tire
le bilan des premières expériences de front unique et
le parallèle est frappant avec le 7ème congrès
et le front populaire: « Sous l'influence d'insuccès,
on a tenté de réviser notre tactique de front unique »
constate Zinoviev parlant au congrès comme porte- parole du CE
de l'IC et dénonçant les critiques de Bordiga qui
utilisait les déviations de droite pour s'attaquer
frauduleusement à la ligne juste du front unique: « Au
cours de l'année écoulée, nous avons eu à
porter 90% de nos coups contre les déviations de droite. Je
pense qu'au présent congrès il en sera de même.
Plus on étudie les documents de nos sections et plus on se
rend compte que le danger de droite ne saurait être exagéré,
il est plus grand que jamais, non que nos militants soient mauvais,
mais parce que la période actuelle de l'histoire le veut. Nous
sommes entre deux vagues de révolutions et il est naturel
qu'il se produise des tendances de droite. Les survivances
sociale-démocrates sont plus grandes que nous n'aurions jamais
pu nous figurer. Nous devons les déraciner, et nous y
arriverons, mais seulement si nous refusons toute concession au
radicalisme verbal et au révisionnisme théorique, si
nous réprimons les déviations d'extrême- gauche
dès qu'elles commencent à prendre de l'importance »
(Rapport de Zinoviev au 5ème congrès). L'IC dans la
phase de « stabilisation » du capitalisme,
après la première vague révolutionnaire, met au
devant les tactiques de front unique dont le but est de ne pas se
couper des masses tout en luttant contre l'influence néfaste
des chefs sociaux- démocrates, afin de préparer la
seconde vague révolutionnaire qu'elle prévoit.
Aussi
l'IC porte-t-elle contre la droite qui lance au 5e congrès une
offensive pour que soit approuvée leur alliance sans principe
et au sommet avec les directions social-démocrates, et les
gauchistes qui eux exigent l'abandon du front unique en tant que
ligne tactique : « Nous comprenions la tactique du
front unique comme une tactique révolutionnaire dans une
période de ralentissement de la révolution. Mais dans
nos rangs, des camarades se sont trouvés pour en faire une
tactique d'évolution, une tactique d'opportunisme. C'était
une manœuvre stratégique, mais certains camarades y ont
vu une politique d'alliance avec la social-démocratie, une
coalition de tous les pays » (Zinoviev - 5ème
congrès). Pour éviter la reproduction de ces
déviations, le 5ème congrès apporte les
précisions suivantes sur la tactique du front unique: « Le
front unique par en bas est toujours indispensable, excepté
peut être aux rares moments de guerre civile déclarée
où il faut combattre par les armes même des ouvriers
contre-révolutionnaires. Le front unique à la fois
« par en bas » et « par en haut »
doit être appliqué, pas toujours mais fréquemment
dans les pays où nous sommes en minorité (...). Bien
entendu, il faut se garder contre les adultérations
opportunistes en employant cette tactique comme méthode
d'agitation et de mobilisation et non comme méthode de
coalition politique avec les social-démocrates. Enfin, le
front unique seulement par en haut. Ici je suppose qu'il faut dire:
jamais. Malheureusement dans la pratique c'est précisément
cette dernière qui a été le plus fréquemment
employée: écrire des lettres ouvertes aux
social-démocrates, mener des pourparlers interminables et
inutiles avec les chefs pour élaborer des programmes communs »
(Zinoviev au nom du CE de l'IC - 5e congrès). Et de démasquer
la tendance gauchiste comme suit: « A tous les
camarades et particulièrement aux camarades du parti allemand
qui, après l'expérience et les fautes de Saxe, se
bouchent les oreilles avec de l'ouate dès qu'ils entendent
parler de front unique, Je recommande de réfléchir
sérieusement à toutes ces questions. Le camarade de
gauche Burian écrit par exemple en Tchécoslovaquie, que
la tactique de front unique est la sauce principale du révisionnisme.
Ce n’est pas vrai. Celui qui est révisionniste trouvera
toujours un prétexte quelconque. Il le trouvera dans le
parlementarisme où dans n'importe quo i. Nous ne triompherons
jamais de la social-démocratie si nous avons peur de notre
ombre. Il faut prendre la tactique et la purger de toutes les
impuretés opportunistes. Il se trouvera toujours des gens pour
qui le front unique sera une sauce de révisionnisme »
(idem). Enfin l'application de la tactique du front unique relève
pour le 5e congrès de l'analyse correcte de chaque situation
concrète : « Il ne s'agit nullement de couler
tous les pays dans le même moule. Il faut poser la question
concrètement pour chaque pays en particulier »
(idem). Une telle tâche d'adaptation aux situations est confiée
directement à l'IC : « tout l'art de l'IC
consiste à adapter sa tactique aux différentes
conditions qui sont très dissemblables et très variées
(...) Ici je suis d'accord avec le parti communiste allemand qu'il
faut donner à chaque parti des indications concrètes.
Ce sera la tâche du 5e congrès » (Idem).
Le 5e congrès conclut donc à une direction plus
centralisée de l'IC dont la vocation à devenir un
véritable parti communiste mondial reste un objectif à
atteindre.
Devant
les réticences de certaines sections sur le plan de la
discipline, devant les déviations à droite et à
gauche de la ligne de l'IC « la direction
internationale doit devenir plus collective, tous les pays doivent
envoyer au comité exécutif les meilleurs disciples de
Marx et Lénine, les meilleurs cerveaux, les meilleurs
organisateurs. Mais après avoir constitué cet organe
directeur composé des meilleurs communistes du monde entier il
ne doit pas y avoir place pour une discipline de forme; il doit
régner une véritable discipline communiste et
prolétarienne (...) ces derniers temps, il y a eu des cas de
violations de la discipline. Certains n’ont pas été
punis (...) Nous voulons un PC indivisible, sans fraction, ni
groupement » (Zinoviev - 5e congrès).
En
fait entre le 4e et le 5e congrès, la question allemande, de
par son importance et de par les événements qui s'y
déroulaient, avait été au centre des
préoccupations de l'IC. Dans la lutte contre les déviations
de droite et de gauche de la ligne tactique du front unique, l'IC
dans cette période s'était surtout occupée des
grandes sections.
L'objectif
de devenir un véritable PC mondial n'en devenait que plus
explicite avec les plaintes et réclamations de maintes
sections, mettant en évidence les difficultés, malgré
une volonté nettement affirmée de diriger un mouvement
communiste dans un contexte de reflux révolutionnaire où
les spécificités de chaque nation reviennent au premier
plan et où le développement inégal des forces
communistes et des situations politiques différencie et rend
très complexe la tâche. « Nguyen Aï-Quoc
(= Ho chi Minh, Indochine): il faut accorder aux colonies plus
d'attention que jusqu'ici - Pepper (Etats- Unis): je crains que notre
congrès ne soit trop allemand, trop Europe centrale tout au
moins, trop peu mondial. Il est vrai que le problème
allemand a été le problème essentiel et vital de
l'Internationale. Mais l'Internationale a d'autres problèmes à
résoudre - Dengel (Allemagne) : La question
allemande a occupé une très grande place au congrès.
Par contre, d'autres questions n'ont presque pas été
discutées: ainsi celles des perspectives économiques -
Wijnkoop (Hollande): Nous devons nous occuper davantage de la
question coloniale - Buck (Canada): Jusqu'à présent le
congrès s'est très peu occupé des sections de
langue anglaise - Samoen (Java): Nous espérons que le comité
exécutif accordera plus d'attention aux colonies - Kreibich
(Tchécoslovaquie): Personne ne songe à contester que
l'Internationale ait à combattre les déviations de
droite et de gauche et à indiquer aux partis leur voie
politique. Mais la manière dont elle le fait n’est pas
indifférente. On a pris l'habitude de s'étendre sur des
articles des résolutions, des thèses, en négligeant
le travail effectif des partis et les perspectives économiques
et politiques de chaque pays. Nos camarades attendent du congrès
des nouvelles directives, des conseils, des perspectives politiques -
Amter (Amérique): L'Amérique est complètement
négligée par le congrès - Katayama (Japon): La
délégation japonaise regrette que Zinoviev ait si peu
parlé de l'Orient. Le rapport et les thèses de Varga ne
tiennent compte que de l'Europe et l'Amerique - Lozovsky (Russie) ;
La transformation de l'IC en un parti international bolcheviste, uni
et fort est un processus très long et douloureux. Il ne pourra
être accéléré que si le noyau dirigeant de
l'Internationale, selon les circonstances, sait suivre tantôt
une ligne de droite, tantôt une ligne de gauche, dans un sens
conventionnel bien entendu et que les 54 PC prennent une part
toujours plus grande à la solution des problèmes
internationaux... ».
Au
delà de ces propos qui n'ont pas tous la même
signification et la même valeur, on ne peut que constater la
complexité et la diversité des questions auxquelles se
confronte l'IC. Mais en plus de ces demandes que l'IC se
« mondialise » et se penche sur les problèmes
de chaque section, une attaque contre le centralisme démocratique
et le Comité exécutif se développe à ce
congrès. C'est une double attaque de droite et de gauche qui
cherchait à remettre en cause la discipline centralisée:
« Si au sein de l'Internationale, nous nous bornons à
observer la discipline officielle, nous nous transformerons en un
squelette officiel et nous ne serons plus une Internationale vivante.
La minorité quelle qu'elle soit et quelle que soit son
orientation n'a pas seulement à se plier aux décisions
de l'Internationale; Elle a aussi le devoir, dans l'Internationale
entre deux congrès, d'appliquer ses décisions, dans son
agitation et dans son organisation pour toutes les questions »
(5e congrès).
Ces
précisions de Radek, pourtant droitier, indiquent les
difficultés de 1'IC à faire respecter la discipline et
les décisions des congrès antérieurs. Au sein
même du congrès, les opportunistes de droite et de
gauche s'attaquent à l'exécutif de l'IC lui même
: « Fischer (Allemagne): Dans les thèses du 4e
congrès, il y avait toutes sortes de formules peu claires -
Brandler (Allemagne): Nous nous reconnaissons coupables d'avoir avant
tout appliqué et réalisé (de toutes nos forces)
la ligne du 3e et du 4e congrès. Nous ne le regrettons pas,
car nous tenons cette ligne pour juste, non pas seulement en ce qui
regarde le passé mais encore aujourd'hui - Bordiga (Italie):
En réalité on ne fait pas ici le procès du
Comité exécutif, mais le Comité exécutif
fait le procès des partis - Wenzel (Tchécoslovaquie):
Sans une condamnation catégorique des tendances opportunistes,
la collaboration du parti Tchèque avec l'IC dans l'esprit de
toutes les décisions de l'Internationale nous semble
compromise - Thalheimer (Allemagne): Une question de première
importance pour l'avenir est celle de l'immixtion de l'Internationale
dans la direction des partis. Personne ne nie que dans certaines
conditions cette immixtion soit nécessaire. Mais ni en
octobre, ni avant octobre, ni en janvier, elle n'a été
fructueuse pour notre parti. Au contraire, ces interventions de
l'Internationale ont toujours causé de grandes crises -
Grzegorzewski (Pologne): Hoeglund n'est pas pour la discipline et le
centralisme dans l'Internationale. Mais il est pour la sévère
discipline dans le PC de Suède ».
Ces
différentes citations ne sont ni homogènes, ni
exhaustives. En effet, nous avons livré pêle-mêle
des positions de droite et de gauche tendant à remettre en
cause l'aspect centraliste dans le principe du centralisme
démocratique. Les leaders de droite (Radek) ou de gauche
(Bordiga) finissent devant les critiques du congrès par
affirmer leur accord verbal avec un PC mondial discipliné et
« monolithique » selon les termes mêmes
du congrès. Il n'en demeure pas moins qu'un certain nombre de
constats s'impose au sortir du 5ème Congrès: - La
période de stabilisation du capitalisme et de reflux de la
vague révolutionnaire rend plus importante la question des
spécificités nationales que l'offensive antécédente
avait amoindrie - les PC tendent à passer de « sociétés
de propagande » en partis de masses - le rythme de leur
développement est inégal d'un pays à un autre -
les situations politiques auxquelles sont confrontés les PC
des différentes pays varient - leur Implantation et le rapport
de force entre les PC et les partis de la IIème internationale
varient aussi.
S'appuyant
sur ces conditions complexes, et mettant au devant les « spécificités
nationales » les opportunistes de droite tentent de faire
dévier le front unique et les opportunistes de gauche, prenant
prétexte de cela, tentent d'amener à l'abandon même
du principe du front unique. Le congrès condamne ces deux
déviations.
Dans
ce cadre général, le congrès affirme que le
développement de l'IC comme parti mondial des communistes est
un long processus, loin d'être gagné, et qui sera
parcouru de nombreuses embûches: « C'est
seulement à mesure que les principales sections de l'IC se
transforment en partis bolcheviks que l'IC deviendra vraiment le
parti bolchevik universel pénétré du léninisme »
(Résolution - 5e congrès).
Le
point de vue subjectif et idéaliste sur l'IC doit être
abandonné. Le mérite et la richesse de l'IC est d'avoir
entamé le travail de construction d'un MCI organisé,
d'avoir clarifié un nombre considérable de questions
théoriques, d'avoir démasqué à chaque
fois l'opportunisme de droite, de gauche, d'avoir aidé un
certain nombre de PC à devenir des partis de masses qui
comptent et partant, d'avoir été à l'avant-garde
des gigantesques luttes de classes et des luttes de peuples opprimés
tout au long de son existence. Et pour des générations
de communistes aujourd'hui, d'avoir laissé un héritage
théorique, idéologique et politique considérable,
une véritable source d'inspiration. Le point de vue subjectif
empêche de saisir l'apport réel de l'IC, de saisir
l'évolution de son analyse et en définitive toute son
importance historique et tout l'apport qu'elle constitue encore
aujourd'hui pour nous, où le recul quantitatif et qualitatif
du MCI oblige à reconstruire en maints endroits les partis du
prolétariat et à envisager leurs modes de liaison et de
collaboration.
Le
mot d'ordre de bolchevisation des sections lancé par le 5e
Congrès a pour objet de faire rompre les sections d'avec les
traditions social-démocrates qui persistent encore après
cinq congrès. Sur le plan organisationnel, la bolchevisation
est la réorganisation des sections sur la base des cellules
d'entreprises : « L'objectif essentiel de cette période
de l'IC est la bolchevisation de ses sections (...):
a)
le parti doit être une véritable organisation de masse,
c’est à dire légal et illégal, se
maintenir en contact étroit et indispensable avec les ouvriers
et exprimer leurs besoins et leurs espoirs.
b)
il doit être capable de manœuvrer, c'est à dire ne
pas avoir une tactique dogmatique et sectaire, mais employer contre
l'ennemi n'importe quelle manœuvre stratégique sans
cesser de rester lui-même: c'est la faute capitale de nos
partis de ne pas souvent le comprendre.
c)
il doit être essentiellement révolutionnaire et
marxiste, poursuivant irrésistiblement son but en toutes
circonstances et faisant le maximum d'efforts pour approcher l'heure
de la victoire du prolétariat sur la bourgeoisie.
d)
il doit être un parti centralisé, n’admettant ni
fractions, ni tendances, ni groupements, un parti monolithe fondu
d'un bloc.
e)
il doit se livrer dans l'armée bourgeoise à un travail
systématique de propagande et d'organisation »
(Résolution sur le rapport du CE -5e Congrès).
L'IC
ne considère pas à l'époque ses sections comme
de réels PC de masse à la hauteur de l'exigence de la
situation et des tâches et son objectif est défini comme
suit: « La création de grands partis
communistes, problème central de toute une époque ».
Fin
de la période de stabilisation relative et nouvelle crise du
capitalisme
Le
6e Congrès du Kominterm se déroule au moment où
se développent les bases d'une nouvelle crise sans précédent
du système impérialiste. A un moment où
les idéologues bourgeois nient toute nouvelle crise, le 6e
Congrès se distingue en annonçant en 1928 une crise
générale.
La
crise de 1929-1933 est venue encore une fois prouver la supériorité
de l'analyse marxiste. Il 6e Congrès conclut de son analyse la
fin de la période de « stabilisation »:
« La 3e période est au fond celle du relèvement
de l'économie capitaliste et presque parallèlement de
celle de l'URSS au delà de leurs niveaux d'avant-guerre (début
de la période dite de « reconstruction »,
nouvelle croissance des formes capitalistes de l'économie sur
la base d'une technique nouvelle). Pour le monde capitaliste, cette
période est celle d'un rapide développement de la
technique, d'une croissance intense des cartels, des trusts, des
tendances au capitalisme d'Etat, et conjointement, celle d'un
puissant développement des contradictions de l'économie
mondiale, se mouvant dans des formes déterminées par
tout le cours antérieur de la crise du capitalisme (marchés
réduits, URSS, mouvements coloniaux, accroissement des
contradictions intérieures de l'impérialisme). Cette 3e
période, qui a particulièrement aggravé la
contestation existant entre la croissance des forces
productives et la réduction des marchés, rend
inévitable une nouvelle phase de guerres impérialistes
entre Etats impérialistes, de guerres de ces derniers contre
l'URSS, de guerres de libération nationale contre les
impérialistes et leurs interventions, de batailles de classe
gigantesques » (Thèses sur la situation
internationale et les tâches de l'IC). Le 6e Congrès
conclut à une exacerbation des contradictions de
l'impérialisme : « En aiguisant les
contradictions internationales (contradiction entre les pays
capitalistes et l'URSS, occupation militaire du nord de la Chine
comme commencement de son démantèlement et de la lutte
entre les impérialistes, ...) et les contradictions
intérieures dans les pays capitalistes (radicalisation de la
classe ouvrière, intensification de la lutte de classe), en
déchaînant les mouvements coloniaux (Chine, Inde,
Egypte, Syrie) cette période aboutit fatalement, par un
nouveau développement des contradictions de la stabilisation
capitaliste, à un nouvel ébranlement du capitalisme et
à une aggravation aiguë de la crise du capitalisme »
(idem). A l'intérieur des contradictions inter-impérialistes,
le 6e congrès souligne la contradiction entre pays vainqueurs
et pays vaincus de la guerre 14-18. C'est justement dans ces pays
vaincus que se développent principalement d'importants
mouvements fascistes, ayant comme thématique le refus du
traité spoliateur de Versailles et le discours sur le
relèvement national.
Cette
contradiction inter-impérialiste poussait les événements
vers une guerre impérialiste, même si les retournements
de situation étaient toujours envisageables et nécessitaient
la vigilance sur la question de la défense de l'URSS: « Le
prolétariat international, dont l'URSS est la seule patrie, le
rempart de ses conquêtes, le facteur essentiel de son
affranchissement international, a pour devoir de contribuer au succès
de l'édification du socialisme en URSS et de la défendre
par tous les moyens contre les attaques des puissances capitalistes »
(idem). Ce n'est donc pas le 7e Congrès, ni un coup d'Etat des
l'IC qui avait amené à l'affirmation d'une telle tâche
de défense de l'URSS par le prolétariat international,
mais c'est bien le 6e Congrès qui confirme en cela les congrès
antérieurs de l'IC, qui indiquent le lien indissoluble entre
les intérêts de I'URSS et les intérêts du
prolétariat mondial et des peuples opprimés dans leur
lutte pour la suppression du système capitaliste. De cette
analyse, le 6e congrès déduit les tâches
suivantes: - Lutte pour la paix et en cas de confit, transformation
de la guerre impérialiste en guerre civile révolutionnaire
- Lutte pour la défense de l'URSS par tous les moyens -
Soutien aux mouvements de libération nationale dans les
colonies notamment en Chine - Maintien et intensification de la lutte
contre l'opportunisme de droite qui idéalisait la
stabilisation capitaliste et ne voyait pas les germes d'une crise
générale aiguë, et contre l'opportunisme de gauche
qui comme au 5e Congrès refusait le front unique. Déjà
au 4e Congrès en 1922, l'IC avait signalé
« qu'une des tâches les plus importantes des PC
est d'organiser la résistance au fascisme international, de se
mettre à la tête de tout le prolétariat dans sa
lutte contre les bandes fascistes et d'appliquer énergiquement
sur ce terrain aussi la tactique du front unique ». Le
6e Congrès reprend cette analyse dans son programme sur la
révolution mondiale et donne les précisions ci- après:
- Sur les conditions historiques d'émergence du fascisme:
« L'époque de l'impérialisme,
l'aggravation de la lutte de classe et la croissance, surtout après
la guerre impérialiste mondiale, des facteurs de guerre
civile, ont provoqué la faillite du parlementarisme. De là,
les « nouvelles » méthodes et les
nouvelles formes de gouvernement. Cette offensive de la réaction
bourgeoise prend dans certaines conditions historiques, la forme du
fascisme » (programme et thèse adoptés
au 6e Congrès). Le fascisme émerge donc sur le terreau
de la crise de la démocratie parlementaire bourgeoise, en
situation de crise économique grave, grosse de risques de
guerres civiles et d'une intensification de la lutte de classe. - Ces
conditions se caractérisent par « l'instabilité
des rapports capitalistes, l'existence d'importants éléments
sociaux déclassés, l'appauvrissement de larges couches
de la petite bourgeoisie des campagnes et enfin, la constante menace
d'actions de masse du prolétariat » (idem). -
Sur sa nature de classe : « Afin de s'assurer une
stabilité, une fermeté et une continuité plus
grande du pouvoir, la bourgeoisie est de plus en plus contrainte de
passer du système parlementaire à la méthode
fasciste indépendante des rapports de combinaisons de partis.
Cette méthode est celle de la dictature directe,
idéologiquement camouflée à l'aide de « l'idée
nationale » et de la représentation « corporative »
(qui est en réalité celle des divers groupes des
classes dominantes) » (idem). - Sur sa base de classe:
« Il exploite le mécontentement des masses
petites bourgeoises, des intellectuels et d'autres milieux sociaux,
au moyen d'une démagogie sociale assez particulière
(antisémitisme, attaques partielles contre le capital usurier,
indignation contre les patriotes parlementaires et de la corruption,
création d'une hiérarchie solide et rétribuée
des formations fascistes, création d'un appareil de parti et
d'un corps de fonctionnaires). Le fascisme s'efforce de pénétrer
dans les milieux ouvriers où il recrute les éléments
les plus arriérés en mettant à profit le
mécontentement causé par la passivité de la
social-démocratie » (idem). - Ses objectifs de
classe : « Le fascisme s'assigne pour tâche
principale la destruction de l'avant- garde ouvrière
révolutionnaire, c’est à dire des éléments
communistes du prolétariat et de leurs cadres (...). Recourant
pendant les péages les plus critiques pour la bourgeoisie à
une phraséologie anticapitaliste, le fascisme perd en route
ses grelots anticapitalistes et se révèle de plus en
plus dès qu'il s'est affermi au pouvoir, comme la dictature
terroriste du gros capital » (idem).
Conséquence
sur la tactique et l’organisation
Le
6e Congrès tire comme conclusion de son analyse la nécessité
du front unique sans affaiblissement pour autant des critiques vis à
vis la social-démocratie qui demeure le second recours du
capital en situation de crise: « En s'adaptant aux
changements de la situation politique, la bourgeoisie se sert tour à
tour des méthodes du fascisme et de celle de la coalition avec
la social-démocratie, cette dernière jouant fréquemment
un rôle ouvertement fasciste (Noske en Allemagne, Parti
Socialiste Polonais...) » (idem). Le front unique
antifasciste est donc bien une tactique visant à unir les
masses ouvrières dans le combat antifasciste, tout en
démasquant la direction social-démocrate. L'IC en
appelle aussi à d'autres tâches: « L'IC
porte une attention particulière à la préparation
systématique de la lutte contre les dangers de guerre
impérialiste. L'activité des PC doit démasquer
impitoyablement le social-chauvinisme, le social-impérialisme,
la phraséologie pacifiste qui recouvre les plans impérialistes
de la bourgeoisie (...) Les mots d'ordre fondamentaux de l'IC dans ce
domaine sont: Transformation de la guerre impérialiste en
guerre civile; Défaite de son « propre »
gouvernement impérialiste; Défense de l'URSS et des
colonies par tous les moyens en cas de guerre contre elles »
(idem).
De
ces propos clairs l'IC en déduit en matière
d'organisation que « pour coordonner le travail et
l'action révolutionnaire et pour pouvoir les diriger de la
façon la plus efficace, le prolétariat international a
besoin d'une discipline internationale de classe, qui doit être
observée avant tout dans les rangs du PC. Cette discipline
communiste internationale s'exprime par la subordination des intérêts
particuliers et locaux du mouvement à ses intérêts
généraux et permanents (souligné par nous) et
par l'exécution intégrale de toutes les décisions
prises par les organes dirigeants de l'IC » (idem).
Pour l'IC la situation complexe et lourde d'une nouvelle
conflagration mondiale peut éventuellement mettre en
opposition momentanée « les intérêts
particuliers et locaux » et les « intérêts
généraux et permanents » du MCI. Et c'est
sur la base des « intérêts généraux
et permanents » du MCI qu'il convient d'analyser la
période historique qui va succéder au 6e Congrès
et surtout la seconde guerre mondiale antifasciste. Il apparait
clairement ici, que ce n'est ni le 7e Congrès, ni le CE issu
de ce congrès, ni l'URSS, qui au cours de la guerre mondiale
39-45 aurait imaginé cela pour dissoudre l'IC. Ces accusations
éludent le fait que c'est déjà le 6e congrès,
à un moment où le caractère de la guerre en
préparation restait encore impérialiste, qui envisagea
cette possibilité: Le 6e congrès reste conscient que la
discipline internationale ne peut se réduire à une
simple exécution des ordres venus d'en haut et la commission
des statuts déclare dans une formule sans ambiguïté
« qu'il n'est pas possible au Comité Exécutif
de diriger l'IC depuis Moscou » et pour suivre de près
les réalités nationales diverses et multiples de la
lutte de classe, le CE mit sur pied des « bureaux »
censés s'occuper des aires géographiques précises
(Europe Centrale, Orient, etc.) et le congrès décida
que des instructeurs suivraient les travaux des Comité
Centraux des partis afin que le CE puisse tenir compte le plus
possible des réalités concrètes sur
le terrain et que ses décisions puissent être contrôlées
dans leur application par les sections. C'était d'ailleurs là
le renforcement d'une pratique ancienne datant du vivant de Lénine.
La
victoire du fascisme en Allemagne et le 7e congrès de l'IC
Entre
le 6e congrès et le 7e congrès, la situation
internationale évolue très rapidement, apportant la
confirmation des analyses de l'IC et faisant apparaître des
traits nouveaux d'une très grande importance. La crise et la
sortie de la période de « stabilisation relative »
du capitalisme est dès 1929 une réalité
éclatante indéniable. Cependant l'URSS connaît un
développement sans précédent impulsé par
le premier plan quinquennal, faisant du socialisme une alternative de
plus en plus crédible pour un nombre croissant des masses à
travers le monde. Après le succès du premier plan
quinquennal, une véritable guerre économique est
déclenchée contre l'URSS (sabotage, freinage des
importations, embargo et refus de crédits, campagne de
dénigrement ...). Et pourtant la crise des débouchés
est telle qu'elle décuple la concurrence entre les pays
impérialistes qui cherchent chacun à maintenir un accès
au marché soviétique, seul marché ne connaissant
pas la crise. Ainsi certains secteurs, comme celui des constructions
mécaniques n'ont tenu que grâce à l'existence
d'un dynamique marché soviétique dans cette mer
d'économies effondrées et désarticulées
par la crise de 1929. C'est d'ailleurs là les deux raisons
essentielles du non déclenchement de la guerre à ce
moment : l'accès au marché soviétique et la
mobilisation du prolétariat mondial contre la guerre, y
compris l'URSS, dont la solidité et la force militaire et
économique est un motif supplémentaire. C'est ainsi que
dans chaque pays impérialiste, c'est dans l'exacerbation
des contradictions inter- impérialistes que la solution de la
crise est recherchée, en particulier dans les pays vaincus
qui, manquant de colonies, ressentent plus encore ce besoin de
débouchés. Le Japon s'engage le premier dans la guerre
en agressant en 1931 la Chine et en s'emparant des intérêts
occidentaux dans ce pays. Seules l'URSS et l'IC soutiennent
activement le peuple Chinois. Les puissances impérialistes
inaugurent une nouvelle politique qui sera bientôt connue sous
le vocable de « non-intervention ». Celle-ci va
connaître ses lettres de noblesse avec l'Allemagne nazie dont
l'essence consiste à pousser les puissances vaincues à
rechercher des débouchés vers les colonies « libres »,
et dans une guerre contre l'URSS. Une autre caractéristique de
la crise de 1929 est qu'elle ne connaît pas de reprise comme
dans une crise classique de surproduction, mais débouche sur
une longue période de dépression qui conduira
d'ailleurs à une nouvelle crise économique en 1937.
C'est une crise générale profonde et durable qui pousse
toutes les bourgeoisies à accentuer la pression sur la classe
ouvrière et les peuples opprimés et pour un nombre
important d'entre elles à rechercher dans la dictature
fasciste une solution à la crise. C'est surtout dans les pays
vaincus de la guerre impérialiste 14-18 qu'une telle
perspective va se réaliser. Et en Allemagne dès
1932-33, les nazis s'installent au pouvoir.
Le
contexte et son analyse
La
victoire du fascisme fut une sérieuse défaite de la
classe ouvrière allemande avec comme conséquence: La
dictature ouverte contre la classe et son parti, le
développement sans précédent des tendances
réactionnaires des démocraties bourgeoises et
l'accroissement des organisations fascistes, l'accélération
des menaces de guerres inter-impérialistes et/ou contre
l'URSS. Deux questions centrales traversent le 7e congrès: La
lutte contre le fascisme et la lutte contre la guerre.
a)
La
lutte contre la guerre
Le
7e congrès met en exergue le fait que « La
période de la crise économique mondiale et de la
dépression d'un genre spécial fournit un exemple
particulier de développement inégal; Elle
nous montre les conséquences de cette in égalité
du développement du capitalisme dans tous les domaines »
(discours d'Ercoli) – Cette loi du développement mise en
évidence par Lénine renforce les risques de guerre sur
la base des contradictions inter- impérialistes, à la
fois dans le camp des vainqueurs de la guerre 14-18, mais aussi entre
ces pays et les vaincus ce qui débouche sur une rupture de
l'équilibre imposé par le traité de Versailles;
Ercoli en parle en ces termes : « Or il est important
de noter qu'entre les puissances elles- mêmes, qui avaient
imposé aux vaincus les tracés d' après-guerre
les contradictions s'aiguisaient. Elles étaient en rivalité
les unes avec les autres, et cette rivalité devait finalement
faire sauter le système créé par les traités
d'après-guerre » (idem). La contradiction
inter-impérialiste pour la conquête des plus grands
débouchés possibles au détriment des
concurrents, conduit chacun à exploiter encore plus son propre
prolétariat afin de pouvoir se permettre le « dumping »
nécessaire pour s'introduire dans les sphères
d'influence des autres. Cette situation accroit donc la contradiction
bourgeoisie-prolétariat. Le fascisme est la réponse
dans certains pays de la bourgeoisie à l'exacerbation de cette
contradiction. Le 7e congrès poursuit en mettant en évidence
trois traits nouveaux qui ont vu le jour depuis le 6e congrès
: « Le puissant essor de l'URSS, l'attaque du militarisme
japonais en extrême orient, la poussée du fascisme en
Europe, et particulièrement en Allemagne » (idem).
Ces trois traits agissent de façon contradictoire et en
interaction. De l'équilibre entre ces facteurs dépendra
l'évolution des événements et l'orientation
qu'aura la guerre à venir. Le développement impétueux
de l'URSS à un moment où le monde entier est en crise,
renforce son autorité internationale et sa politique de paix :
« Les relations entre l'Union Soviétique et les
pays capitalistes sont entrées dans une phase nouvelle, dont
les caractéristiques principales sont l'autorité
croissante du pays de la dictature du prolétariat et de sa
politique de paix » (idem). Ceci amène à
un Antisoviétisme dont le militarisme fasciste japonais et le
nazisme allemand se servent pour obtenir un soutien dans la
perspective promise d'une croisade anti-bolchevik. Dès lors le
fascisme apparaît comme l'ennemi principal aux yeux du 7e
congrès: « En concentrant le feu de notre lutte
sur l'ennemi principal de la Paix, sur le fascisme allemand - ce qui
ne nous empêche pas de mener une lutte intransigeante contre
« notre » impérialisme et contre les
partis de guerre extrémistes dans les pays capitalistes qui
sont liés au fascisme allemand - nous accomplissons notre rôle
de défenseurs irréductibles de toutes les libertés
et conquêtes de la classe ouvrière et des travailleurs,
et nous défendons les libertés nationales »
(idem).
Ces
propos datent de 1935 à un moment où de nombreuses
bourgeoisies en opposition objective au fascisme allemand manœuvrent
pour orienter ses velléités agressives vers l'URSS:
« La bourgeoisie réactionnaire anglaise estime
pouvoir canaliser la poussée de l'impérialisme allemand
et de l'impérialisme japonais, qui menace ses positions dans
la voie antisoviétique (...). La bourgeoisie anglaise avec les
concessions qu’elle fait et l'appui qu'elle donne aux
instigateurs de guerre en Europe et en Extrême Orient,
rapproche l'extension d'une nouvelle guerre mondiale dans laquelle
l'empire britannique aussi sera entraîné
inévitablement » (idem). Ceci devrait faire
réfléchir ceux qui adoptent facilement la haineuse
campagne bourgeoise contre le pacte de non agression
Molotov-Ribbentrop en 1939. Retenons pour l'instant que l'histoire
confirmera totalement cette analyse du 7e congrès en 1935,
puisque la position de l'impérialisme français, à
ce moment disposé à un accord avec l'URSS, résulte
de la pression des masses, qui dès 1934 avaient écarté
par une action décisive la menace de prise de pouvoir par les
fascistes français. La défaite du front populaire en
1937-38, va permettre à la bourgeoisie française de
s'aligner sur la duplicité antisoviétique de son
homologue anglaise, bridant ainsi l'équilibre relatif qui va
précipiter l'humanité dans la guerre.
Mais
en 1935, le 7e congrès se propose d'utiliser les
contradictions inter- impérialistes pour renforcer le camp de
la paix à la tête duquel se trouve l'URSS: « Nous
cherchons à utiliser toutes les différences existant
entre les positions respectives des différentes
puissances impérialistes. Nous devons savoir les utiliser dans
l'intérêt de la défense de la paix sans oublier
un instant la nécessité de diriger l'attaque contre
l'ennemi qui est dans notre pays, contre « notre »
impérialisme » (idem). Dès 1935, donc,
le 7e congrès divise les pays capitalistes en deux parties
dépendamment de leur attitude objective vis-à-vis la
guerre et la paix: « Nous voyons se dessiner de plus en
plus clairement en Europe un groupe d'Etats capitalistes gouvernés
et dirigés par les forces les plus belliqueuses et les plus
réactionnaires, directement intéressées à
un déclenchement rapide de la guerre en général,
de la guerre contre l'URSS en particulier. Il s'est formé,
d'autre part un groupe de pays capitalistes, qui en majorité,
ont conservé le régime parlementaire et qui sont plus
ou moins intéressés à la sauvegarde de la paix »
(idem). Ainsi en 1935, bien que définissant la guerre en
préparation comme une guerre inter-impérialiste, le 7e
congrès n'en attire pas moins l'attention sur des faits
particuliers qui étaient en développement et qui vers
1939 vont arriver à maturité, faisant de la seconde
guerre mondiale une guerre antifasciste et de libération
nationale.
b)
l'analyse
du fascisme
Dans
un tel contexte, l'analyse du fascisme, perçu comme ennemi
principal s'avère d'une importance particulière. C'est
à Dimitrov, après sa lutte héroïque au
procès de Leipzig, de partir des analyses d'abord du 4e
congrès et des approfondissements du 6e pour intégrer
en les développant les éléments nouveaux apparus
avec l'accession de Hitler au pouvoir.
En
effet la victoire du nazisme en Allemagne avec la place et le poids
économique de cette puissance permet d'unifier les forces les
plus réactionnaires au plan mondial autour du grand capital
allemand. Cette fraction du grand capital dans tous les pays effrayés
par l'essor de l'URSS, l'aggravation de la crise et l'ampleur des
luttes de classe et des luttes des peuples opprimés, cherche
dans la dictature fasciste et la suppression de tous droits et de
toutes organisations de classe, la solution pour maintenir sa
domination de classe. En 1928, le 6e congrès avait noté
que le fascisme et la social-démocratie étaient les
deux moyens se renforçant mutuellement, par lesquels la
bourgeoisie entendait pérenniser son pouvoir. L'attitude
social-démocrate préférant Hitler à
l'alliance avec les communistes, notamment en Allemagne, en était
une preuve éloquente. Le 7e congrès devait noter à
son tour que la signification de la victoire des nazis en Allemagne
consiste dans l'abandon par la bourgeoisie réactionnaire au
pouvoir de tout habillage démocratique, avec comme
conséquence, non seulement la répression la plus féroce
qui soit contre les communistes, mais aussi contre toutes les forces
démocratiques: « L'arrivée du fascisme au
pouvoir, ce n 'est pas la substitution ordinaire d'un gouvernement
bourgeois par un autre, mais le remplacement d'une forme étatique
de la domination de classe de la bourgeoisie - la démocratie
bourgeoise - par une autre forme de cette domination, la dictature
terroriste déclarée » (Dimitrov).
Sans
nous attarder sur le 7e congrès, ce dernier congrès de
l'IC préconise le front unique et le front populaire
antifasciste en liaison avec la situation objective tout en attirant
l'attention contre les déviations opportunistes droitières
et gauchistes de sa ligne que les autres congrès avaient déjà
combattues.
Conséquence
sur l’organisation
Le
7e congrès se tient à un moment où le MCI avait
beaucoup grandi, résultats des efforts de bolchevisation de
l'IC depuis le 6e congrès. L'IC passe ainsi de 65 partis en
1928 à 76 au 7e congrès et de 3 millions 835.000
membres à 6 millions 800.000 en 1935. Toutefois « le
7e congrès mondial de l'IC constate de sérieuses
lacunes dans le travail de certaines sections de l'IC: application
tardive de la tactique du front unique, incapacité de
mobiliser les masses pour des revendications partielles de caractère
aussi bien politique qu'économique, incompréhension de
la nécessité de la lutte pour défendre les
restes de la démocratie bourgeoise, incompréhension de
la nécessité de créer le front populaire
anti-impérialiste dans les pays coloniaux et dépendants,
dédain pour le travail dans les syndicats réformistes
et fascistes et dans les organisations de masses des travailleurs
créées par les partis bourgeois, sous-estimation de
l'importance du travail parmi la paysannerie et parmi les masses de
la petite bourgeoisie urbaine » (Résolution sur
le rapport du CE - 7e congrès). Ce sectarisme constituait un
handicap empêchant les PC de se mettre à la tête
des masses dans le combat revendicatif et antifasciste. Entre le 6e
congrès et le 7e congrès, ce type d'erreur était
un danger réel alors que l'on a vu qu'au 5e congrès
l'accent avait été fortement mis sur l'opportunisme de
droite. Ce gauchisme trouvait sa source à la fois dans une
réaction à la trahison des dirigeants
sociaux-démocrates qui sabotaient les tentatives de
réalisation du front unique surtout à la base, mais
également dans la complexité et la rapidité de
mutation des situations: « Le changement rapide de la
situation, la croissance impétueuse du mécontentement
des masses, l'accentuation du danger fasciste et de la menace de
guerre obligeaient les communistes à modifier rapidement leurs
appréciations sur la situation, sur le rôle des
différents partis, groupes ou personnes à lancer en
temps opportun des mots d'ordre adaptés à la nouvelle
situation et les contraignaient à effectuer un formidable
travail d'organisation. Dans l'accomplissement de ces tâches,
les communistes furent bien souvent exemplaires. Pourtant leurs mots
d'ordre retardaient parfois sur l'évolution politique rapide
et complexe, ils n’appréciaient pas toujours de façon
juste le rapport de force des classes, ils persistaient parfois sur
des mots d'ordre et sur des méthodes de lutte qui, justes peu
de temps auparavant, se trouvaient déjà périmées
dans une situation différente » (Rapport du CE
- 7e congrès). A partir d'un tel bilan des difficultés
rencontrées, des modifications en matière
d'organisation sont introduites afin d'y remédier: « Il
est indispensable de changer les méthodes de travail et de
direction de l'IC en tenant compte du fait qu'il est impossible
d'avoir un rôle directeur depuis Moscou dans toutes les
questions et envers ses 75 sections, qui sont placées dans les
conditions les plus diverses (partis dans les métropoles et
les colonies, dans les pays hautement développés et
dans les pays essentiellement paysans, pays légaux et
illégaux, etc.) » (Lettre de Dimitrov à
la commission chargée de préparer le second point de
l'ordre du jour du 7e congrès - 01/07/1934). En plus de ce
facteur, il y a le fait que la plupart des sections sont devenues de
véritables partis de masses: « Un nombre de plus
en plus grand de PC, qui, au moment du 6e congrès mondial
n'étaient encore que de simples groupes de propagande,
commencent aujourd'hui à se transformer en partis de masse et
à devenir des facteurs politiques importants dans leur pays.
Dans tous les PC des grands pays, il s'est déjà formé
des organismes dirigeants fidèles à nos principes et
capables de résoudre de façon indépendante, en
se basant sur les décisions de nos congrès et sessions
plénières, les questions politiques et tactiques les
plus complexes de leur pays » (Rapport d'activité
du CE du 7e congrès). C'est sur cette base que dans sa
« résolution sur le rapport d'activité du
CE, le congrès a décidé de concentrer la
direction concrète de notre mouvement dans les sections
elles-mêmes. Cela nous oblige à renforcer de toutes les
manières le travail de fondation et d'éducation des
cadres, de consolidation des PC par de véritables dirigeants
bolcheviks, afin que les partis, forts des décisions des
congrès de l'IC et des sessions plénières de son
CE, puissent, lors de brusques tournants dans les événements,
trouver avec rapidité et par eux-mêmes une solution
juste aux tâches politiques et tactiques du mouvement
communiste » (discours de clôture du 7e congrès
- Dimitrov).
Concernant
dorénavant le rôle du CE, il est décidé :
« Le 7e congrès mondial de l'IC invite le CE de
l'IC: a) A transférer le centre de gravité de son
activité sur l'élaboration des orientations politiques
et tactiques fondamentales du mouvement ouvrier international, à
partir, pour résoudre toutes les questions, des conditions et
particularités concrètes de chacun des pays, et à
éviter, en règle générale, de s'immiscer
directement dans les affaires internes d'organisation des partis
communistes... » (Résolution sur le rapport du
CE). C'est donc dès 1935 qu'est décidé, devant
la situation objective, les besoins concrets de la lutte de classe et
les acquis du travail antérieur, la cessation de la direction
centralisée de l'IC et des sections la composant et non en
1943, date de la dissolution de l'IC.
C'est
pour le même souci d'être au plus près des
réalités et des nécessités du combat de
classe qu'est modifiée l'organisation de l'Internationale
Syndicale rouge (ISR) : « Je propose de réorganiser
l 'ISR. A la suite de cette discussion, il faut proposer la
réorganisation. Transférer à l’étranger
le centre de gravité de l'activité de l'ISR, créer
à l'étranger des centres qui feront la propagande,
mèneront la lutte pour l'unit é syndicale et
appliqueront la ligne de classe du mouvement syndical à
l'étranger. Et ici cet énorme appareil, cet énorme
bâtiment de l'ISR doit être réduit, en n’y
laissant qu’un petit centre, qui sera lié à l'IC
et l'aidera dans son travail. Quand à l'édition et la
propagande, elles doivent être concentrées dans les
pays mêmes, plus près de la classe ouvrière
des pays capitalistes » (Réunion du CE de l'IC
du 11/03/1936). Ces transformations capitales dans l'organisation et
la direction de l'IC résultent de l'évolution de la
situation qui se caractérisait par l'accroissement du
développement inégal, de la diversité et la
complexité des contextes nationaux, du besoin d'une adaptation
rapide aux évolutions sans cesse accélérées
des rapports de force dans chacun des pays et au plan international,
de la taille et de la maturité atteintes par les PC dans les
grands pays capitalistes qui drainaient des millions et des millions
de membres. A l'exemple des événements en France en
1934, où les masses spontanément, puis sous la
direction du PCF ont stoppé net l'assaut et le coup d'état
fasciste après avoir tiré les leçons de la prise
de pouvoir par les Hitlériens, en Allemagne un an plus tôt.
Evidemment
ces transformations et cette « décentralisation »
de l'IC n'étaient en aucune façon un blanc-seing
donné au « libre » développement
des déviations de droite et de gauche. L'IC n'a jamais cessé
de lutter contre ces déviations, même si on sait que
plusieurs partis beaucoup plus tard vont tomber dans le
révisionnisme. Mais dans l'immédiat, ces mesures vont
surtout permettre au moment de la conflagration généralisée
que partout les sections nationales de l'IC vont jouer le premier
rôle et tenir la place décisive dans la lutte
antifasciste, dans la résistance et dans l'instauration des
Démocraties Populaires dirigées par des PC dans les
pays de l'Est.
Les
déviations de droite du PCF et du PCI (italien) notamment, ne
doivent pas nous masquer l'importance des victoires grâce aux
tactiques justes de l'IC, émises par le 7e congrès,
qui, conscient de ces risques en avait averti les sections: « Inspiré
de la résolution de faire triompher cette ligne tactique et
sûr que cette voie mènera nos partis à de grands
succès, notre congrès a en même temps envisagé
l'éventualité que l'application de cette ligne
bolchevique dans la pratique ne se fera pas toujours sans encombre,
sans erreur, sans certaines déviations à droite ou à
« gauche », déviation tantôt du
côté de l'opportunisme et du suivisme, tantôt du
côté de l'auto-isolement sectaire (...). Il ne peut y
avoir de place, dans nos rangs pour les fractions et pour les
intrigues fractionnelles. Quiconque essayera de violer l'unité
de fer de nos rangs par une action fractionnelle quelconque,
apprendra par lui-même ce que signifie la discipline
bolchevique que nous ont toujours enseigné Lénine et
Staline. Que cela serve d'avertissement aux quelques éléments
qui, dans certains partis, pensent pouvoir profiter des difficultés
de leur organisation, des blessures, des défaites et des coups
de l'ennemi déchaîné... »
(Dimitrov, discours de clôture 7e congrès).
L'avertissement
est clair, il se passe de commentaire et indique que l'IC n'a pas du
tout sous-estimé les risques, mais les a pris en compte pour
prendre ses décisions, qui auront permis aux PC de prendre les
initiatives en temps et en heure dans la lutte contre le fascisme.
La
dissolution de l’IC
Sans
nous étendre sur les évènements qui séparent
le 7e congrès du déclenchement de la guerre,
penchons-nous sur la situation et le système de contradiction
en 1943, date de la dissolution de l'IC.
La
contradiction qui détermine toutes les autres et dont
l'expression concrète et militaire est celle opposant par la
guerre le camp fasciste et antifasciste. Le camp antifasciste n'a pas
existé spontanément, mais résulte de l'échec
des puissances impérialistes française, anglaise et
américaine dans leur stratégie de canalisation de
l'agression hitlérienne vers l'Est, vers l'URSS. Rappelons en
effet que malgré les propositions répétées
de l'URSS et du Komintern (IC) sur la nécessité d'une
politique commune de « sécurité collective »
des pays épris de paix, afin d'isoler les Etats fascistes dès
1935, ces pays impérialistes ont tenté pendant près
d'une décennie de s'entendre avec Hitler pour isoler l'URSS et
orienter les visées du IIIe Reich vers cette dernière.
Ainsi
en 1941, l'agression fasciste et la menace de sa domination sur le
monde réalise de fait l'alliance de l'URSS, des pays
impérialistes agressés et des peuples colonisés
dans un seul même camp antifasciste. Ce changement qualitatif
et momentané du système de contradiction se réalise
au cours du processus même des événements où
des retours en arrière sont possibles. Par exemple, lors de la
guerre Russo-finlandaise, au moment de cette parodie de guerre que
l'on appelle « drôle de guerre » entre
d'une part l'Allemagne et d'autre part la France et l'Angleterre,
c'est contre l'URSS que se développent les volontés
d’agression, notamment franco- anglaises, qui n'ont pas hésité
à envoyer des troupes du coté finlandais, alors que
l'URSS cherchait à renforcer sa capacité de défense
contre l'inévitable agression nazie. De même au fur et à
mesure que les sibériens subissaient des défaites à
l'Est face à l'armée rouge, au fur et à mesure
le système de contradiction évoluera vers ce que l'on
appellera plus tard la « guerre froide ». C'est
à dire que l'opposition entre le socialisme et le capitalisme
prenait le dessus sur l'alliance antifasciste... C'est aussi une
évolution similaire que l'on peut observer entre les
puissances impérialistes et les peuples opprimés. En
1943, c'est justement l'année du grand tournant de la guerre
où, avec la victoire décisive de Stalingrad, des
retournements d'alliance sont envisagés sérieusement
dans les chancelleries occidentales. L'impérialisme mondial
prend peur devant un rapport de force défavorable qui
s'annonce pour l'après-guerre. Même la littérature
bourgeoise est pleine de récits montrant la recherche effrayée
d'une possibilité de retournement ou de rupture d'alliance. La
question qui se posait dès lors au MCI et à l'URSS,
c'était « que faire pour qu'un tel projet ne puisse
pas voir le jour? ». On sait que dès la
capitulation de Von Paulus, le Maréchal hitlérien
devant les portes de Stalingrad, les nazis ont lancé une vaste
campagne sur le thème du « rideau de fer qui tombe
sur l'Europe » dans le but d'apeurer les impérialistes
alliés avec l'URSS dans le front antifasciste. Le but de cette
propagande de Goebbels était de briser le front antifasciste
et de favoriser un retournement d'alliance. Dans cette agitation
fébrile et affolée des Nazis, il désignait
l'existence formelle de l'IC comme « preuve »
de leurs assertions sur la « cinquième colonne
bolchevik manipulée par Moscou ». Il fallait donc
mettre en place tous les éléments permettant de
renforcer la lutte antifasciste qui avait comme principal but le
renforcement des forces du socialisme et de la lutte des peuples
opprimés.
Dans
certains Etats capitalistes, la frayeur de la bourgeoisie était
telle qu'elle a choisi de s'allier avec les fascistes contre les
communistes et la population luttant pour la libération. Dans
d'autres Etats, c'est une partie significative de la bourgeoisie qui
a fait le choix contraire.
Dans
la majorité des cas, la situation est plus complexe, la
bourgeoisie se scindant en deux ou plusieurs fractions avec des choix
divers. Comme on le voit, le système de contradiction est
d'une grande complexité, évolue très vite et est
d'une très grande mobilité dans un sens comme dans un
autre selon les cas. En plus la situation de guerre à
proprement parler rend impossible un système de direction
centralisé de l'IC. C’est d'ailleurs ce que nous
explique précisément la résolution relative à
la décision de dissolution de l'IC, prouvant du même
coup sa grande force idéologique par le fait qu'elle ait prévu
dès le 7e congrès une telle possibilité et en
ait tiré les conclusions organisationnelles adéquates:
« Déjà avant la guerre, il devenait plus
évident de jour en jour que, devant la complication de la
situation nationale et internationale de chaque pays, la direction
des forces ouvrières par un seul centre international
rencontre des difficultés insurmontables. Les profondes
divergences dans le développement des divers pays, le
caractère hétérogène et souvent même
contradictoire de leur institutions politiques, la diversité
des cadences de leur développement social et politique, les
différences dans les degrés de conscience de classe et
d'organisation de la classe ouvrière dans chaque pays, posent
pour chaque pays, d'autres tâches et d'autres devoirs »
(résolution Mai 1943).
En
effet, le 7e congrès en 1935 avait maintenu comme tâche
au CE l'élaboration des orientations générales.
Il avait été souligné que l'exécutif se
rapproche des réalités concrètes des situations
nationales, afin d’éviter que les orientations générales
de l'IC ne soient un frein au développement du mouvement sur
le terrain. Pour ce faire le 7e congrès avait adopté
une série de décisions que nous rappelons:
« élaborations de commissions par grandes zones
géographiques - mise en place de conseillers auprès de
chaque comité central - séances plénières
de l'exécutif plus régulières et plus nombreuses
-, augmentation du nombre des membres de l'exécutif afin que
le plus grand nombre de pays et de partis soient représentés
- demande aux PC d'envoyer à l'exécutif leurs cadres
pour l'analyse de la situation de leurs pays ».
L'ensemble de ces mesures avait pour objet, après le transfert
par le 7e congrès de la direction à chaque comité
central, de se donner les éléments les plus nombreux
possibles pour l'élaboration des orientations générales.
Après
le déclenchement de la guerre sont mis sur pied des centres
par zones de l'IC. C'est le cas du centre de Bruxelles tout le temps
que ce pays n'est pas touché par la guerre. Mais l'extension
du conflit au monde rendait difficile - chasse aux communistes et aux
représentants de l'IC - le fonctionnement de ces
centres.
Les
liaisons avec le Comité Exécutif de ces centres de
zones devenaient de plus en plus intermittentes, de moins en moins
régulières.
Objectivement
une direction, même élaborant les orientations générales
devenait de plus en plus impossible et inefficace. Maintenir un tel
centre dont l'existence était devenue formelle, c'était
retarder sur le réel dogmatiquement et nuire à la tâche
du moment de maintien et du renforcement de la lutte contre le
fascisme.
Dès
lors, chaque PC a été amené à faire le
travail à partir des réalités concrètes
au plan national. Les résultats en sont l'implication de
premier plan des PC dans la libération antifasciste de chacun
des pays. Une telle implication des PC dans la libération
antifasciste a été préparée par l'IC lors
de son dernier congrès en 1935. Cette situation explique aussi
l'existence des positions apparemment contradictoires sur l’analyse
de la nature de la guerre à travers ses diverses phases et des
taches des PC. Les théoriciens bourgeois et trotskistes ont
tenté plusieurs fois de trouver les racines d'une divergence
au sein du MCI en opposant par exemple les positions de Dimitrov en
1939, caractérisant à ce moment la guerre comme
anti-impérialiste, celle des différents PC la
caractérisant à des moments différents de guerre
antifasciste et celle de J.V. Staline en 1946 caractérisant la
guerre d'antifasciste et de libération du début à
la fin. La contradiction dans certains cas a pu être réelle,
certains PC utilisant la dimension antifasciste de la guerre pour
justifier leur opportunisme et d'autres persistant dans la
caractérisation inter-impérialiste pour justifier leur
sectarisme de gauche, alors que la situation exigeait un large front
antifasciste. Mais ces cas sont limités dans leur majorité,
les PC se sont acquittés des devoirs qui leur incombaient dans
la lutte pour la défaite de la bête immonde fasciste.
Dans ces cas, l'apparente contradiction était le rejet de la
diversité des situations concrètes dans lesquelles
militaient les différents PC et l'impossibilité
objective de rassembler les matériaux indispensables à
l'élaboration de la ligne générale. C'est ce
qu'explique la résolution de dissolution de l'IC: « La
guerre mondiale déclenchée par Hitler a encore accentué
les différences et a créé un profond abîme
entre les pays de dictatures fascistes et les peuples libres réunis
dans la coalition anti-hitlérienne. Tandis que dans les pays
du bloc hitlérien, les ouvriers et les masses travailleuses
ont pour tâches de préparer de toutes leurs forces la
défaite de leur Etat, de saper de l'intérieur la
machine de guerre hitlérienne et d'abattre leurs gouvernements
fauteurs de guerres, les masses travailleuses de la coalition
antihitlérienne ont le devoir sacré de soutenir de
toutes leurs forces les efforts de guerre de leurs gouvernements afin
l'écraser le plus tôt possible les puissances fascistes
et d'assurer l'égalité des droits de tous les peuples.
Il ne faut pas perdre de vue non plus que, dans certains pays les
antifascistes ont des tâches particulières. Ainsi dans
les pays occupés par les fascistes hitlériens, les
ouvriers et les masses travailleuses ont comme tâche
l'organisation de la lutte armée contre l'occupant et sa
transformation en guerre de libération nationale. En même
temps l'union des plus larges masses populaires sans différence
de parti, dans la lutte aux côtés des pays de la
coalition anti- hitlérienne a montré que l'essor
national et la mobilisation des masses par l'avant garde ouvrière
dans chaque pays peuvent être réalisés de la
meilleure façon dans le cadre de chaque Etat en parculier »
(idem). Quant au processus de la connaissance, lié à
l'absence de matériaux suffisants pour élaborer une
orientation générale cernant en détail
l'hétérogénéité croissante des
situations, la question de la nature de la guerre montre les étapes
suivantes: - Le 7e congrès analyse les tendances principales
de la guerre en préparation comme une guerre
inter-impérialiste, mais met en évidence déjà
en 1935 des dimensions croissantes antifascistes. - Au début
de la guerre, les politiques de la « drôle de
guerre » et les tentatives d'interventions coalisées
franco- anglaises en Finlande contre l'URSS, semblent orienter le
cours des choses vers une guerre contre le socialisme. C'est là
à coup sûr la dernière péripétie de
la politique de « non intervention »
franco-anglaise que l'invasion hitlérienne de la France va
définitivement briser.
Rappelons
que l'avant dernière péripétie de la duplicité
des Etats capitalistes « démocratiques »
est qu'au moment des négociations qui vont déboucher
sur le « Pacte de non agression » proposé
par Hitler et saisi par la direction Soviétique, les
pourparlers de Moscou sont menés par des délégués
anglais et français sans réel pouvoir de décision.
- L'agression de l'URSS en 1941 et la formation de la coalition
antifasciste permet de caractériser sans aucun doute possible
la guerre comme antifasciste et de libération nationale.
Ce
n'est qu'après la guerre et au regard de l'ensemble de
l'évolution des différentes étapes du conflit,
que suffisamment d'éléments sont réunis pour
permettre de caractériser définitivement la seconde
guerre mondiale comme une « guerre antifasciste et de
libération nationale ». Seuls les tenants de
l'analyse subjective et éclectique ne parviennent pas à
saisir que la pertinence d'une analyse découle de la prise en
compte du maximum de facteurs matériels et objectifs. A ce
niveau, il ne s'agissait plus seulement du fascisme dans les rapports
intérieurs de classes d'un pays donné, mais de la
tentative bien réelle de mise en application du « programme
fasciste d'hégémonie mondiale et d'éradication
du bolchevisme mondial ».
Il
ne s'agissait plus seulement d'une lutte inter-impérialiste
pour les colonies et les zones d’influences comme en 1914-18,
mais bien de transformer tous les peuples du monde, y compris les
autres puissances impérialistes de la coalition antifasciste
en valets soumis à la domination du IIIe Reich. En 1943, le
Comité exécutif de l'IC n'était donc plus en
mesure de fournir les orientations générales dont le 7e
Congrès l'avait chargé, non par trahison ou par
défaillance, mais par impossibilité objective due à
la guerre. La mission confiée par le dernier Congrès de
l'IC au CE était devenue caduque parce que matériellement
et objectivement impossible.
La
dissolution de l’IC : Une décision juste et
opportune
Aux
raisons avancées ci-dessus, il faut en avancer une autre.
C'est le travail antécédent de l'IC avec la formation
de cadres compétents, qui a permis à la plupart des PC
de suppléer à l'existence d'orientations générales,
par des élaborations justes répondant aux besoins de
l'heure, comme l'atteste le fait que la plupart des PC ont été
à la tête de la résistance antifasciste. Que
certains des PC connurent des déviations droitières
importantes, comme le stigmatise la réunion de constitution du
Kominform en 1947, n'enlève en rien ce constat à la
gloire du MCI. Continuer à vouloir maintenir une forme
d'organisation périmée du MCI avec un centre
incapable de mener à bien sa tâche, c'était se
condamner par dogmatisme puéril à desservir, non
seulement les besoins concrets des luttes dans chaque pays, mais
aussi à l'échelle internationale, la lutte pour
l'écrasement du fascisme : « Les communistes
fidèles aux enseignements créateurs du
Marxisme-Léninisme n'ont jamais été partisans du
maintien, à tout prix, des formes d'organisations périmées.
Ils ont toujours subordonné les formes et les méthodes
d'actions aux intérêts politiques fondamentaux de
l'ensemble de la classe ouvrière et aux particularités
concrètes de la situation historique donnée ainsi
qu'aux tâches qui en découlent. Ils se rappellent
l'exemple de Karl Marx qui, quand l'AIT avait rempli sa tâche,
la création de partis ouvriers nationaux de masse, n'a pas
hésité à dissoudre cette première
Internationale. Partant de ces considérations et tenant compte
du fait de la naissance et de la maturité des partis
communistes et de leur cadres dirigeants dans la plupart des pays, et
considérant que les conditions de la guerre actuelle mettent à
l'ordre du jour la dissolution de l'IC comme centre dirigeant du
mouvement ouvrier, le présidium du CE de l'IC, empêché
par les circonstances créées par la guerre
de convoquer un Congrès mondial, se permet de soumettre aux
sections de l'Internationale la proposition suivante… »
(idem).
La
référence à la première Internationale
n'est pas anodine. Elle reflète le fait que l'IC est
consciente que certaines sections, certains communistes s'appuient
sur la nécessité du front antifasciste pour justifier
des déviations opportunistes de droite. Le Kominform
critiquera très sévèrement trois des plus
importantes sections de l'IC pour de telles déviations: Les PC
américain, italien et français. Sur la procédure
de dissolution, point n'est besoin d'argumenter plus sur
l'impossibilité de réunir au cours de la guerre toutes
les sections en congrès. Au total, 31 sections ont approuvé
la dissolution de l'IC, aucune opposition ne s'est exprimée et
le reste des sections n'a pu faire parvenir sa position à
cause justement des conditions de la guerre. C'est donc une décision
démocratiquement adoptée.
Reste
la question du moment de la dissolution, puisqu'elle avait
pratiquement cessé d'exister depuis plusieurs années.
Outre
la nécessité d'éviter que certains
déviationnistes n'utilisent la popularité et l'autorité
de l'IC au sein des peuples et du prolétariat mondial pour
justifier leur opportunisme grandissant -nous pensons aux premiers
balbutiements de l'Eurocommunisme, du Titisme ...- c'est dans le
contexte et les enjeux de la situation objective de 1943 qu'il faut
en chercher les causes. C'est l'année de la victoire
historique de l'armée rouge à Stalingrad. C'est le
grand tournant de la guerre qui met fin aux espoirs nazis et
constitue la première défaite des allemands depuis
l'avènement d'Hitler et sa marche triomphale vers la conquête
du monde. Cette victoire a surpris non seulement les nazis, qui
pensaient en finir assez facilement avec le bolchevisme, mais elle a
aussi pris de court les alliés impérialistes
antifascistes de l'URSS. Elle les a confrontés aux
implications éventuelles d'une victoire possible de l'URSS.
L'Allemagne nazie comprend dès lors l'impossibilité
d'un combat sur deux fronts à la fois et tente de parvenir à
un accord avec les USA et les Anglais.
Au
fur et à mesure que se développait la contre-offensive
soviétique, une formidable campagne de propagande animée
par Goebbels était déclenchée, dont le but était
de rompre l'alliance antifasciste. Les thèmes de cette
campagne portaient sur le « rideau de fer qui tombe sur
l'Europe », l'appel au « combat pour les
libertés démocratiques et l'indépendance des
peuples d'Europe » le danger ou la menace du
« totalitarisme et de la barbarie bolchevik »
etc. On retrouve là tous les thèmes largement repris
par l'Occident impérialiste et la néo-bourgeoisie
soviétique qui vient de déboucher avec la Pérestroïka
Gorbatchévienne sur la contre révolution de
« velours ». L'existence même formelle du
Komintern devenait la « preuve » dans cette
propagande nazie du fameux « péril rouge ».
Une telle calomnie reçut un certain écho dans les pays
de l'alliance antifasciste, lesquels déjà se posaient
la question des conséquences incalculables pour leurs intérêts
de classe, d'une éventuelle libération de toute
l'Europe par l'armée rouge. Une fraction de la bourgeoisie
américaine et anglaise paniquant devant une telle perspective,
se mit à reprendre les insinuations des fascistes. Ainsi le
New York Times du 14 février 1943 écrivait: « Lentement
et inexorablement, les armées russes continuent d'avancer vers
l'Ouest (...). Ces armées suscitent dans bon nombre d'esprits
des interrogations qui fournissent un terrain fertile à la
propagande nazie de dernière heure, laquelle agite
l'épouvantail de la domination bolchevik sur l'Europe ».
Suite à de telles interrogations, de véritables
provocations plus ou moins ouvertes furent montées par les
alliés américains et anglais de l'URSS, notamment, à
propos de la promesse de l'ouverture du second front. L'URSS
supportait, à cette époque, seule le poids essentiel de
la guerre en Europe. Ce second front européen devait être
le débarquement en France des troupes Anglo-américaines.
Initialement
prévu d'abord en 1942, puis en 1943, il ne fut exécuté
qu'en 1944: « Il est inutile de dire que le
gouvernement soviétique ne peut s'accommoder d'une telle
méconnaissance des intérêts fondamentaux de
l'Union Soviétique dans la guerre contre l'ennemi commun. Vous
m’écrivez que vous comprenez fatalement mon
désappointement. Je dois vous dire qu'il ne s'agit plus d'un
simple désappointement du gouvernement Soviétique. Il y
a de la confiance envers nos alliés, confiance qui est soumise
à lourde épreuve. Il ne faut pas oublier qu'il s'agit
de sauver la vie de millions d'hommes dans les régions
occupées de l'Europe occidentale et de la Russie et de
diminuer les sacrifices énormes des armées soviétiques,
sacrifices à côté desquels les sacrifices
anglo-américains apparaissent comme peu importants »
(lettre de Staline à Churchill du 24 juin 1943). On ne
répétera jamais assez que ce sont les peuples de l'URSS
et l'Armée Rouge qui ont payé le plus lourd tribut dans
la guerre contre la barbarie nazie. Les 23 à 30 millions de
morts soviétiques auraient été moins nombreuses,
si les alliés occidentaux avaient respecté leurs
engagements d'ouvrir le second front en France dès 1942. En
lieu et place, dès le 15 avril 1943, le gouvernement polonais
en exil à Londres, lançait brusquement une campagne de
presse antisoviétique, en écho à la campagne
Nazi reprise par la presse britannique. attribuant le massacre de
Katyn à l'URSS: « Dans mon message du 21 avril
(1943) au sujet de la rupture des relations avec le gouvernement
polonais, je pars du fait que la campagne antisoviétique
commencée le 15 avril (1943) dans la presse par les polonais,
aggravée d'abord par la déclaration du ministre
polonais de la défense nationale et ensuite par la déclaration
du 17 avril (1943) du gouvernement polonais, n'a rencontré
aucune opposition à Londres, et qu' en outre le gouvernement
soviétique n 'avait pas été averti de la
campagne antisoviétique en préparation du coté
polonais, bien qu'il soit difficile d'imaginer que le gouvernement
britannique n 'ait pas été informé de la
campagne projetée » (lettre de Staline à
Churchill du 4 mai 1943). Signalons que tout ce branle-bas
antisoviétique fait suite à la victoire de Stalingrad.
A cette duplicité et fourberie évidente, s'ajoute la
décision américano-anglaise de fin mars 1943, de ne
plus envoyer par Mourmansk, les convois d'armements promis à
l'URSS : « J'ai reçu votre message du 30
mars me communiquant la nécessité où vous êtes,
ainsi que M. Roosevelt de supprimer les départs des convois
pour l'URSS jusqu'en septembre. Cette décision inattendue
signifie une diminution catastrophique de la livraison à
l'URSS des matières premières stratégiques et de
l'armement par la Grande-Bretagne et les USA... »
(lettre à Churchill du 2 avril 1943). En 1942, sur les 240
divisions allemandes, 179 combattaient sur le front de l'Est contre
l'URSS, auxquelles il faut ajouter les troupes alliées à
l'Allemagne nazie dont des divisions de l'Espagne franquiste qui
n'étaient pas officiellement en état de guerre et qui
avait conservé des relations diplomatiques avec les USA et
l'Angleterre. Au total donc, il y avait 240 divisions qui menaient la
guerre contre l'URSS, alors que face à « l'opération
Torch » en Afrique du nord, il y avait seulement 4
divisions allemandes et 11 italiennes. La deuxième campagne
des troupes anglo-américaines était un prolongement de
« l’opération Torch » en Sicile
puis en Italie. Le débarquement en Italie fut réalisé
sans véritables combats parce que des arrangements avaient eu
lieu et seules des troupes italiennes furent immobilisées et
se rendirent sans opposition sérieuse. En fait, des
négociations avaient été entamées dès
l'annonce de la victoire de Stalingrad et les offensives de l'armée
rouge qui avaient détruites 10 divisions italiennes. Les
fascistes italiens furent visités par le Cardinal Francis
Spellman de New York en février 1943. Une entente fut
contractée entre le Vatican, les USA et les fascistes italiens
pour arrêter Mussolini et la formation d'un gouvernement
fasciste qui devait capituler ensuite en facilitant la pénétration
des troupes anglo-américaines en Italie: « Ce
serait une erreur grave de briser toute la structure et l'expression
de l'appareil d'Etat italien au moment où ce dernier est
flexible, souple et dans des conditions formatrices pour les
puissances qui lui viennent en aide, l'Angleterre et les Etats-Unis »
(déclaration de Churchill devant la Chambre des Communes) et
d'ajouter dans une autre déclaration que « si le
cadre de la monarchie et du conservatisme, représenté
par des hommes comme Badoglio, venait un jour à disparaître,
l'Italie se tournerait rapidement vers la Révolution
Communiste » (Churchill - cité dans W.H. Mc
Neil, America, Britain and Russia : Their cooperation and
conflict). Cette duplicité des alliés de l'URSS
était relatée dans un mémorandum du Conseiller
de Roosevelt en août 1943, Willlam C. Bullit qui l'avisait
d'une « catastrophe politique » en Europe suite
au désastre nazi devant Stalingrad. W. C. Bullit y déclarait
que la conquête hitlérienne de l'Europe était
« une menace intolérable pour nos institutions
libres », mais il y affirmait aussi que « la
domination de l'Europe par la dictature communiste de Staline serait
une menace aussi grande ». On voit là l'origine de
la campagne « Staline = Hitler ». Le général
américain Marshall qui a donné son nom au « plan
Marshall » suggérait dès août 1943
d'agir à partir de la position suivante: « Dans
l'éventualité d'un succès principalement en
faveur des Russes...les Allemands pourraient faciliter notre
pénétration dans le pays pour repousser les Russes ».
Et c'est cela qui est devenu la pierre angulaire de la politique des
USA et de l'Angleterre en 1943 : Laisser l'URSS supporter seule tout
le poids de la guerre dans le but qu'elle sorte le plus affaibli
possible de cette terrible épreuve. Ils cherchaient un rapport
de force défavorable à l'URSS au sortir de la guerre,
car après la défaite nazie, lors de la gigantesque
bataille de Koursk au cours de cette même année 1943:
l'issue victorieuse pour I'URSS ne faisait plus aucun doute : « Si
la bataille de Stalingrad annonçait le déclin de
l'armée fasciste allemande, la bataille de Koursk l'a placée
devant une catastrophe » (Staline - Tome XIV).
Au
regard de toute cette fourberie et des besoins de la lutte
antifasciste, le moment de la dissolution de l'IC apparaît
judicieux et opportun. C'est d'ailleurs ce qu'exprime J.V. Staline
lui même à l'agence Reuter le 28 mai 1943: « La
dissolution de l'IC est sage, car ; a) elle met en évidence
le mensonge des hitlériens qui affirment que « Moscou
essaie de s'immiscer dans la vie des autres nations pour les
bolcheviser ». Maintenant on a mis fin à cette
calomnie. b) elle met en évidence la calomnie des adversaires
du communisme au sein du mouvement ouvrier qui affirment que les
partis communistes des divers pays agissent non dans l'intérêt
de leur peuple, mais obéissent à des ordres étrangers.
On a également mis fin à cette calomnie. c) elle
facilite l'activité des patriotes dans les pays épris
de liberté afin d'unir les forces progressistes de leur pays
respectifs, sans distinction de partis, ni de croyances religieuses,
dans un camp unique de libération nationale afin de développer
la lutte contre le fascisme. d) elle facilite l'activité des
patriotes de tous les pays afin d'unir tous les peuples épris
de liberté dans un seul camp inter national de lutte contre la
menace de domination du monde par l'hitlérisme... ».
C'était
la plate-forme soviétique contre la campagne hitlérienne
cherchant à briser l'alliance antifasciste, mais aussi contre
les manœuvres qui voyaient le jour chez les alliés
bourgeois impérialistes de l'URSS. C'était le programme
soviétique de ralliement des peuples à la lutte
conséquente contre le fascisme. En 1939, le monde ne
ressemblait pas tout à fait à celui d'aujourd'hui, même
si avec la défaite de l'URSS et du socialisme, quelques
comparaisons sont encore possibles, notamment la résurrection
du fascisme en Europe. L'Allemagne était hitlérienne;
l'Autriche était fasciste; Le fascisme avait triomphé
en Italie, en Espagne, en Tchécoslovaquie, en Roumanie, en
Hongrie, en Yougoslavie, en Bulgarie, en Pologne, en Finlande.
Hitler
déclenche sa « blitzkrieg » et s'empare
de toute l'Europe à l'exception de la Suisse et de
l'Angleterre réduite à son île et subissant des
bombardements en règle. Puis, utilisant toute la base
infrastructurelle (économique et militaire) et le potentiel de
tout le continent européen, il se lance dans un assaut dont la
brutalité est sans équivalent dans l'histoire contre la
patrie des ouvriers et des paysans. Le Japon, de son côté,
s'était lancé dans un programme de conquête
militaire du continent asiatique. Alors si l'on garde en tête
les circonstances réelles et concrètes de la guerre et
plus particulièrement celles de 1943, il apparaît
clairement que le maintien « artificiel » d'une
forme d'organisation devenue périmée ne peut être
que l'exigence d'éléments dogmatiques atteint de la
« maladie infantile » ou complètement en
désaccord avec le caractère antifasciste et de
libération nationale de la seconde guerre mondiale.
Une
telle exigence ne pouvait que faire le jeu des hitlériens et
des impérialistes qui cherchaient à rompre le front
antifasciste.
Le
Programme d'écrasement des fascistes était la tâche
fondamentale de l'heure et le principe de la « soumission
des intérêts particuliers et locaux aux intérêts
généraux du mouvement » était la
pierre angulaire de la politique communiste.
Où
cherchons nous des explications ?
Toute
la littérature bourgeoise et impérialiste cite Trotski
sur la dégénérescence de l'URSS en Etat
« bureaucratique – totalitaire »,
« nationaliste » et la transformation parallèle
de l'IC en instrument servant les intérêts nationaux de
l'URSS. Trotski n'est jamais remis en question et des multiples
versions de ses théories ont été et sont
véhiculées par les formidables moyens de la bourgeoisie
internationale.
Khrouchtchev
est l'autre personnage qui fut utilisé par les impérialistes
et les trotskistes pour accréditer toute la campagne anti-
communiste qui n'a cessé de déferler ces quatre
dernières décennies depuis l'avènement des
révisionnistes au pouvoir en URSS. Avant et pendant la seconde
guerre mondiale il y avait une sympathie réelle et toujours
croissante sur les formidables réalisations de l'URSS et
l'autorité et le prestige du MCI connaissait un plein
épanouissement.
C'était
la période où le mouvement ouvrier et la lutte des
peuples opprimés comptaient. Mais avec la « guerre
froide » l'impérialisme a embauché les
anciens nazis, les a protégés pour les utiliser avec
les trotskistes et la social-démocratie dans sa croisade
contre le communisme. Cette croisade reçut un écho
désorganisateur avec la victoire des révisionnistes
Khrouchtchéviens dans le PCUS dans les années 1950.
L'offensive idéologique et subversive de l'impérialisme
trouva un allié « crédible » chez
les révisionnistes et les eurocommunistes, déstabilisant
le MCI et laissant libre cours au développement des déviations
de droite et de « gauche » tant combattues par
l'IC. Si l'on prend la peine d'étudier de près ces
déviations opportunistes, l'on peut se rendre compte qu'elles
n'ont pas surgi comme par enchantement de la « cuisse de
Jupiter ».
Elles
sont les produits directs de l'offensive de l'impérialisme et
de la bourgeoisie mondiale depuis les premiers pas de la dictature du
prolétariat et du pouvoir des Soviets en URSS.
Nous
sommes à une période historique où la
contre-révolution temporairement victorieuse cherche à
criminaliser le communisme et à discréditer le
socialisme. Pour y arriver, tout est bon: l'idéologie
social-démocrate, le trotskisme, l'idéologie fasciste
dans ses multiples formes, le libéralisme, le nationalisme
bourgeois... Il s'agit d'éloigner à tout jamais la
classe ouvrière et ses alliés (peuples opprimés,
paysans) de son idéologie de classe et de la contribution
historique des générations communistes et ouvrières
qui réalisèrent les prouesses du passé.
Devant
une telle situation, nous avons un choix à faire. Nous pouvons
demeurer confus et trouver les prétextes les plus futiles pour
ne rien faire et crier avec les loups ou encore se renier
honteusement comme beaucoup le font de nos jours. Ou nous pouvons et
devons accepter de jeter un regard en arrière en dépit
de la complexité de ce qui est arrivé et nous dire: si
nous sommes en si mauvaise posture aujourd'hui, à quel moment
étions nous, à quel moment le mouvement ouvrier et
populaire, à quel moment la lutte de classe révolutionnaire
et celle des peuples opprimés étaient-ils en meilleure
position ? Et pourquoi étions-nous dans une telle position
favorable? Alors si la théorie est autre chose qu'une somme de
formules abstraites apprises par cœur, si la théorie est
plutôt l'expérience du prolétariat international
et des peuples opprimés dans leurs luttes pour la libération
et le socialisme, si la théorie est la somme des leçons
de cette expérience, il est grand temps de s'approprier ces
leçons.
La
situation actuelle de contre-révolution mondiale est très
sérieuse. Nous ne pensons pas que l'on puisse retourner
celle-ci en un tour de main et passer immédiatement à
la contre-offensive.
Mais
à celles et ceux qui sont de notre combat de classe, nous
disons qu'il n'y a qu'une façon d'y parvenir; C'est de se
rapproprier les positions du prolétariat international et en
premier lieu les leçons et l'expérience théorique
et pratique accumulées par le mouvement ouvrier et communiste
mondial, telle que synthétisées et mises en pratique
par K. Marx, F. Engels, Lénine, le PCUS, le Komintern (l'IC)
et le Kominform... Nous devons nous appuyer sur ces acquis afin de
vaincre le révisionnisme, plutôt que de capituler devant
l'offensive bourgeoise-trotskiste, dont le but est de décapiter
la conscience révolutionnaire de classe du prolétariat
international et d'empêcher la réorganisation de son
avant-garde politique et idéologique.
|