Nous
publions ici un point de vue éclairant sur les visées
guerrière de l'impérialisme contre la Syrie, par le
Parti Communiste Grec, parti marxiste léniniste de masse
engagé pleinement dans les luttes sociales et politiques
actuelles du peuple grec. Ce point de vue dénonce les vieilles
ficelles de la propagande qui tente de justifier dans les pays
impérialistes le déclenchement de nouvelles guerres
« pour la démocratie »...
Source:
http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/
Article
publié dans Rizospastis du 30 avril - Interview de Elisseos
Vagenas, membre du Comité Central et responsable pour la
Section des Relations Internationales du Comité Central du
KKE, concernant les développements en Syrie et dans l’ensemble
de la région.
Récemment,
le 20 mars, le Comité Central du KKE a rendu publique son
jugement sur les derniers développements dans notre région.
Néanmoins, ces développements sont en train de prendre
une autre ampleur. Qu’est ce qui a changé dans les
dernières semaines ? Bien sûr les développements
sont en train de prendre une autre ampleur. Les principales
conclusions auxquelles est arrivé le Comité Central du
KKE sont encore exactes. Dans notre région (Balkans,
Méditerranée Orientale, Moyen-Orient, Afrique du Nord,
Caucase) des développements sérieux et dangereux sont
en train de se produire, qui sont caractérisés par
l’intensité des contradictions entre les puissances
impérialistes, dans une région qui contient
d'importantes ressources énergétiques et constitue une
« voie d'approvisionnement » pour les matières
premières d’Asie Centrale, de la mer Caspienne, du
Moyen-Orient destinées tant à l’Occident qu'aux
grandes puissances émergentes d’Asie (Chine, Inde, etc).
Les monopoles les plus puissants, les blocs impérialistes
et les puissances impérialistes émergentes sont pris
dans un tissu de contradictions et de luttes. Dans le cadre du
système impérialiste, les bourgeoisies de la région
recherchent des « axes » d’alliance, débouchant
sur des alliances et des accords, afin qu'elles puissent tirer profit
de la lutte pour les ressources naturelles et les parts de marchés.
Au même moment, nous voyons que les Nations Unies, l’OTAN,
les forces de police et militaires de l’UE, les bases
militaires et les flottes navales sont utilisés dans cette
lutte, tout comme toute sorte de prétexte. Depuis le
moment où l'analyse du Comité Central du parti a été
publiée, nous avons assisté à plusieurs
développements nouveaux, le plus important d’entre eux
étant l’intervention manifestement impérialiste
en Libye, avec la décision du Conseil de Sécurité
de l’ONU et l’intervention impérialiste non
déguisée des forces françaises et de l’ONU
en Côte d’Ivoire, aussi bien que les événements
sanglants au Yémen et en Syrie. Nous voyons que ccs
développements prennent une toute autre ampleur sur diverses
questions dans de nombreux pays et de nombreuses régions. Mais
ils posent continuellement, et de façon encore plus
persistante, la question de la relation entre capitalisme, crise et
guerre. Tout ce que nous avions noté sur le plan théorique
et à partir des expériences historiques passées
est en passe d'être confirmé par les développements
récents. Les manifestations qui se produisent en Syrie
plongent leurs racines dans le pays lui-même. Dans les
problèmes problèmes économiques, politiques et
sociaux que la classe ouvrière et les autres couches
populaires vivent. Néanmoins, il est évident qu’elles
sont instrumentalisées par les forces bourgeoises et les
centres impérialistes. Les médias grecs et
internationaux ont présenté les événements
en Syrie comme un nouveau «soulèvement» populaire
porteur de revendications démocratiques, réprimé
dans le sang par les autorités. Quelle est la position du KKE
vis-à-vis de ces mobilisations, et en particulier si l'on
prend en compte la solidarité qu’il a exprimé par
rapport aux mobilisations en Égypte et en Tunisie ? Nous
suivons très attentivement les développements dans la
région, et pas seulement à partir d'une seule source.
Le KKE est habitué à prendre des positions publiques de
façon responsable et d’informer soigneusement les
travailleurs dans notre pays sur les événements se
déroulant tant au niveau national qu'international.
Nous
étudions les mobilisations, auxquelles des forces populaires
participent, en examinant les objectifs poursuivis par les forces
sociales et politiques qui se mobilisent dans un pays, tout comme les
puissances étrangères qui sont impliquées dans
ces mobilisations. Cela n’apparaît pas toujours dans
lesslogans qui sont mis en avant. Je devrais vous rappeler que dans
un passé relativement récent, nous avons eu
l’expérience de mobilisations populaires et ouvrières
qui, au nom de la « démocratie » et de la «
liberté », avaient une orientation réactionnaire
et contre-révolutionnaire, par exemple en Pologne dans la
période de «Solidarnosc». Cela est encore plus
vrai aujourd’hui puisqu’il y a de nombreux éléments
qui prouvent la déformation à grande échelle des
événements par les médias bourgeois
internationaux, orchestrée par la célèbre chaîne
Al Jazeera, basée au Qatar, et mise en avant comme le «
Cheval de Troie Ȏlectronique de la bourgeoisie dans la
région. Elle soutient la modernisation bourgeoise au niveau
politique et économique dans les pays d’Afrique du Nord
et du Moyen-Orient, aussi bien que les plans impérialistes
pour le «Grand Moyen-Orient». Quel
est ce plan? Quelles fins poursuit-il ? Comme nous
l'avions noté dans l'analyse du Comité Central, les
objectifs fondamentaux des impérialistes et non les prétextes
(concernant la « démocratie » et la « non
prolifération des armes nucléaires »), qui sont
défendus par ces plans sont : La modernisation bourgeoise
des régimes bourgeois dans la région, à la fois
à un niveau économique et au niveau de la
superstructure politico-légale, afin de sauvegarder autant que
possible une base stable pour l’expansion des groupes
monopolistiques dans les marchés de la région et le
renforcement de leur rôle au niveau international. La
préservation de leur accès aux ressources énergétiques
de la région et aux nouveaux gisements en Méditerranée
orientale. Le contrôle d’une vaste région, qui
est un « carrefour » pour le commerce et les transports.
Bien sûr, chaque puissance impérialiste poursuit ses
propres buts. Ainsi les efforts des Etats-Unis rencontrent et
continueront sans aucun doute de rencontrer l’opposition des
puissances rivales (notamment les principaux pays de l’UE, la
Chine et la Russie). Depuis qu'ils mettent en danger leurs plans de
pénétration dans la région afin que leurs
monopoles tirent des profits similaires dans la région.
C’estdans le cadre de cette compétition que nous devons
comprendre le démembrement du Soudan qui a été
encouragé, ainsi que l’intervention étrangère
en Côté d’Ivoire, l’intervention militaire
impérialiste en Libye et les plans pour son possible
démembrement. Ces développements peuvent encore
nous conduire à un scénario de déstabilisation
intégrale de l'ensemble de la région, ce qui créera
des problèmes pour l’approvisionnement énergétique
de l’UE – le rival des Etats-Unis – aussi bien que
pour la pénétration du capital et des produits chinois
en UE et en Afrique. L’impérialisme, stade suprême
du capitalisme, devient plus agressif dans les conditions de la crise
capitaliste. De plus, il peut utiliser la situation qui a été
créée afin d'atténuer les conséquences de
la crise mondiale capitaliste en canalisant les capitaux vers des
guerres dans la région. Les développements en Syrie
ne sont pas du tout déconnecté de ces plans. C’est
une chose qui transparaît dans les déclarations et
prises de position des dirigeants des puissancesimpérialistes,
des Etats-Unis et de l’UE, aussi bien que dans l’engagement
des puissances régionales, comme la Turquie ou l’Iran.
Vous voulez dire que les
événements en Syrie sont montés de toute pièce
depuis l'étranger ? Sont-ils un « instrument »
pour le renversement du gouvernement et du Président Assad ?
Bien sûr, les événements qui se
passent en Syrie plongent leurs racines dans le pays lui-même,
à travers les problèmes économiques, sociaux et
politiques que la classe ouvrière et les autres couches
populaires vivent. Ce sont des problèmes qui se sont allés
en s'intensifiant dans les dernières années, en raison
de politiques de privatisations, de diminution des droits et des
revenus de la classe ouvrière et des couches populaires, qui
ont été mises en œuvre dans les intérêts
de la bourgeoisie nationale. Le KKE soutient les mobilisations
populaires qui luttent pour trouver une solution aux problèmes
du peuple, soutient le droit des peuples à se battre, comme la
longue histoire de notre parti le prouve. Notre parti essaye
d’étudier soigneusement ces développements
complexes, comme ceux d'aujourd’hui, de cette façon.
Ainsi, nous devons constater qu’aujourd’hui nous
avons beaucoup de preuves qui démontrent qu’il y a une
tentative d’intervention impérialiste étrangère
dans les affaires intérieures Syriennes, ainsi qu’une
manipulation des travailleurs dans les autres pays avec de fausses
preuves concernant les développements en Syrie. Par exemple la
plupart des prétendues « vidéo-preuve »
qu’ils nous montrent ont été filmées dans
d’autres pays ou dans d’autres situations. Cette
stratégie de manipulation de l’opinion publique a
conduit, dans les derniers jours, à la démission de
journalistes d’Al Jazeera. Des preuves se font jour
quotidiennement qui révèlent les ingérences des
pays voisins (Arabie Saoudite, Turquie). Des preuves qui révèlent
les tentatives d’exacerber et d’exploiter les tensions
religieuses, qui traitent de l’octroi d'armes et d'un
entraînement militaire de certains groupes à l’étranger.
Nous devons prendre tout cela en compte. Il est évident
que les États-Unis, l’UE et Israël ont un intérêt
à la déstabilisation et à l’affaiblissement
d’un régime bourgeois, qui avait des positions de
principe anti-impérialistes et était un allié
des forces anti-impérialistes en Palestine, au Liban etc. Nous
ne devrions pas oublier qu’aujourd’hui le territoire
syrien est sous occupation étrangère (d’Israël).
L’affaiblissement de ce régime ou même son
renversement pourrait ouvrir l’appétit des impérialistes
et de leurs plans pour attaquer l’Iran, sous le prétexte
de son programme nucléaire. Il pourrait même conduire à
un nouveau démembrement des Etats dans la région, et à
un effet domino de déstabilisation et de bains de sang, chose
qui amènerait de nouvelles guerres et interventions
impérialistes. Dans le passé, l’Union
Soviétique a eu des relations étroites avec la Syrie et
le parti au pouvoir Baath. Comment jugez-vous cette position et
comment cela a eu une influence sur la position du KKE par rapport à
la Syrie d'aujourd’hui ? Après la Seconde Guerre
Mondiale, grâce au rôle de l’URSS, en raison de sa
contribution à la victoire antifasciste, de la supériorité
du socialisme dans la reconstruction du pays, de la création
de démocraties populaires en Europe de l’Est, de
l’effondrement du colonialisme, il y eut des développements
positifs qui ont contribué à une transformation du
rapport de forces mondial. Bien sûr, le système
impérialiste international restait puissant, en dépit
du renforcement incontestable du camp socialiste. Immédiatement,
après la fin de la guerre, l’impérialisme sous
l’hégémonie des Etats-Unis, lança la
Guerre Froide et élabora une stratégie pour saper le
système socialiste et rassembler ses forces. Une rivalité
s’est mise en place entre les deux systèmes au niveau
mondial. Dans la même période, dans toute une série
de pays, comme la Syrie, la question de l’indépendance
nationale et du rassemblement autour de cet objectif était
devenue une question centrale. Indubitablement, la conquête de
l’indépendance nationale par les colonies constituait la
condition préalable, première et fondamentale, au
rattrapage du retard de développement prégnant dans
chaque secteur de la vie sociale. L’URSS et les autres pays
socialistes mirent en place une politique économique, et
d'autres formes de coopération et de soutien aux nouveaux
régimes, parmi eux la Syrie, avec comme objectif qu’ils
ne s'intègrent pas au marché international capitaliste,
aux blocs impérialistes, et aussi afin de renforcer dans les
fronts au pouvoir qui suivaient une orientation socialiste. Ces
efforts de l’Union Soviétique pour développer des
relations économiques, et même des alliances, avec
certains États capitalistes, contre les puissances
impérialistes plus puissantes, était louable et
compréhensible, puisqu’ils affaiblissaient le front uni
des impérialistes, en détachaient des forces, même
de façon temporaire, et utilisaient les contradictions dans le
camp impérialiste. Le problème est que cette politique
contingente de l’URSS, qui s'exprimait à un niveau
économique, diplomatique ou à d’autres niveaux
dans certains pays, a été érigée en
principe qui est devenu théorie et il y avait des discussions
sur une soi-disant « voie non-capitaliste de développement
». Cela a créé une confusion dans le mouvement
révolutionnaire international. Comme cela s'est révélé
dans la pratique, une telle « troisième voie vers le
socialisme » n’existe pas. Bien sûr, notre
parti cherche à tirer des conclusions de l’histoire du
mouvement communiste international. Ainsi, la position actuelle du
KKE contre la guerre impérialiste en Libye, ne signifie en
aucune façon l’approbation du régime de Kadhafi,
avec lequel dans tous les cas il n’a jamais eu de relations.
Ni, bien sûr, que notre opposition à l’intervention
militaire impérialiste imminente en Syrie, ou à la
possible attaque impérialiste contre l’Iran, ne signifie
que notre parti s’abstient de ses positions critiques par
rapport aux régimes bourgeois de ces pays. Avec cette
ligne, les communistes concentrent leur attention sur ce qui est
important, c'est-à-dire en ce moment la guerre impérialiste
et des interventions similaires dans la région, avec la
participation de notre pays. Dans
quelle mesure la participation des Partis Communistes Syriens au «
Front Patriotique » du parti Baath au pouvoir influence-t-il la
position du KKE ? Le KKE prend en compte les
positions, les analyses des partis communistes des autres pays. Nous
apprécions la position anti-impérialiste cohérente
des communistes en Syrie ainsi que leur contribution aux efforts pour
reconstruire le mouvement communiste international. Récemment,
juste avant le déclenchement de ces incidents, Ammar Bagdash,
secrétaire- général du Comité Central du
Parti Communiste Syrien a visité notre pays à
l’invitation du KKE. Ainsi, nous avons eu l’opportunité
d’échanger des opinions sur les développements
dans notre région. Nous sommes au courant et nous apprécions
l’activité des communistes en Syrie contre la
détérioration des relations de travail et la
facilitation des licenciements, pour l’instauration du droit de
grève, contre les plans de privatisations des terres et contre
la loi sur la privatisation des services publics et plus généralement
contre l’intégration de la Syrie aux organisations
impérialistes. Bien sûr, nous prenons leurs positions en
compte. Néanmoins, le KKE cherche toujours à se forger
sa propre opinion sur ces développements en prenant aussi en
compte nos propres expériences et analyses. L’expérience
historique de notre parti et du mouvement communiste international
par exemple a conduit à la conclusion que c’est une
erreur de séparer la bourgeoisie « compradore » et
la bourgeoisie « patriotique » et de poursuivre des
alliances avec cette dernière. Dn plus, nous avons clairement
fait comprendre que le pouvoir ne peut être qu'entre les mains
de la classe bourgeoise ou entre celles de la classe ouvrière.
Il ne peut y avoir de pouvoir intermédiaire ! Par
conséquent, nous abordons le régime bourgeois du Baath
en Syrie (Parti Socialiste Arabe), qui pour des raisons qui lui sont
propres s'est retrouvé dans un long et difficile conflit armé
avec l’État impérialiste d’Israël, et
donc avec les Etats-Unis, ainsi qu’avec d'autres plans
impérialistes dans la région, sur la base de l’analyse
de classe et sans idéalisations. Nous soutenons la demande
du retrait immédiat d’Israël des territoires
Syriens et de tous les territoires arabes occupés par l’armée
Israélienne avec le soutien des Etats-Unis et des autres
forces impérialistes. De plus, nous soutenons pleinement le
droit pour chaque peuple, y compris pour le peuple Syrien bien sûr,
à décider de son avenir sans interventions étrangères
impérialistes qu’elles soient militaires ou économiques
ou qu'elles prennent la forme de manipulations de nature politique et
idéologique. Qu’est
ce que le KKE suggère au peuple Grec et aux peuples de la
région ? Le KKE s’adresse à la
classe ouvrière et aux peuples dans la région en
insistant sur le fait que leurs intérêts s'identifient
avec la lutte commune anti-impérialiste et anti-monopoliste,
pour le retrait des organisations impérialistes, pour le
démantèlement des bases militaires étrangères
et des arsenaux nucléaires, pour le retrait des forces
militaires de leurs missions impérialistes et pour
l'intégration de ces luttes à la lutte pour le pouvoir.
Sur cette base, le peuple pourra vivre dans la paix et dans la
prospérité, et tirer profit de ses ressources
naturelles, qui appartiendront au peuple, dans son propre intérêt,
pour la satisfaction de ses besoins. Nous condamnons les guerres
impérialistes injustes et nous luttons pour le retrait de
notre pays de celles-ci! Cependant, nous savons que les guerres, qui
sont la continuation des politiques par d’autres moyens
violents, sont inévitables tant que la société
sera divisée en classes, et tant que persistera l’exploitation
de l’homme par l’homme, tant que l’impérialisme
régnera. La substitution de la paix à la guerre
dans l’intérêt des peuples ne pourra se réaliser
sans la substitution du socialisme au capitalisme car la paix
impérialiste prépare les nouvelles guerres
impérialistes.
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