Monsieur
le Préfet,
Je
vous informe que j’ai décidé de démissionner
de ma responsabilité de maire d’Houdain à compter
du 1er avril 2010. La relève est assurée et je
proposerai au conseil municipal de confier la responsabilité
de maire à Marc Kopaczyk, qui assume aujourd'hui celle de
premier adjoint.
Il
est logique afin de mettre en œuvre le programme que la
majorité des habitants a validé en mars 2008, de donner
un nouvel élan. La fonction de maire, même si elle est
éprouvante, permet de multiplier les rencontres humaines à
condition de mettre l'humain au cœur de notre engagement.
Je
démissionne de ma fonction de maire mais je demeure conseiller
municipal et militant communiste convaincu et actif.
Chaque
semaine depuis que je suis élu (mars 1983), de 10 à 25
personnes me sollicitent prioritairement pour un emploi, pour un
logement ou en raison de difficultés financières.
Et
ces dernières années le constat s’aggrave,
souvent dramatiquement. Un homme de 53 ans vient de m’écrire
«monsieur le Maire, je n’attends plus que la mort».
Qu’a dû subir un être humain pour en arriver là?
Malgré
la crise (organisée par qui ?), la France est de plus en plus
riche et loin de la faillite (quoique qu’en disent les menteurs
qui nous dirigent) mais des millions de Français sont de plus
en plus pauvres.
Une
centaine de PDG (essentiellement autour du CAC 40 et de la bourse)
dirigent la France, se croient sortis de la cuisse de Jupiter,
croient «mériter» leur super salaires alors
qu’aucun d’entre eux ne devrait gagner plus de 10 fois le
salaire de base de leurs salariés (peut-être même
pas plus de 5 fois, à l’image de la «cité
idéale» de Platon) et nous ont plongés eux-mêmes
dans la crise dont ils prétendent vouloir nous sortir !
Ces
PDG ont trouvé 2 dociles exécuteurs de leurs basses
œuvres: Messieurs Sarkozy et Fillon qui leur obéissent
au doigt et à l’œil, même si une
intelligente mise en scène médiatique donne
l’impression de l’inverse!
Mais
les rôles sont bien répartis: aux PDG et actionnaires le
profit; à messieurs Sarkozy et Fillon, le boulot, le sale
boulot (qui sera récompensé) de trouver des boucs
émissaires s’il y a un blocage! Et quels meilleurs boucs
émissaires que les Jeunes et les Etrangers !
Pour
les Jeunes, multiplication des lois répressives (prison dès
l’âge de 12 ans, pour certains sarkozystes! prison plus
longtemps; repérage des futurs délinquants dès
l’âge de 2 ans, etc.). Décidément les
jeunes n’ont jamais la cote! On les appelait les «apaches»
il y a un siècle, les «blousons noirs» dans les
années 60 et les «jeunes des cités et banlieues»
aujourd’hui: de la «racaille» selon qui vous savez!
Et pourtant, à un premier ministre en visite dans son lycée
et qui lui avait demandé: «que faut-il faire pour lutter
contre la drogue et la délinquance?» un jeune avait
répondu: «nous donner confiance en l’avenir».
Mais pour que les jeunes aient confiance en l’avenir, il faut
changer le présent, le présent désespérant
que leur font le MEDEF et monsieur Sarkozy. Les jeunes ne sont pas un
problème, ils sont la solution! Ils ont besoin de confiance,
pas de caméras de surveillance !
Quant
aux Etrangers, ils sont une fois encore des boucs émissaires
(comme souvent au long de l’histoire humaine) et le débat
puant voulu par M. Sarkozy sur l’identité nationale
vient d’en être une triste illustration au point que de
nombreux habitants de la planète se demandent ce qu’est
devenue la patrie des droits de l’homme.
«Révolution
française réveille-toi! Ils sont devenus fous!»
comme si la patrie des droits de l’homme ne connaissait plus
que les droits de la bourse! Comme d’autres, j’ai honte
de ce que mon pays fait à certains étrangers. Comme
d’autres, je suis fier d’en avoir aidés, cachés,
protégés, au nom de la dignité humaine.
Permettez-moi,
Monsieur Le Préfet, d’en venir à la ville
d’Houdain et à la casse de ses services publics.
En
novembre-décembre 2002, première tentative de fermeture
de la gendarmerie d’Houdain. Echec grâce à la
mobilisation des habitants et de leurs élus, avec la première
sortie des tracteurs («tracteur» à Houdain: terme
générique pouvant signifier «tracteur» en
tant qu’engin agricole, mais aussi «pétition»,
«manif», «référendum municipal»,
«opération ville en colère», «opération
escargot» ou «votation citoyenne»...).
En
2003, fermeture du point de «police de proximité».
En
2005, tentative de fermeture de la permanence de la Sécurité
Sociale. Echec grâce à la menace de sortie des
tracteurs.
En
2006, tentative de fermeture du centre de tri de la Poste. Echec
grâce à la mobilisation. Mais depuis, fragilisation du
service.
En
2006, fermeture de la DDE.
En
2006, tentative de fermeture du Trésor Public. Echec grâce
à la sortie des tracteurs. Nouvelles tentatives en 2007 et
2008. Nouvel échec, mais nouvelles menaces de fermeture en
2011.
En
2007, fermeture de la permanence de la Sécurité
Sociale.
En
2009, fermeture du Tribunal d’Instance.
En
2010, nouvelles menaces sur la gendarmerie. Mais belle mobilisation
le 4 février, que nous recommencerons si nécessaire.
Un
haut fonctionnaire (dont je tairai le nom) d’un ministère
(dont je tairai aussi le nom) m’a confié récemment:
«Il me semble qu’Houdain soit la seule commune de France
de 7800 habitants à avoir gardé aussi longtemps autant
de services publics implantés là pour des raisons
historiques liées à la Révolution française
et antérieurs à l’apparition du bassin minier...
mais il me semble qu’Houdain soit aussi la commune de France
qui paie le plus lourd tribut à la suppression des services
publics».
Au
vu de cette réflexion, je me permets de rappeler cette phrase
du président de la République: «Telle ville qui a
un problème avec sa garnison on doit lui garantir son tribunal
ou celle qui a un problème avec son hôpital, on doit lui
garantir sa sous-préfecture». Et celle qui a un problème
avec sa gendarmerie, sa DDE, sa Sécu, son centre de tri, sa
police de proximité, son tribunal, son trésor public,
que va-t-on lui garantir ?
Voici
encore une autre phrase du premier ministre à propos du
redéploiement des services publics: «Il ne faut pas
accabler les zones les plus fragiles, les plus éprouvées
... et leur imposer un cumul d’épreuves injustes».
Ici le cumul ressemble à un massacre à la tronçonneuse.
Et
voici une dernière phrase du ministre de l’intérieur
«Je tenais à vous adresser tous mes vœux de
réussite dans l’exercice de votre fonction (de maire).
Votre action est essentielle pour la démocratie et le
fonctionnement de notre pays. Vous pouvez compter sur mon soutien et
mon écoute attentive en tant que ministre de l’intérieur».
Si
«l’écoute est attentive», quelles sont
les garanties ou les compensations pour la ville d’Houdain?
En
conclusion, je démissionne de la responsabilité de
maire d’Houdain mais je reste membre du conseil municipal et
militant communiste plus convaincu que jamais:
-
de ce que l’avenir d’une France digne et donc solidaire
passe par des services publics forts et de proximité,
-
de ce que la redistribution des richesses est la première
nécessité, en commençant par l’interdiction
de tout salaire de PDG (ou autre) dépassant 10 fois le salaire
de base. Avec d’autres, nous préparons à compter
du 1er octobre 2010 la grève du paiement des factures d’eau,
de gaz et d’électricité jusqu’à ce
que les PDG de Véolia, EDF et GDFSuez voient leur salaire
ramené à 10 fois maximum le salaire de base de leur
entreprise (s’ils trouvent leur nouveau salaire insuffisant, il
leur suffira d’augmenter le salaire de base pour en profiter
eux aussi et 10 fois plus! mais seulement 10 fois plus, pas 150 fois
plus!),
-
de ce que les élites d’un pays ne méritent leur
titre d’élites que si elles montrent l’exemple de
la solidarité. Dès qu’elles cherchent des boucs
émissaires (Jeunes, Etrangers ...) elles se salissent et se
déshonorent. Dès qu’elles ne rêvent que de
Fouquet’s, yacht de luxe, Rolex ... elles se discréditent.
Mon
père nous racontait parfois, à nous ses 12 enfants, que
lors de son service militaire en 1936, il y avait un panonceau dans
la cantine de sa caserne où il était écrit:
«servez-vous bien! Mais pensez aux camarades!».
Aujourd’hui, monsieur le Président et ses amis
multimillionnaires ou milliardaires du MEDEF n’ont retenu que
la 1ère partie de la phrase: «servez-vous bien!»
mais ils ont oublié de «penser au peuple de France».
Penser au peuple de France, c’est pour eux mission
impossible ! Marcel Pagnol disait: «tout le monde savait
que c’était impossible. Il est venu un imbécile
qui ne le savait pas et qui l’a fait!». Nous serons cet
imbécile collectif qui le fera !
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