Le 2
septembre 1969 s’éteignait à Hanoï, dans un
pays en guerre contre l’immense prédateur US, l’une
des figures les plus légendaires, les plus héroïques
du mouvement communiste international. Symbole de l’anticolonialisme
dans le cœur de tous les opprimés, il fut d’abord
un communiste exemplaire, internationaliste, marxiste léniniste,
théoricien et lutteur, stratège militaire et tacticien
politique, mais aussi poète…
Lors de
son exil en France de 1917 à 1923, Nguyen Aï Quoc
participe au Congrès de Tours, milite pour l’adhésion
du Parti Communiste à L’Internationale Communiste et
contribue à sa bolchévisation, notamment sur la
question de la lutte anticoloniale, partie intégrante de la
révolution mondiale sous l’impérialisme comme l’a
précisé Lénine. Un anticolonialiste conséquent
comme Quoc sait que l’indépendance de sa patrie ne peut
être garantie à long terme sous l’impérialisme
que par une libération totale, c’est à dire une
libération du système capitaliste, et la construction
du socialisme. Patriote et progressiste, il devient donc communiste
dans les mêmes circonstances que Fidel Castro lors de la
révolution cubaine un demi-siècle plus tard, …
c’est à dire par la force des choses.
Nguyen
Aï Quoc se fait connaître en plaidant pour l’indépendance
de son pays à travers une collaboration assidue au journal
anticolonialiste Le Paria, où travaillent militants
indochinois et africains, et un livre qui deviendra célèbre :
Le procès de la colonisation française. Sa
notoriété retentira vite au delà des frontières
de la métropole, jusque dans les bagnes et les exploitations
indochinoises… Le personnage y devient même légendaire.
Nguyen The Truyen écrira de lui en 1922 dans Le Paria :
« Tout jeune encore, il vit un jour les français
couper la tête à ses compatriotes. Il ne sut pourquoi.
Alors, indigné, il s’en alla, loin de tant d’iniquité,
afin de pouvoir crier ailleurs : Justice ! Adieu, famille !
Adieu Patrie ! Le voilà bravant les périls de
l’émigration, risquant la misère, n’ayant
d’autre soutien dans le monde que son idéal, son
enthousiasme, sa foi en la délivrance de ses malheureux
concitoyens. Aujourd’hui ; il lutte ferme à côté
de ses frères d’Afrique et d’Europe. Avec son
modeste métier de « retoucheur », il a
gagné péniblement sa vie ; mais plus proprement
que bien des personnages officiels des colonies. (…) Aucune
pompe n’escorte bruyamment ses pas ; sa poitrine n’est
point chamarrée de médailles ; il n’est
point encombré de « mandats »
gouvernementaux ; mais il a le vœu de ses compatriotes,
l’espérance d’une nation opprimée. L’année
dernière, revenu en Indochine, j’ai entendu de touchants
propos que suscite, là bas, son nom, secrètement
colporté de bouche en bouche. Voici une vieille grand mère ;
elle avait eu deux petits fils jetés au bagne par les français
pour délit d’opinion ; elle me dit : « Oh
monsieur, avez vous connu M. Nguyen Aï Quoc ? »
- Voici un charmant enfant ; il se souvenait encore de son père,
un lettré célèbre soupçonné pour
ses idées, un beau jour emmené comme un chien par les
gendarmes français ; il me demanda, l’enfant, avec
son esprit rempli des héros de la légende :
« Est-ce un homme en chair et en os que M. Nguyen Aï
Quoc ? »… »
Invité
à Moscou en 1923, il approfondira sa formation
marxiste-léniniste, deviendra congressiste et délégué
de l’Internationale Communiste pour l’Asie. En 1924 il
fonde le Parti Communiste Indochinois qu’il dirigera d’abord
depuis les provinces chinoises frontalières avec la
coopération des soviets chinois et de l’Union
Soviétique.
En 1940,
l’homme que tout le monde croit mort depuis de nombreuses
années dans les prisons chinoises rentre clandestinement au
Vietnam occupé par les fascistes japonais, et commence avec
ses compatriotes communistes un patient travail d’éducation
révolutionnaire dans les provinces du Nord-Vietnam. Il prend
alors le nom d’Ho Chi Minh.
En 1945
c’est la victoire ; le fascisme japonais et vichyste est
battu par un front nationaliste lui même dirigé par les
communistes, tandis que le gouvernement gaulliste n’est pas
encore en mesure de reprendre en main la colonie. C’est le
moment opportun tant attendu ; le peuple se soulève en
août et Ho Chi Minh, patient tacticien et guérillero
intrépide, proclame la République Démocratique
du Viet Nam. Les masses découvrent alors que leur libérateur
sortant de la clandestinité et de l’anonymat n’est
autre que le célèbre Quoc le patriote !
Le Parti
Communiste Vietnamien, qui avait réussi à incarner le
mieux la cause nationale contre les ennemis extérieurs durant
ces années de lutte, représente désormais une
volonté populaire si unie qu’elle étonne même
les plus anticommunistes locaux et étrangers. Mais la
révolution est encore extrêmement fragile face à
la menace française.
Il a
fallu rallier toutes les couches sociales intéressées à
l’indépendance autour de la classe ouvrière et de
la paysannerie et vaincre les trotskistes de Ta Thu Thau au sud du
pays, qui cherchaient l’éclatement du front et
l’affrontement aventurier et inopportun contre tous les ennemis
en même temps (français et japonais), pour qu’enfin
une nouvelle révolution dirigée par un Parti Communiste
libère un pays et prenne le pouvoir depuis Octobre 1917.
Déterminé
à préserver la paix pour son peuple, Ho mène un
habile « lutte diplomatique » qui engagera la
France à respecter la volonté populaire vietnamienne et
permettra à la révolution de gagner du temps pour se
fortifier. Le pouvoir gaulliste, toujours impérialiste,
déchira vite ses propres accords en 1946 ; il prétextera
un bombardement de sa flotte encore stationnée au large
d’Hanoï (mensonge avéré aujourd’hui
par les historiens) pour lancer l’offensive…
Mais la
détermination du peuple vietnamien et l’organisation
bolchevik du PCV auront raison du Goliath français, qui subira
la déroute en 1954 dans son dernier retranchement de Dien Bien
Phu.
Cette
victoire historique résonnera dans le monde entier comme un
des grands moments de la révolution mondiale et inspirera les
révolutionnaires dans les colonies de tous les continents :
Un petit peuple qui s’organise et persévère peut
vaincre un des plus grands géants impérialistes !
Les USA,
dans une lutte à mort contre le communisme mondial, forcèrent
malheureusement ce peuple à réitérer l’exploit…
au prix de deux millions de victimes.
Le Viet
Nam parvint alors en 1976, contre vents et marées, à
réaliser son rêve d’indépendance et
d’unité, et cherche aujourd’hui comme Cuba de
l’autre coté de la Terre, à conserver son
indépendance, une paix durement gagnée, et la
perspective socialiste en dépit des innombrables difficultés
économiques et politiques liées à la défaite
temporaire du camp socialiste à la fin du 20ème
siècle.
Aujourd’hui
comme hier les jeunes vietnamiens restent fiers, patriotes et
continuent de rendre hommage à l’humble dirigeant
révolutionnaire qui n’avait pour tout bien que sa
vieille tunique et ses sandales, et qu’ils appellent encore
affectueusement « Bac Ho » (l’oncle Ho).
Comme eux, nous saluons la mémoire de ce dirigeant
marxiste-léniniste, qui est aussi le notre.
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