Les
Vénézuéliens ont approuvé une réforme
constitutionnelle abrogeant la limite des mandats électifs.
Affolée, la classe possédante a dénoncé
une situation où le peuple pourrait choisir de reconduire
mandat après mandat le président Chavez. Mais à
Washington, la raison l’emporte. La nouvelle administration a
reconnu la régularité du scrutin et admis, enfin, le
choix populaire.
Le président Hugo Chavez vient
une nouvelle fois de donner une leçon de démocratie à
ses détracteurs. Le 15 février 2009, pour la quinzième
fois en dix ans, les Vénézuéliens ont été
appelés aux urnes, cette fois-ci, pour se prononcer sur
l’amendement constitutionnel qui abrogera la limite des mandats
du président, des maires, des députés et des
gouverneurs [1].
Pour la quatorzième fois en une décennie, les électeurs
ont montré leur soutien au leader bolivarien en s’exprimant
à 54,86 % en faveur de l’amendement qui permettra à
Chavez de se représenter en 2012 [2].
Aucun
président latino-américain ne dispose d’une
légitimité démocratique aussi avérée
que celle du dirigeant vénézuélien. La
participation au vote a été massive, atteignant les
70 %. Par rapport à l’échec de décembre
2007, où la réforme constitutionnelle (69 articles),
mal expliquée, fut rejetée à une infime majorité
de 50,7 %, le gouvernement vénézuélien a
gagné près de deux millions de voix supplémentaires,
renforçant sa popularité [3].
Malgré les plaintes et les
accusations de fraude de l’opposition, le scrutin a été,
une nouvelle fois, salué par la communauté
internationale pour sa transparence [4].
Le Groupe de Rio qui regroupe 33 nations du continent américain
a qualifié le référendum de « nouvelle
expression de civisme et se félicite de l’exercice
démocratique » des Vénézuéliens,
tout en soulignant « l’ample participation
politique [5] ».
Les Etats-Unis ont également salué un processus
« conséquent avec les principes démocratiques »,
tout en faisant part de leur volonté de « maintenir
une relation positive » avec Caracas [6].
Face à cela, l’opposition n’a eu d’autres
remèdes que d’admettre sa défaite [7].
Le
président Chavez, quant à lui, s’est réjoui
de la victoire : « Aujourd’hui, c’est la
vérité qui a gagné contre le mensonge, c’est
la constance du peuple qui a gagné », en référence
à la campagne médiatique de l’opposition. « Le
socialisme bolivarien sort renforcé aux yeux du monde »,
a-t-il ajouté [8].
En
effet, l’opposition ainsi que les médias occidentaux
n’ont eu de cesse de mener une campagne de discrédit à
l’égard des autorités vénézuéliennes,
accusant Hugo Chavez de vouloir devenir « président
à vie », oubliant qu’en démocratie
l’ultime décideur était le peuple. Bien
évidemment, les transnationales de l’information se sont
bien gardées de souligner que dans de nombreuses démocraties
occidentales la limite du nombre de mandats était inexistante.
Elles n’ont pas non plus jugé bon de rappeler que les
Vénézuéliens avaient la possibilité de
révoquer leur président à mi-mandat si sa
politique se révélait insatisfaisante, réalité
inimaginable en Occident.
En
dix ans de pouvoir, Hugo Chavez a entrepris des réformes
économiques et sociales spectaculaires qui ont singulièrement
amélioré le niveau de vie des catégories les
plus vulnérables de la population, redonné une
souveraineté politique et économique à son pays,
insufflé un sentiment de dignité nationale à ses
concitoyens, donné une stature internationale au Venezuela,
dont le prestige ne cesse de croître au sein du Tiers-monde,
fédéré une grande partie des nations
latino-américaines autour de l’Alternative bolivarienne
pour les Amériques (ALBA), un projet émancipateur et
intégrateur, et fait de la solidarité à l’égard
des plus démunis le principe fondamental de sa politique
étrangère. Voici brièvement les racines de la
popularité du leader vénézuélien [9].
Cependant,
Hugo Chavez doit encore faire face au moins à cinq défis
majeurs : la baisse du prix du pétrole dont dépend
l’économie vénézuélienne, le taux
de criminalité qui, même s’il a été
réduit, reste un problème sérieux, l’inflation
toujours élevée, un niveau de corruption relatif mais
présent dans certaines sphères du pouvoir et surtout
une opposition qui refuse de se prêter au jeu démocratique
en multipliant les campagnes médiatiques de dénigrement
dont l’efficacité est indéniable. Mais le scrutin
du 15 février 2009 illustre la confiance des Vénézuéliens
à son égard pour faire face à ces obstacles et
poursuivre sa politique de construction d’une alternative au
néolibéralisme sauvage où l’être
humain est placé au centre du projet de société.
[1]
Articles 160, 162, 174, 192 et 230 de la Constitution de la
République bolivarienne du Venezuela.
[2]
Casto Ocando, « Chávez gana el referendo »,
El Nuevo Herald, 15 février 2009 ; Agencia Bolivariana de
Noticias, « El 15F se impuso la fuerza socialista del
pueblo », 19 février 2009.
[3]
Pascual Serrano, « Aceptar a Chávez »,
Público, 18 février 2009 ; Maurice Lemoine, « Le
Venezuela persiste et signe », Le Monde Diplomatique, 18
février 2009.
[4]
EFE, « Rosales atribuye resultados del referendo a la
represión », 17 février 2009 ; Agencia
Bolivariana de Noticias, « Oposición no concreta en
Contraloría denuncias mediáticas sobre ventajismo »,
17 février 2009.
[5]
The Associated Press, « Grupo de Río felicita a
Venezuela por referendo », 19 février 2009.
[6]
Nestor Ikeda, « Estados Unidos legitima el referendo
chavista », The Associated Press, 18 février 2009.
[7]
Agence France Presse, « Oposición venezolana admite
derrota pero llama a ‘seguir la lucha’ », 15
février 2009.
[8]
Agencia Bolivariana de Noticias, « Esta victoria es de
todos los pueblos de América Latina », 15 février
2009.
[9]
Salim Lamrani, « La nueva Venezuela del presidente Hugo
Chávez », Le Monde Diplomatique, décembre
2008.
Salim
Lamrani est enseignant chargé de cours à l’Université
Paris-Descartes et à l’Université Paris-Est
Marne-la-Vallée et journaliste français, spécialiste
des relations entre Cuba et les États-Unis. Auteur de Cuba
face à l’empire : Propagande, guerre économique
et terrorisme d’État, dernier ouvrage publié
en français : Double Morale. Cuba, l’Union
européenne et les droits de l’homme
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