Au-delà
des désaccords stratégiques que notre organisation a pu
avoir et a toujours avec le PCF, nous appuyons sans hésiter la
candidature de Marie-George Buffet pour les élections
présidentielles et appelons les travailleurs à se
défendre avec ce vote en pesant dans ces élections.
Nous
donnons ici quelques exemples qui illustrent les raisons de notre
soutien. Sur l’emploi, les salaires, le logement, la candidate
du PCF est la porte-parole des revendications immédiates
des travailleurs et de leurs familles. Sur l’immigration,
elle fait des propositions qui aident à construire l’unité
de classe des travailleurs. Sur l’Europe, elle propose la fin
des traités actuels, notamment le Traité de Maastricht.
Toutes ces revendications méritent d’être
entendues et portées dans la campagne. Parce qu’elles
font la différence avec les candidats du système :
Le Pen, Sarkozy, Bayrou, Royal.
Certes,
nous pouvons pointer ce qui, de notre point de vue, sont des
insuffisances dans les propositions de campagne. Cela est naturel,
nous sommes deux organisations indépendantes, qui n’avons
pas le même programme stratégique. Mais l’heure
est à l’unité sur l’essentiel. Et
l’essentiel, pour les travailleurs, est d’avoir une
voix qui porte leurs principales revendications, une voix populaire
qui se situe dans le prolongement du combat commun gagné le 29
mai 2005, une voix de gauche authentiquement anti-libérale.
C’est cela le vote utile.
Emploi
et retraite, préoccupation n°1 des travailleurs :
au
cœur du programme de Marie-George Buffet
En
matière d’emploi et de retraite, le programme de
Marie-George Buffet s’inscrit bien dans une logique sociale
progressiste. Il s’attaque aux profits et entend « faire
payer les revenus financiers ». Il propose de
multiplier par deux l’ISF pour les personnes qui déclarent
de 750 000 à 1 200 000 € de revenus et de le tripler
au-dessus de cette somme.
Marie-George
Buffet affirme que le CDI et les statuts protecteurs doivent être
la règle, ce qui est essentiel à l’heure où
le MEDEF et la droite réécrivent le code du travail. Le
PCF reprend une revendication du puissant mouvement social de la
jeunesse du printemps 2006 en exigeant l’abrogation de la loi
dite « d’égalité des chances »
et il revendique des « CDI pour toutes et tous avec une
période de formation si nécessaire et transformation
des CDD et intérim en emplois stables ».
En
matière d’emploi, la candidate s’alarme de la
baisse inquiétante de l’emploi industriel dans notre
pays et elle fait référence à une proposition de
loi récente du PCF (non
soutenue
par les députés socialistes sous prétexte des
« engagement communautaires de la France »),
qui vise à combattre les délocalisations, notamment en
:
-
Mettant en place des « taxations communes
dissuasives », en fonction des différentiels
sociaux, sur les importations de produits délocalisés
dans les pays à faible coût salarial ;
-
Exigeant de faire rembourser par l’employeur toutes les aides
publiques dont il a pu bénéficier.
Elle
souhaite donner de nouveaux droits aux salariés : les
élus de personnel disposeront d’un « droit de
veto suspensif » sur les décisions de
licenciement collectif et de délocalisation.
Concernant
les licenciements, la mesure phare est « l’interdiction
des licenciements pour les entreprises qui réalisent des
profits ».
Il
s’agit de mesures défensives immédiates
positives, réclamées par les travailleurs. De notre
point de vue, la notion « d’interdiction des
délocalisations », présente sur les affiches
de campagne, mériterait toutefois d’être précisée,
en allant plus loin en mettant en avant une revendication simple :
la sauvegarde de l’outil industriel par la prise de contrôle
par l’Etat (c’est-à-dire la nationalisation) en
cas de fermeture d’entreprise et/ou délocalisation.
Pour
ce qui concerne les retraites, Marie-George Buffet rappelle sa
préférence pour le système par répartition
et la solidarité intergénérationnelle. Aucune
retraite en dessous du SMIC, qu’elle propose de porter à
1500 euros brut dès le 1er juin (puis d’aller
rapidement vers les 1500 € nets). Un droit à la retraite
à taux plein dès 60 ans basé sur 37,5 annuités
et les dix meilleures années. Le maintien des régimes
spéciaux présentés comme une référence
pour tous les autres salariés. L’abrogation de la loi
Fillon sur les retraites.
Elle
souhaite aussi l’augmentation des taux de cotisations sociales
des entreprises, l’arrêt des exonérations
patronales de charges sociales (23 milliards en 2006 !) . Elle
revendique que les revenus financiers contribuent aux régimes
de retraites au même taux que les salariés. De plus,
elle propose de sécuriser les fonds de l’épargne
retraite par leur conversion en obligations d’état
plutôt qu’en actions boursières.
Toutes
ces propositions justes s’inscrivent plus dans une logique
antilibérale que dans une logique anticapitaliste, en ce sens
qu’elles peuvent être satisfaites sans changer de
système.
Mais
à l’heure actuelle où le capital n’accepte
aucun recul, ces axes de lutte nécessitent un combat social
d’ampleur ! De notre point de vue, appeler de ses vœux,
comme le fait le PCF, une « VIème république »,
un pouvoir législatif qui imposerait par la loi ces
changements, ne peut être suffisant. Il suffit d’observer
ce qui se passe au Venezuela, pour se rendre compte que sans les
luttes sociales et le soutien populaire rien n’est possible,
même pour un gouvernement réellement de gauche,
anti-libéral.
L’histoire
contemporaine de la France nous montre que les périodes de
progrès social ont toujours été précédées
de luttes ouvrières victorieuses. L’absence d’appel
aux luttes pour porter cette politique est le point faible du
programme électoral de Marie-George Buffet.
SMIC
à 1500 Euros : Buffet contre Royal,
anti-libéralisme contre
social-libéralisme
L’expérience
de la victoire du NON à la Constitution Européenne en
2005 montre qu’une majorité d’électeurs ne
signe plus de chèque en blanc. Ils ont appris à lire
entre les lignes des programmes, démasquer les omissions
volontaires et les « nuances » lourdes de
conséquences (on se souvient par exemple du « droit
de rechercher un emploi » dans le projet de
Constitution Européenne, remplaçant le « droit
au travail », des « SIEG, services
d’intérêts économiques généraux »
ou « missions de services publics »,
remplaçant les « services publics »,
etc.).
En
matière de pouvoir d’achat, sujet particulièrement
important pour une majorité de salariés, lourdement
touchés par les politiques d’austérité,
l’augmentation des prix et la baisse des salaires par chantage
à la délocalisation, plusieurs programmes de candidats
annoncent un « SMIC à 1500 Euros ».
Ségolène
Royal, soucieuse de « satisfaire » les
exigences de ces milieux populaires qui se souviennent du projet de
chaos social qu’elle soutenait corps et âme en 2005,
annonce un au-dacieux « SMIC à 1500 Euros
brut avant la fin de la législature ».
Le
SMIC actuel – 1254,28 Euros men-suels – devrait donc être
porté de 8,27 € de l’heure à 9,88 € de
l’heure en 2011, date de fin de la prochaine législature.
Sachant que de 2001 à 2006, ce SMIC est passé de 6,67 à
8,27 € de l’heure, l’augmentation souhaitée
par Madame Royal ne dépasse que d’un centime d’Euro
celle qui suivrait une simple reconduction de la politique
actuelle (augmentation de 1,61 € dans les cinq prochaines
années, après les 1,60 € d’augmentation au
cours du mandat du champion de la « fracture sociale » !).
Voilà donc une « promesse de campagne »
qui, pour une fois et sans aucune difficulté, ne peut qu’être
tenue, si toutefois la candidate du « OUI de gauche »
était élue… Prudente, elle prévoit quand
même, pour rassurer le MEDEF au sujet de ce centime
révolutionnaire en 2011, « une conférence
nationale sur les salaires et les revenus avec les partenaires
sociaux dès 2007»…
Marie-George
Buffet quant à elle, se prononce pour un « SMIC
brut à 1500 Euros dès l’été
2007 ». Cet engagement s’inscrit dans une
dynamique de hausse des salaires qui portera « rapidement
le SMIC à 1500 Euros nets » et intégrera
« les primes et indemnités dans les salaires ».
La hausse du SMIC s’accompagnera d’une « augmentation
des minima sociaux de 300 Euros », de leur indexation
à terme sur le SMIC, et d’une revalorisation des
retraites qui ne tomberont plus sous le SMIC. Marie-George Buffet
annonce ici une politique offensive d’augmentation du salaire
direct (augmentation forte et immédiate du SMIC pour 2,5
millions de salariés, mais aussi pour tous les travailleurs
dont le salaire est indexé sur le SMIC) et du salaire différé
(minima sociaux, chômage, retraites), basée sur une
taxation du capital (notamment par « modulation des
cotisations chômage des employeurs, pénalisant ceux qui
précarisent »), dans le contexte actuel
d’apogée des profits capitalistes où l’argent
ne manque pas (en particulier d’ailleurs dans les caisses de
« ceux qui précarisent »).
Le
programme social-libéral consiste donc à surenchérir
d’un centime le réajustement naturel du SMIC par rapport
à l’augmentation du coût de la vie, sans toucher
aux allégements actuels des charges patronales sur les bas
salaires et sans revaloriser les minima sociaux de ceux que le PS
considère encore comme des « assistés »
(la seule revalorisation promise, de 5%, concerne les personnes
handicapées), bref, à ne rien changer. En ce
sens, Royal est fidèle à la doctrine du maître à
penser britannique et socialiste Tony Blair ; « ne
rien promettre qu’on ne puisse réaliser »
(et comme on ne veut rien réaliser, on ne promet rien !).
Le
programme antilibéral et populaire porté par
Marie-George Buffet consiste au contraire à inverser la
tendance en pénalisant les patrons qui précarisent, en
augmentant l’impôt des grandes fortunes, pour revaloriser
immédiatement les salaires et combattre la misère,
bref, pour répondre directement à l’urgence
sociale.
Les
propositions antilibérales de Marie George Buffet
sur
le logement vont dans le bon sens
En
régime capitaliste, le logement fonctionne comme une
marchandise. C’est pour cela que coexistent dans nos sociétés
des logements vacants et des sans-abri. C’est aussi pour cette
raison que la part du logement dans le budget des familles populaires
va grandissant. La loi du profit fonctionne aujourd’hui sur le
marché du logement, éliminant du droit au logement
décent tous les travailleurs jugés « non
solvables ». Bien sur, cette loi ne fonctionne pas dans sa
logique « pure », du fait des conquêtes
sociales antérieures. Des aides au logement existent, les
droits du locataire sont formalisés dans des textes de loi, le
droit au logement est constitutionnel, etc. Mais ces aspects ne
peuvent soigner que quelques conséquences et non en supprimer
les causes. Pour supprimer les causes, il faut supprimer le caractère
de marchandise du logement c’est à dire le transformer
en bien national. Le programme de Marie-George Buffet pose des
revendications justes en matière de droit au logement :
-
Interdiction des expulsions de logement, des coupures d’eau et
d’électricité pour cause d’impayés,
-
Plan d’urgence de réquisition immédiate des
logements vacants,
-
Mise en place d’une sécurité sociale du logement
avec une garantie du risque locatif,
-
Construction de 120 000 logements sociaux par an sur toute la
législature,
A
ces mesures touchant à l’urgence s’en ajoutent
deux qui vont dans le sens d’une remise en cause du caractère
de marchandise du logement :
-
Le plafonnement du loyer à 20 % du revenu du foyer,
-
La création d’un service public national et décentralisé
du logement
Ces
deux mesures ne suffiront pas à briser la logique capitaliste
en matière de logement mais elles vont dans le bon sens.
La formulation concernant le service public du logement reste floue.
Elle n’indique pas ce que sera ce service public et ne précise
pas sa structure juridique. Nous proposons une formulation plus
précise:
LA
NATIONALISATION DE TOUS LES OFFICES PUBLICS D’HLM !
Seule
une telle nationalisation donnera à l’Etat les moyens
réels pour mettre en place un réel service public du
logement.
La
question de l’immigration dans le programme de Marie-George
Buffet : des propositions en phase avec les revendications du
mouvement social
« Dès
la mise en place du nouveau gouvernement, je proposerai que soit
accordé le droit de vote et d’éligibilité
aux résidents étrangers à toutes les
élections ». Ainsi
commence la proposition 11 du programme anti-libéral de
Marie-George Buffet.
C’est
la première fois dans l’histoire des élections en
France qu’un candidat à l’élection
présidentielle se positionne d’une manière aussi
précise sur cette question. En effet, les propositions les
plus « progressistes » que l’on a pu
avoir par le passé se limitaient au droit de vote aux
élections locales d’une part et excluaient de fait le
droit d’éligibilité. Y compris le PCF, en 2002,
s’en tenait au droit de vote et d’éligibilité
des étrangers aux élections locales.
En
généralisant ce droit à toutes les élections
et en proposant d’octroyer le droit d’éligibilité
- selon elle, « le droit de vote ne peut pas être
séparé du droit à l’éligibilité »
- c’est une conception tout à fait révolutionnaire
de la notion de citoyenneté qui nous est proposée.
Est-ce la première fois dans l’Histoire de France ?
Non, cette définition de la citoyenneté était
inscrite dans la constitution de 1793, qui dans son article 4
stipulait :
« -
Tout homme né et domicilié en France, âgé
de vingt et un ans accomplis ;
- Tout
étranger âgé de vingt et un ans accomplis, qui,
domicilié en France depuis une année, y vit de son
travail, ou acquiert une propriété, ou épouse
une Française, ou adopte un enfant, ou nourrit un vieillard;
-
Tout étranger enfin, qui sera jugé par le corps
législatif avoir bien mérité de l'humanité,
est
admis à l'exercice des droits de citoyen français. »
C’est
donc une conception - la « citoyenneté de
résidence » - qui ne conditionne pas la citoyenneté
à la nationalité, une conception qui, comme le dit fort
justement le PCF, « revalorise dans son principe et
dans la pratique la souveraineté populaire ».
Les arguments s’opposant à ce type de conception sont
souvent marqués par le nationalisme chauvin et traversent tous
les courants politiques sans exclusive (de la gauche à
l’extrême droite). La proposition, faite par le sinistre
Sarkozy, de création d’un Ministère de
l’Immigration et de l’Identité Nationale en est un
bon exemple.
Evidemment,
il est toujours possible de critiquer les critères de durée
de résidence proposés par la candidate : 3 ans
pour les élections locales, 10 ans pour les élections
nationales. Il n’en demeure pas moins que sur cette question,
une véritable rupture s’opère.
Sur
un autre registre qui concerne l’approche sur les autres
questions de l’immigration, les propositions de Marie-George
Buffet sont également en phase avec les principales
revendications portées par les mouvements sociaux. Cette
approche s’appuie sur le constat que «
Pour une bonne part, elles (les
migrations, ndlr) résultent de
la misère, conséquence des politiques colonialistes
d’hier, et d’un ordre économique mondial injuste
qui déstructure les sociétés et étouffe
leurs possibilités de développement »
-
Suppression immédiate de la loi CESEDA sur l’immigration
« jetable » qualifiée de
« politique néocoloniale » et
mise en place d’une législation en adéquation
avec un certain nombre de valeurs progressistes.
-
Suppression de la double peine, pratique scandaleuse qui consiste à
expulser des résidents ayant purgé une peine de prison,
et ayant donc payé leur tribut à la société.
-
Suppression des « centres de rétention »,
ces véritables zones de non-droit où sont parquées
les étrangers.
-
Régularisation de tous les sans-papiers avec un titre de
séjour de 10 ans: cette revendication forte des mouvements des
sans-papiers est aussi un élément important du
programme car cette proposition se distingue du fameux cas par cas
prôné par la candidate social-libérale Ségolène
Royal. De plus, la proposition d’une carte de 10 ans permet de
stabiliser ces populations. Cette stabilité de l’immigration
est une des lignes de force des revendications pour que s’arrête
l’instabilité structurelle dans laquelle la législation
met ces populations, instabilité qui permet bien évidemment
de renforcer leur exploitation et leur précarisation.
Cette
proposition est donc un deuxième point de rupture avec les
autres programmes.
Union
Européenne : Marie-George Buffet poursuit le
combat gagné
au Référendum du 29 mai 2005
Le
programme de la candidate est clair (c’est le point 14 parmi
les « 16 engagements ») : elle propose
« la
fin des traités actuels
et leur remplacement par un nouveau traité à élaborer
dans un processus démocratique et populaire et à
adopter par référendum dans chaque pays ».
Il
s’agit donc d’aller au-delà du combat gagné
contre le projet de constitution et de mettre en cause les actuels
traités, et notamment le Traité de Maastricht,
tristement célèbre. Mais aussi le Traité de
Schengen, fondateur de « l’Europe forteresse »,
justement dénoncée par le PCF.
Certes,
nous avons une divergence avec le PCF sur la méthode, puisque
leur proposition présuppose un accord des autres peuples
européens, alors que nous pensons qu’étant donné
le développement inégal de la lutte politique dans
chaque pays il est parfois nécessaire de « montrer
l’exemple » : de notre point de vue, la « fin
des Traités » (et donc l’implication de la
France dans ces traités liberticides) ne peut être
suspendu à leur remplacement par un nouveau traité
co-élaboré par les peuples d’Europe. Par
ailleurs, nous, communistes révolutionnaires, privilégions
l’unité de lutte des travailleurs à l’échelle
internationale (et pas seulement "européenne"), nous
privilégions la solidarité entre peuples et pays
anti-impérialistes, socialistes.
Mais
nous devons retenir surtout ici cette volonté réaffirmée
de lutter contre tous ces traités de malheur qui n’ont
servi qu’à renforcer le patronat et affaiblir les
travailleurs. C'est un prolongement au combat du printemps 2005, un
prolongement de la victoire du 29 mai.
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