Il pleut
comme jamais des euros sur la France. Des millions d'euros de
bénéfices et de dividendes. Les géants du CAC40
annoncent sans vergogne des profits records pour 2004 : 9.6 milliards
d'euros pour Total, 4.6 pour la BNP, 3.6 pour l'Oréal…
Les salaires des PDG d'Arcelor, de Société Générale,
de Renault explosent (+23% en 2003). Rémunération
annuelle de Bernard Arnault / LVMH : 18.4 millions d'euros. Selon un
économiste, les entreprises disposent de montants
considérables de cash dont elles n'ont pas l'usage…
Elles manqueraient de projets d'investissements rentables ! Le
salaire horaire employé ne progresse que de 0.5%. C'est le
Jackpot pour les patrons et les actionnaires, les fonds de tiroirs
pour les salariés !
Avec une
flambée des prix sans précédent depuis
l'introduction de l'euro, le pouvoir d'achat des travailleurs a
vertigineusement reculé. Les timbres passent à 53 et 55
centimes. Les consultations des médecins spécialistes
(tarif 1 de la sécu) de 25 à 30 euros. En janvier, le
taux de chômage atteint la barre fatidique des 10% d'actifs,
soient 2 461 000 personnes exclues du droit -pourtant
constitutionnel- au travail.
Comme
chaque année, avec le retour de l'hiver, des dizaines de
milliers de parias, femmes et hommes SDF (dont un tiers a entre 18 et
30 ans) errent d'hospices en restos du cœur pour survivre, se
calfeutrent dans leur " mètre carré " de
carton pour ne pas succomber au froid. Quand ils meurent, souvent
dans l'indifférence ou l'anonymat, les médias
claironnent en urgence le 115 et poussent parfois l'indécence
jusqu'à criminaliser ces pauvres victimes.
C'est
dans ce paysage de fracture sociale aggravée qu'éclate
l'affaire Gaymard, cet humble savoyard, modeste fils de cordonnier,
pas carriériste pour deux sous, travaillant comme un fou 120
heures par semaine pour la République, pas bourgeois, sans
fric et " sans domicile fixe "… à Bercy !!!
Des millions et des millions de français ont été
choqués d'apprendre que ce bébé de la chiraquie,
élevé au biberon de l'ENA et d'HEC, propulsé
grand argentier et chantre de la rigueur gouvernementale osait
occuper - en catimini - un logement de fonction de 600 m2, loyer
mensuel de 14 000 euros, aux frais de la nation. C'est l'équivalent
du salaire minimum annuel d'un ouvrier… Après une série
de bobards et de rétractations, le faux jeton avouera sans
complexe être multi-propriétaire (5 résidences,
un patrimoine évalué à 2 millions d'euros) et
assujetti à l'impôt sur la fortune.
A vrai
dire, l'affaire Gaymard n'est pas le simple avatar d'un avorton du
système. C'est le symptôme d'une véritable césure
entre le luxe obscène de " ceux d'en haut " qui
gouvernent et la vie réelle de tous ceux d'en bas sur le dos
desquels on tond toujours la laine, tous ceux qui vivent
l'incertitude du lendemain, les privations au quotidien, les milieux
de mois difficiles, les frigos trop souvent vides, tandis que Chirac
et Giscard s'achètent et restaurent des châteaux et
manoirs, tandis que les " capitaines d'industrie "
Lagardère, Bouyges, Bébéar, etc. gonflent leurs
portefeuilles boursiers de stock-options et de plus-values volées
sur le dos de leur main-d'œuvre. Le peuple travailleur n'est
pas dupe. Il n'a pas attendu le scandale Gaymard pour crier sa colère
contre les flagrantes inégalités du capitalisme
ordinaire.
Depuis
la mi-janvier un grogne endémique secoue crescendo tout le
pays pour accuser Raffarin, la " muerte sociale ".
Toutes générations confondues et par centaines de
milliers, lycéens, étudiants, salariés du
public et du privé, licenciés, délocalisés,
recalculés, demandeurs d'emploi, précaires, sans
papiers, enseignants, électriciens, cheminots, chercheurs,
intermittents, retraités, assurés sociaux, victimes de
l'amiante, maires de communes rurales… se mobilisent,
occupent la rue pour dénoncer le chaos social généralisé.
Un
mouvement persistant et percutant par sa détermination, sa
dynamique unitaire, sans équivalent depuis 1995 et la chute de
Juppé, s'enracine. Mais cela semble ne pas suffire pour
intimider et faire plier un gouvernement sourd et autiste, un
premier ministre cynique qui récidive dans son
incendiaire-attitude.
Ne
vient-il pas de nommer à Bercy un autre bébé
Chirac (décidément les couveuses artificielles de
Bernadette ne chôment pas) en la personne de Thierry Breton,
ex-administrateur des groupes Thomson, Schneider Electric, Axa,
Dexia, ex-PDG de France Télécom ? Un " redresseur
" d'entreprise, un tueur d'emplois : 40000 en 2 ans chez
l'opérateur téléphonique. Missions
prioritaires confiées au prédateur : Conduire la
privatisation ou l'ouverture du capital de bon nombre d'entreprises
publiques (GDF cet été, EDF pour la fin de l'année)
et réduire drastiquement la dépense publique pour
satisfaire aux normes du Pacte de Stabilité Européen.
C'est
dans ce climat agité que s'ouvre la campagne du référendum
constitutionnel. Une campagne pour le moins atypique. La barricade
européenne fait voler en éclats le paysage électoral
traditionnel. " Gauche " comme droite officielles n'ont
jamais été à ce point divisées. En 1992
au moment de la ratification de Maastricht, le PS faisait bloc pour
l'Europe. Les enjeux de 2005 cristallisent les résistances,
modifient les lignes de front et clarifient le débat citoyen
(hommage au passage aux courageux camarades socialistes et écolos
qui tiennent bon pour le NON !).
Le 29
mai, il n'y aura que deux côtés à la barricade et
deux camps :
Le
camp minoritaire du " oui ", ceux d'en haut, un
ramassis sans frontières regroupant pêle-mêle un
gouvernement impopulaire, le MEDEF, hiérarques, banquiers,
eurocrates, médias et tous les politicards socio-libéraux
et libéro-sociaux. Ces éléphants qui depuis 30
ans et plus, d'alternances en cohabitations, massacrent la France
industrielle et agricole, écrasent ses travailleurs,
dénationalisent nos grandes entreprises, cassent notre code du
travail, entérinent les délocalisations,
déconstruisent, suppriment ou privatisent nos services
publics, nos systèmes de santé et d'enseignement, notre
protection sociale, bradent notre indépendance nationale.
Princes éternels du mensonge et de l'illusion, ces bleus
bonnets et bonnets bleus cherchent aujourd'hui à dissocier, à
déconnecter le " oui " de toute considération
de politique intérieure. Ces euro-collabos expliquent que le
référendum à venir n'est qu'un plébiscite
a-politique. La panique cependant les gagne, car chaque jour qui
passe, la grogne sociale fait boule de neige et leur " oui "
dans les sondages s'effrite. Après les shows télé
Chirac - Zappatero - Raffarin, les réunions tupperware de
Sarko, la Star-Academy du " oui pluriel " va produire pour
les estrades électorales des numéros de duettistes
détonnants : Bayrou - Cohn Bendit, Kouchner - Borloo, Royal -
Fillon ! On se demande parfois si, à force de cohabitat pour
le oui, Chirac et Hollande ne sont pas les frères siamois de
l'Euro-patronat !
En
face, le camp majoritaire du NON, le nôtre, celui du peuple
travailleur, qui le 29 mai exprimera dans les urnes son malaise, sa
mal-vie, sa conviction que les choses ne vont plus, ne peuvent plus
durer comme ça, que l'Europe libérale et patronale, au
lieu de les arranger, les aggravera. Les habitants du Nord - Pas de
Calais savent trop bien que ceux qui appellent à voter oui
sont à l'origine de leurs problèmes. Les familles des
mineurs, des sidérurgistes et des ouvrier-e-s du textile
n'oublient pas qui a mutilé, désertifié,
paupérisé leur région, la réduisant en
Euroland du chômage. Entre autres, un certain Mauroy à
Matignon, flanqué à Bruxelles du père Delors et
du Comte belge Davignon.
Le NON
peut et doit gagner, si tous ensemble, nous nous mobilisons et
unissons, sans sectarisme syndical ou politique : - Pour
expliquer au maximum d'électrices et d'électeurs parmi
nos proches, amis, voisins et camarades de travail, que la
Constitution Giscard est une épée de Damoclès
invisible, une bombe sociale à retardement, génératrice
de misère et de guerre. - Pour les persuader qu'une
victoire du NON du même coup sanctionnera et mettra enfin K.O
l'Elysée et Matignon ; Un choc salutaire pour la démocratie
!
Attention
: Le pire ennemi du NON n'est pas le oui, c'est l'abstention
massive des partisans du non. Que le référendum
espagnol nous serve de leçon. Travaillons à convaincre
!
|