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Retourner à la liste Imprimer 25 novembre 2001
Commentaires et amendements au projet de thèses pour une identité communiste révolutionnaire de la Coordination Communiste

Commentaires et amendements au projet de thèses pour une identité communiste révolutionnaire de la Coordination Communiste

Partant du constat que la « déclaration de principes (1993) très brève, n'allant pas à la définition du contenu des concepts - a montré qu'elle était notoirement insuffisante pour aller de l'avant à l'époque de la reconstruction du parti », nous sont proposées des thèses qui « visent à cerner les survivances du révisionnisme pour les combattre et les éliminer dans notre coordination et le mouvement communiste en France ».

Les thèses posent la question essentielle des bases idéologiques de la reconstruction du PCF. En effet, le danger existe d'une reconstruction politique basée sur la conception anarcho-syndicaliste consistant à réduire la lutte de classe à sa dimension économique et politique sans idéologie, sans théorie. La tentation est grande alors de « réinventer la roue » au prétexte que certains cherchent - consciemment ou inconsciemment - à éviter le travail pourtant indispensable consistant à analyser et expliquer d'où vient la défaite du mouvement communiste, du mouvement ouvrier révolutionnaire. Nous devons nous remettre à « l'école » de nos prédécesseurs auxquels nous devons tant de gains sociaux et démocratiques pour pouvoir recommencer la lutte. L'élaboration des thèses dans ces conditions est à la fois une avancée du débat d'unification idéologique au sein même de la Coordination et au sein des forces qui entrent en opposition à la social-démocratisation du PCF.

L'intérêt et l'objet des thèses sont d'orienter les débats vers la reconstruction du Parti communiste révolutionnaire, dont la classe ouvrière de France a besoin. Il s'agit donc de contrecarrer les projets du capital d'emprisonner les forces oppositionnelles au réformisme dans une tendance « de gauche » du PCF social-démocratisé ou/et de remplir le « vide » créé à gauche du PCF par les trotskistes et les verts, et de marginaliser ainsi les partisans d'une reconstruction marxiste-léniniste du Parti communiste.

Toutefois quatre décennies de montée en puissance du révisionnisme et du réformisme ont causé des dégâts importants au sein du PCF et du mouvement ouvrier. Les tentatives d'alternatives maoïstes au révisionnisme à travers des « thèses » se sont fourvoyées dans les eaux boueuses de la social-démocratie, du trotskisme, de l'écologisme ou de l'anarchisme. L'autoproclamation du Parti ou de l'avant-garde sans fusion du mouvement ouvrier et du socialisme scientifique conduit inévitablement à l'échec et à la faillite. Or, objectivement, ce danger existe à la base des thèses, d'autant plus que le formidable recul idéologique pose la question de l'assimilation de la ligne qui la sous-tend. Par ailleurs, la proposition de thèses comporte des déviations qui émanent d'une tentative de conciliation entre le marxisme-léninisme, l'anarcho-syndicalisme et le semi-révisionnisme. Ce texte a pour objet de lutter contre deux dangers qui menacent l'actuel mouvement de reconstruction communiste: 1) la reconstruction sans idéologie ; 2) la reconstruction avec la seule idéologie.

Il faut signaler que si les nouveaux statuts adoptés par la IVème Conférence Nationale du 14 janvier 2001 fixaient justement comme objectif fondamental de la Coordination Nationale « de contribuer à la construction d'un Parti communiste, seul instrument qu'a la classe ouvrière pour se constituer en classe dirigeante... » (Préambule), le projet de modification du règlement intérieur dévie vers l'anarcho-syndicalisme en définissant le Parti communiste à construire comme un « outil essentiel (sic) qu'a la classe ouvrière pour se constituer en classe dirigeante » (Préambule).

Sur la stratégie et la tactique révolutionnaires jusqu'au 1968

« La rareté des situations révolutionnaires dans les métropoles impérialistes a fixé certains PC sur des tâches intermédiaires de lutte démocratique pour les revendications sociales, la paix, des réformes démocratiques » (89). Cette notion de « rareté des situations révolutionnaires dans les métropoles impérialistes » nécessite une démarcation claire par rapport aux déviations réformistes et gauchistes dans le mouvement ouvrier : les économistes partisans du gradualisme, du « pas à pas » et de la conquête démocratique ou parlementaire du pouvoir (PCF) et les tenants gauchistes de l'assaut immédiat (les trotskistes et les maoïstes). Le point 156 sur mai 1968 analyse la politique du PCF qui « n'offrit comme toute perspective que la pression pour que la SFIO se rallie au Programme Commun ». Mais rien n'est dit sur la stratégie léniniste du « siège en règle de la forteresse ennemie ».

En effet, dans la période 1945 et 1970, la direction du PCF (Thorez et Duclos) n'a pas su réunir et préparer le mouvement ouvrier aux tâches du moment et n'a donc pas appliqué cet enseignement fondamental de Lénine: « A chaque étape de l'évolution, à chaque moment, la tactique du prolétariat doit tenir compte de cette dialectique objective de l'histoire de l'Humanité: d'une part en mettant à profit les époques de stagnation politique, c'est-à-dire de développement dit « paisible », avançant à pas de tortue pour accroître la conscience, la force et la combativité de la classe d'avant-garde; d'autre part en orientant tout ce travail vers le « but final » de cette classe et en la rendant capable de remplir pratiquement de grandes tâches dans les journées qui concentrent en elles vingt années » (idem).

Le PCF et la fraction la plus combattive de la classe ouvrière (point 160)

Une des étapes majeures du passage du révisionnisme à la collaboration de classe a été l'avènement du PS et du PCF au pouvoir en 1981. Aboutissement du programme commun PS/PCF de 1972 soutenu par le capital, « l'alternance » a été caractérisée par un chômage massif suite à la restructuration/robotisation et l'apparition sur la scène politique du parti fasciste le FN. Pour des raisons électorales, la social-démocratie a fait le jeu des forces fascistes pour affaiblir la droite parlementaire: C'est cela la social-fascisation.

La résistance du mouvement ouvrier aux licenciements a été brisée par le PS qui n'a pas hésité à utiliser le racisme et la répression, à l'instar de Mauroy lors des grèves dans l'automobile. Le poison du racisme est ainsi devenu une arme de division des travailleurs, comme Karl Marx l'observait déjà fort justement au sujet de l'Angleterre et des Etats Unis: « L'Angleterre a maintenant une classe ouvrière scindée en deux camps ennemis: prolétaires anglais et prolétaires irlandais. L'ouvrier anglais ordinaire déteste l'ouvrier irlandais comme un concurrent qui abaisse son niveau de vie. Il se sent à son égard membre d'une nation dominatrice, devient, de ce fait, un instrument de ses aristocrates et capitalistes contre l'Irlande et consolide ainsi leur pouvoir sur lui même. Des préjugés religieux, sociaux et nationaux le dressent contre l'ouvrier irlandais. Il se conduit envers lui à peu près comme les « blancs pauvres » envers les noirs dans les anciens Etats esclavagistes de l'Union Américaine. L'Irlandais lui rend la pareille largement : Il voit en lui à la fois le complice et l'instrument aveugle de la domination anglaise en Irlande. Cet antagonisme est entretenu artificiellement et attisé par la presse, les sermons, les revues humoristiques, bref par tous les moyens dont disposent les classes au pouvoir. Cet antagonisme constitue le secret de l'impuissance de la classe ouvrière anglaise, en dépit de sa bonne organisation. C'est aussi le secret de la puissance persistante de la classe capitaliste, qui s'en rend parfaitement compte » (Marx à S. Meyer et A. Vogt, in Marx & Engels, Correspondances). Cette analyse très pertinente est parfaitement conforme à la réalité de l'évolution du capitalisme français, surtout à partir de 1980, dans ses rapports avec les minorités nationales immigrées issues de l'empire semi-colonial français, d'Afrique notamment. Il suffit ainsi de changer « anglais » et « blancs pauvres » par « français » et « irlandais » et « noirs » par « immigrés magrébins ou noirs ». Cette situation connaît une accentuation dans le contexte du nouvel ordre impérialiste actuel et des guerres coloniales contre l'Irak, la Yougoslavie et l'Afghanistan.

S'agissant du fascisme et de la fascisation

« Les Etats-Unis marchent depuis longtemps sur les pas du fascisme allemand comme principal (mais pas unique) ennemi des peuples, comme soutien à tout ce qui est réactionnaire, contre-révolutionnaire dans le monde » (12) : La comparaison est juste du point de vue de l'hégémonisme mondial, mais on ne peut en conclure que les USA sont actuellement fascistes.

L'impérialisme, c'est la réaction sur toute la ligne, la tendance à enfreindre systématiquement la démocratie, les droits démocratiques : tendance dont la base est le monopole impérialiste, et aujourd'hui le monde unipolaire né de la défaite du socialisme.

« Ce n'est pas en soi, la formulation qui pose problème... mais c'est l'idée que le PCF siège dans un gouvernement de coalition inédit... que la voie parlementaire, électorale puisse être victorieuse, alors que les troupes US occupaient la France fascisante (?!) » (152). De quelle France « fascisante » s'agit-il en 1945 alors qu’elle possédait un Gouvernement d'Union Nationale gaulliste et PCF ? Dimitrov, dans son rapport au 7ème congrès de l'Internationale Communiste, précise les conditions dans lesquelles la lutte antifasciste, qui pose immédiatement l'alternative démocratie bourgeoise ou fascisme, peut aborder la révolution socialiste.

« Au stade impérialiste, avec le tournant vers la réaction, en lien avec la possibilité de situations révolutionnaires, le capital est contraint de violer ses propres lois et principes. L’Internationale Communiste a baptisé ce processus fascisation de la démocratie bourgeoise » (75). Il y a nécessité d'être très précis : Encore une fois l'impérialisme tend à enfreindre la démocratie bourgeoise formelle, c'est à dire que le capital viole ses propres lois. Mais cela ne suffit pas en soi à la fascisation. Il faut un élément subjectif, c'est à dire l'émergence d’un parti fasciste et son développement, poussant à la fascisation du régime démocratique bourgeois et des partis sociaux démocrates. Le régime de Weimar en Allemagne, malgré la répression sanglante des forces révolutionnaires (Karl Liebknecht et Rosa Luxembourg) n'est pas le gouvernement Bröening, gouvernement de transition au fascisme, qui a directement préparé la venue des nazis au pouvoir. En général le parti fasciste se développe dans la lutte contre les partis bourgeois parlementaires de droite et de « gauche » du capital. Il n'existe pas de cas de « mutation » littérale des partis bourgeois parlementaires en partis fascistes. Il y a plutôt à la fois utilisation des partis fascistes contre le mouvement ouvrier révolutionnaire et rivalité entre les différents partis bourgeois classiques et fascistes.

En outre les thèses devraient affirmer clairement qu'il n'y a pas de danger « fasciste » aujourd'hui en France, pour se démarquer clairement du piège réformiste de la soumission à la social démocratie (le point 82 est à ce propos confus et la confusion est encore plus grande avec les points 83, 84, 85, 86 : faut-il les rattacher à la question du fascisme ou n'est-ce pas plutôt les principes généraux des liens dialectiques entre lutte pour la démocratie et lutte pour le socialisme?).

Sur les « racines matérielles » du réformisme

Nous sommes d'accord pour dire qu'« après la seconde guerre mondiale apparaissent des conditions objectives de développement relativement tranquille du capitalisme... » (95). Mais il faut combiner ici le pillage colonial, l'importation d'immigrés et l'embauche du prolétariat féminin doublement exploités, permettant au capital de corrompre les couches supérieures de la classe ouvrière et faire émerger sur cette base concrète une bureaucratie contrôlant peu à peu à la fois le PCF et le syndicalisme de lutte de classe.

« A partir des années 70, certains militants marqués par l'opportunisme commencèrent à envisager la fonction de permanent comme « profession » avec ses plans de carrière; on obéissait aveuglément pour avancer dans l'appareil. Cette couche sociale, l’aristocratie et la bureaucratie ouvrières, a pris les rênes du parti... » (158). C'est pourquoi il nous faut faire la différence entre « la liquidation de tous les principes marxistes par les Gorbatchev, Berlinguer, Ochetto ..., Hue, etc. » et « Marchais » (100). Les « concessions sociales et démocratiques en raison de l'existence de l'URSS et des fortes luttes de classes » (95) ont engendré la « société de consommation » propice a un certain « embourgeoisement » des couches supérieures du mouvement ouvrier, au sein desquelles va se constituer une bureaucratie ouvrière politique et syndicale. Marchais est le représentant politique de cette couche sociale, alors que Robert Hue est le représentant de l'élite petite bourgeoise des élus à la tête du PCF.

La crise de surproduction capitaliste est le facteur essentiel qui est à l'origine de la différenciation et des oppositions en cours au sein du mouvement ouvrier et qui se traduit en implosion progressive du PCF. Aujourd'hui, la crise et ses effets dévastateurs créent une ambiance délétère, soporifique, désarmante et corruptrice au cours de la longue période d'expansion économique et l'illusion petite bourgeoise d’une « paix de classe » qu'induit la « société de consommation ».

Au cours de cette période, la lutte de classe a été neutralisée et dévoyée par la montée en puissance du révisionnisme au sein du PCF et du Mouvement Communiste International ; elle trouve ses fondements objectifs, à la fois dans la reconstruction d'après guerre, dans la transformation des empires coloniaux en empires semi-coloniaux, et au plan interne en France dans l'importation massive de main d'œuvre immigrée taillable et corvéable à merci et l'embauche massive d'un sous-prolétariat féminin subissant la double oppression salariale et sexiste. Ces conditions objectives d'alors sont à la base de la bureaucratisation et de l'aristocratisation au sein du mouvement ouvrier.

La nouvelle phase d'internationalisation du capital

Le système capitaliste a connu trois phases d'évolution: D'abord la phase du capitalisme ascendant, caractérisée par la conquête du marché national dans les métropoles et sa victoire sur le féodalisme. Puis, avec la fusion du capital bancaire et industriel, la phase d'internationalisation caractérisée par la conquête coloniale et la guerre de partage inter-impérialiste des colonies au début du 20ème siècle. Cette phase a été marquée par la rupture révolutionnaire d'octobre 1917. L'avènement du marché socialiste et son extension après la seconde guerre mondiale aux pays de l'Est européen, à l'Asie (Chine, Corée, Vietnam) et à l'Amérique latine (Cuba) ont constitué un coup d'arrêt à ce que Karl Marx décrivait en disant « par l'exploitation du marché mondial, la bourgeoisie donne un caractère cosmopolite à la production et à la consommation de tous les pays (...) par le rapide perfectionnement des instruments de production et l'amélioration continue des moyens de communication, la bourgeoisie entraîne dans le courant de la civilisation jusqu'aux nations les plus barbares » (18).

La défaite du socialisme, de l'URSS, a permis un retour en arrière historique, à savoir la reprise du processus d'internationalisation du capital, hier limitée par l'existence même de l'URSS et le camp socialiste. La « mondialisation », concept bourgeois et petit-bourgeois, n'est en réalité que le retour historique de la partie de l'Humanité qui s'était libérée de l'exploitation du marché capitaliste. En fait, il faudrait plutôt parler de « re-mondialisation » du capitalisme. Les « évolutions nouvelles » du capitalisme ne se situent donc pas au niveau de la tendance à la « globalisation » capitaliste.

Les caractéristiques fondamentales, de plus en plus accentuées du capitalisme à son stade suprême l'impérialisme, demeurent pour l'essentiel celles que Lénine a exposées. Aussi le concept d’« impérialisme globalisé » sème la confusion, et malgré des efforts remarqués, échoue à se démarquer du kautskisme.

Il y a manifestement surestimation des changements intervenus dans le capitalisme après la seconde guerre mondiale. C'est ainsi que la définition selon laquelle « l'impérialisme globalisé, c'est l'extension des rapports de production capitalistes à l'ensemble du globe » (20) élude l'apport décisif du 6ème Congrès de l'Internationale Communiste (IC), qui différencie nettement le rôle progressif du capitalisme au centre, notamment dans sa période ascendante, et le fait que l'impérialisme a asservi des peuples entiers à la périphérie pour les piller, les spolier, en alliance avec les classes exploiteuses réactionnaires locales, féodales, médiévales, esclavagistes et bourgeoises. L'oppression impérialiste à la périphérie est au fond une entrave au développement des forces productives.

L'impérialisme divise ainsi le monde en pays, Etats, Nations oppresseurs et pays, Etats, Nations opprimés: c'est cela « la division internationale du travail » dont une des formes nouvelles est la « généralisation » des entreprises à faible composition organique du capital pour exploiter, notamment, une main d'œuvre esclave. Cette réalité objective n'est pas à confondre avec la contradiction fondamentale de l'époque de l'impérialisme entre le caractère de plus en plus social de la production et l'appropriation privée capitaliste des richesses produites.

Certaines thèses concilient avec le kautskisme : « Ces monopoles encore à base nationale sur fond de mixité internationale jouent un rôle économique décisif » (8), « Actuellement les monopoles gardent une base nationale, concourent à la domination et à l'influence de leur Etat national » (24), « le capitalisme garde donc encore (sic) une base nationale dans une perspective de course aux profits à la fois nationale et internationale » (24). Pourquoi « encore une base nationale » et qu'est-ce que cette notion de « course aux profits national et international » ? Même si demain l'Union Européenne, sous forme d'un Etat fédéral ou autre devenait une réalité, en quoi cela changerait-il le rapport de rivalité inter-impérialiste, la tendance au monopole capitaliste, les fusions, rachats, l'exportation des capitaux et la guerre impérialiste ? Ainsi quand il est dit « ont émergé dans la dernière décennie deux blocs impérialistes concurrentiels: l'Union Européenne sous direction germano-française et le Japon. La rivalité entre ces Etats ou blocs impérialistes sera source de conflits directs ou indirects pour un nouveau partage du monde, pour la maîtrise des ressources énergétiques: gaz-pétrole » (25), il faut dire clairement que cette rivalité inter-impérialiste est déjà d'actualité et qu'elle conduit tout droit, sur fond de crise de l'impérialisme, à la guerre inter-impérialiste dès que les conditions de l'équilibre géostratégique et militaire seront réunies par les impérialistes européens et nippons, concurrents de l'impérialisme hégémonique américain. L'objectif de la construction de l'Union Européenne est justement la création d'un Etat concurrent tout aussi réactionnaire que l'Etat des USA.

Le point 32 liste les conséquences intérieures, mais non les « objectifs » de cette créature en cours du capital financier européen. Et les conséquences, « casser les acquis politiques, sociaux nés des luttes de classes et des résistances antifascistes, alors qu'existaient aussi une URSS au sommet de son prestige, un camp socialiste, un MCI sur des bases révolutionnaires. L'objectif des monopoles est de ressusciter des formes archaïques de domination de classe » (33), ne peuvent non plus être qualifiées du concept marxiste-léniniste de « régression de civilisation » (13). Ceci est inévitable en période de crise du système capitaliste.

C'est donc dans la nature même de l'impérialisme de tirer le profit maximum par l'asservissement accru du prolétariat et des peuples, surtout en cette période de contre-révolution mondiale.

Il doit être ajouté que l'allusion au fait que « dans ce combat, le prolétariat et ses alliés formeront une nation nouvelle (sic), révolutionnaire, refusant de reconnaitre les traités iniques de l'impérialisme français » (36) prête à confusion. Qu'est-ce donc que cette « nation nouvelle » ainsi formulée au moment même où les impérialistes construisent leur « nouvel Etat » européen ?

La Construction du socialisme

Le point 121 dit que « le stalinisme, c'est la construction du socialisme pour la première fois, sur fond de guerre civile continue, d'encerclement capitaliste, de danger du fascisme, de guerres interventionnistes, dans un pays où la Dictature du prolétariat s'exerçait avec une avant-garde dépourvue d'expérience de gestion même locale. Ces conditions d'une difficulté inouïe ont pesé sur l'extension de la démocratie socialiste. Ce n'est pas imputable à un homme ou à un parti mais aux conditions et aux rapports de force de l'époque ». La question est : Peut-on construire le socialisme autrement ? Le socialisme peut-il vaincre sans encerclement capitaliste ? Peut-on appréhender « la démocratie » hors de la réalité de la lutte de classe ?

Nina Andreéva précise à juste titre que « l'exacerbation de la conscience de lutte de classe jusqu'à la reconnaissance de la dictature du prolétariat avait été considéré par Lénine comme étant un des acquis fondamentaux de Marx et Engels. Staline n'a fait que confirmer et maintenir cette position. (…) Il ne s'agit pas d'une question de terminologie mais bien de contenu, du contenu de ce concept. Tout Etat est une dictature, dictature de l'une ou de l'autre classe. (...) La dictature du prolétariat est assurée par la classe des travailleurs et par leurs alliés. La dictature du prolétariat peut apparaître dans des formes extrêmement diversifiées de pouvoir. Les travailleurs souhaitent que cette méthode de mise en application de leur pouvoir soit-elle même démocratique. Cependant, comme l'histoire l'a montré, cette possibilité ne dépend pas toujours des travailleurs eux-mêmes. (...) La révolution doit être en mesure de se défendre de façon à pouvoir subsister (...). Cependant, il ne faut pas opposer dictature et démocratie en tant que contenu du pouvoir. Dictature et démocratie ne peuvent être opposées que du point de vue de la forme, des moyens, du mode de mise en application du pouvoir par l'une ou l'autre classe. C'est cela, la substance de l'opposition qui est faite entre dictature et démocratie » (Conférence tenue le 2 mai 1992 à Bruxelles, publiée dans Solidaire n°23 du 27 mai 1992). Ce n'est donc ni une question « d'époque » ou de « conditions particulières, exceptionnelles ».

Si l'encerclement capitaliste avec toutes ses conséquences sont inévitables, alors le « stalinisme » est la seule politique conséquente possible du prolétariat victorieux dans un seul pays ou groupe de pays. Le « stalinisme » -en fait le bolchevisme- est donc inévitable pour « tout prolétariat national qui en finit d'abord avec sa propre bourgeoisie » selon la juste formule de Marx et Engels dans le Manifeste du Parti Communiste. C'est pourquoi tout en reconnaissant l'avancée, dans le contexte actuel de défaite du Mouvement Communiste International, que constitue le fait que le « PC de Grèce, divers partis communistes de Russie, ont réévalué hautement (?) l'œuvre de Statine et du PC(b)US de 1924 â 1953 » ( 121), nous devons continuer à nous démarquer des séquelles révisionnistes qui persistent dans le bilan de ces organisations révolutionnaires pour envisager un jour l'unité.

La conclusion des thèses

« D'autres structures oppositionnelles sont apparues mais qui critiquent le réformisme sans cibler les origines du réformisme: le révisionnisme (...) L'étape de la reconstruction d'un nouveau parti s'est ouverte voici 18 mois (...). Seule structure marxiste-léniniste, la Coordination Communiste ne prétend pas incarner à elle seule le mouvement communiste aujourd'hui divisé en deux ailes, mais aspire à devenir son avant-garde idéologique: - l'opportunisme qui continue à prôner la lutte interne et sert de plus en plus de caution de gauche au social-réformisme du PCF - l'aile révolutionnaire partisane de la reconstruction - (..) sur le plan théorique, nous entrons dans l'étape de rupture avec le passé révisionniste. »

L'offensive du capital contre les acquis sociaux et démocratiques conquis de haute lutte par les générations précédentes de communistes, offensive déterminée par la crise de surproduction du système capitaliste, la défaite du socialisme, de l'URSS, du Mouvement Ouvrier Communiste International et la collaboration de classe du PCF, créent les conditions d'une radicalisation relative de secteurs du mouvement ouvrier de plus en plus nombreux, d'un processus de démarcation au sein même du PCF et d'un certain désengagement des électeurs et sympathisants du PCF.

Les thèses ne sont pas une fin en soi et ne règlent pas mécaniquement la question de l'unité idéologique dans et hors de la Coordination Communiste. La question de « l'avant-garde idéologique » exige non seulement une formation idéologique et politique des militants, mais aussi des tactiques appropriées des reconstructeurs marxistes-léninistes pour rassembler les forces qui entrent en

opposition dans et hors du PCF. Rappelons que le Conseil National de la Coordination Communiste a décidé de travailler à aller vers l'unité avec le groupe « Communistes » de Rolande Perlican.

Pour qu'émerge une véritable avant-garde unie idéologiquement, il faut nous inscrire dans une perspective de lutte acharnée pour la bolchévisation de la résistance anti-mutation. En ce sens les thèses sont d'une grande utilité. Nous devons donc nous inspirer des Bolchéviks et de Lénine, qui ont mené une lutte politique et idéologique intransigeante contre de menchevisme pour que soient « juges les nombreux praticiens révolutionnaires dévoués à la cause » (Lénine, tome 7 p16).

S'inspirer ne signifie pas imiter. Mais ce serait faire le jeu du capital, des opportunistes, des conciliateurs révisionnistes que de s'isoler des éléments ou groupes, qui entrent en opposition dans et hors du PCF au fur et à mesure de la liquidation et de la faillite du PCF mutant.

En effet l'opposition à la mutation découle des effets dévastateurs de la collaboration de classe au gouvernement du PCF, devenu le parti de l'Europe impérialiste en construction, de la guerre impérialiste, de la misère et de la précarité sociale et du chômage. Cette opposition est un rejet de la résistance et non de l'offensive du monde du travail contre le capital.

Il faut le dire tout net, ce serait une erreur que d'imaginer une offensive de l'état-major non encore constitué complètement et coupé de son armée. Dans la phase de reconstruction actuelle, nous devons nous saisir d’une boussole : la conception dialectique du mouvement lié au but que Karl Marx expose de la façon suivante : « dans les grands développements historiques, vingt années ne sont pas plus qu'un jour, bien que, par la suite puissent venir des journées qui concentrent en elles vingt années » (cité dans Textes sur les syndicats, éd. du Progrès, p 270). Et Lénine de nous expliquer qu'« à chaque étape de l'évolution, à chaque moment, la tactique du prolétariat doit tenir compte de cette dialectique objective de l'histoire de l'Humanité: d'une part, en mettant à profit les époques de stagnation politique c'est-à-dire de développement dit « paisible », avançant à pas de tortue pour accroître la conscience, la force et la combativité de la classe d'avant-garde; d'autre part en orientant tout ce travail vers le « but final » de cette classe et en la rendant capable de remplir pratiquement de grandes tâches dans les journées qui concentrent en elles vingt armées » (idem).

En outre, il est impératif que les militants, individuellement et collectivement, soient liés et impliqués dans les luttes sociales, populaires et démocratiques. L'électoralisme a été un véritable anesthésiant du militantisme révolutionnaire au sein du PCF révisionniste et réformiste obnubilé par l'électorat. Devenu le parti des élus, la préoccupation principale de la direction du PCF a été de capter les voix des électeurs. Le problème qui a surgi avec la Savoie dans la Coordination en est une illustration. C'est donc là une question décisive à résoudre, car le modèle du militant que la Coordination Communiste doit forger n’est pas le « secrétaire de Trade Union », le syndicaliste qui « aide constamment les ouvriers à mener la lutte économique, organise des révélations sur la vie de l'usine, explique l'injustice des lois… » , mais plutôt « le tribun populaire sachant réagir contre toute manifestation d'arbitraire et d'oppression, où qu'elle se produise, quelle que soit la classe ou la couche sociale qui ait à en souffrir, sachant généraliser tous ces faits pour en composer un tableau d'ensemble de la violence policière et de l'exploitation capitaliste, sachant profiter de la moindre occasion pour exposer devant tous les convictions socialistes et des revendications démocratiques, pour expliquer à tous et à chacun la portée historique et mondiale de la lutte émancipatrice du prolétariat » (Que Faire? p.100).

Ainsi les thèses ne peuvent être qu'un outil de débat pour former et forger les cadres militants dans la lutte pour la reconstruction du Parti Communiste révolutionnaire. En d'autres termes, les thèses amendées et améliorées substantiellement seront d'une utilité certaine pour aller de l'avant dans la formation des cadres. Comme l'expérience de l'URSS l'enseigne, la question est : « Ou bien commencer par enseigner aux gens, dans les écoles, les éléments de la technique et ajourner pour dix ans la production et l'emploi massif des machines en attendant que se forment dans les écoles des cadres techniques instruits, ou bien procéder immédiatement à construire des machines et développer leur emploi massif dans l'économie nationale, pour, dans le processus même de la production et de l'emploi des machines, enseigner aux gens la technique, former des cadres. Nous avons choisi la seconde voie » (Staline, L'homme, le capital le plus précieux, édition du centenaire, 1974, p.15-16). C'est à cette tâche que nous devons nous atteler pour nous permettre d'ancrer dans la vie la devise de Lénine introduisant le projet de thèses: « Sans théorie révolutionnaire, pas de reconstruction du parti révolutionnaire ».


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